thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist
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Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
■ Messages : 3716 ■ Age du Personnage : 25 ans ■ Logement : ANDREOTTI; 34 Via Barchetta ; Citta Antica ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
♠ ♠ ♠ ♠ ■ Relazioni & Famiglia: ■ Job: Maire de Vérone ■ Sono : marié(e)
Sujet: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Dim 20 Fév - 19:45
« I'm sorry that I hurt you It's something I must live with everyday And all the pain I put you through I wish that I could take it all away »
« C’est vrai ? » Demanda Thybalt en faisant irruption dans le bureau de son père. Il était furieux, cela se lisait sur son visage d’ordinaire impassible. Il se moquait complètement d’interrompre une réunion au sommet entre son grand père et son ancien cabinet sénatorial. Il se fichait comme d’une guigne de son attitude, d’avoir l’air d’un jeune homme de vingt cinq ans capricieux plutôt que de conserver son « masque de sénateur » et d’apparaitre serein et raisonnable. Il écumait de rage et il se moquait du regard des autres, il en avait marre d’être raisonnable et pondéré. « Est-ce que c’est vrai ? » Demanda t-il une fois de plus en boitant jusqu’au bureau de chêne massif. « Messieurs si vous voulez bien nous excusez… » Commença Giulio Andreotti de sa voix usée par l’âge et l’expérience. Thybalt surprit tout le monde en abattant son poing sur la table de travail. « Oh non tu ne t’en tireras pas comme ça ! » S’exclama t-il. « Asseyez-vous » Ordonna t-il d’une voix aussi tranchante qu’une lame de rasoir. « Je sais que cette idée n’est pas seulement la tienne. Tu croyais vraiment qu’en m’offrant une superbe voiture et en me jouant la scène du grand père repentant tu arriverais à faire passer la pilule ? Je t’avais prévenu, je souhaitais nous donner une seconde chance mais je ne voulais pas que tu recommences à manœuvrer dans l’ombre. » Il jeta sur le bureau les clés de la Porche Panamera que son grand-père lui avait offert pour son 25ème anniversaire, avec un peu d’avance, avait-il dit. A présent qu’il remarchait il fallait faire déséquiper toutes les voitures « adaptés à son ancien handicape » du jeune homme. « Tu pensais que ta vieille amie se tairait lorsque je débarquerais dans son bureau ? Tu pensais qu’elle resterait muette face à la colère d’un sénateur ? Vous le pensiez tous ? » Un à un il défia du regard les vieillards assis autour du bureau. Des vieillards voilà ce qu’ils étaient, des vieux politiciens écartés du pouvoir bien longtemps auparavant mais qui refusaient de raccrocher les gants et de laisser la politique à la génération suivante. La flamme de sa colère brillait dans ses yeux, incendiant son sang. Il était revenu à Rome blessé et meurtri, persuadé d’agir dans l’intérêt de Tosca, persuadé de répondre à sa volonté. Il avait pansé ses blessures en se noyant dans le travail, en tentant d’effacer jusqu’à la moindre trace de cette escapade véronaise. Il était apparu au Sénat chaque jour, avait reprit sa place de leader du parti, affirmé son autorité et rattrapé les six mois durant lesquels il était resté à Vérone. Le reste de son temps libre il le passait à tenter d’exhausser le vœu de Tosca, obtenir les papiers du divorce. Il n’avait pas eut le temps de se rendre au bureau du juge chargé des affaires familiales de Milan. Jusqu’à la veille. Il avait conduit toute la nuit durant, savourant le plaisir de pouvoir à nouveau conduire une voiture, de sentir les pédales sous ses pieds, de ne plus être enfermé dans une cage d’aluminium. Il s’était attendu à devoir défendre sa cause mais pas à apprendre que son grand père lui avait planté un nouveau couteau dans le dos. Il avait obtenu gain de cause, épargnant au juge une exposition médiatique embarrassante qui ne tarderait pas à survenir si Thybalt se servait de ses appuis pour la faire destitué. « Nous allons… » Commencèrent en cœur les conseillers de son grand père. « Asseyez-vous ! » il avait presque crié, bouillant de colère, la jointure de ses poings blanchirent sur le pommeau de la cane ouvragé qui l’accompagnerait partout jusqu’à la fin de ses jours. « Pourquoi ? » Demanda t-il en fixant son grand-père dans les yeux. « Pourquoi est-ce que tu as fais ça ? Elle n’a rien à voir avec tout cela. Je suis libre de faire ce que je désire de ma vie. Demander le divorce entre autre… Qu’importe que je sois le chef de fil d’un parti qui défend les valeurs familial et le catholicisme ! Tu n’avais pas a te mêler de ça ! Pourquoi ? Qu’est ce que tu avais à y gagner dis moi ? » Le vieil homme décroisa lentement ses doigts et posa ses coudes sur son bureau. Il se dégageait de lui une sérénité déconcertante, il semblait insensible à la colère de son petit fils, lui qui d’ordinaire ripostait aussi tôt. De toute évidence il avait comprit que cette stratégie ne fonctionnait plus avec le jeune homme depuis des années. « Laissez nous. » Ordonna t-il calmement à ses conseillers. De toute évidence Thybalt n’avait pas encore l’autorité nécessaire pour supplanter l’autorité de son aïeul. Les vieillards disparurent dans un murmure, la porte se referma sur eux sans émettre le moindre bruit, ce qui étrangement accentua la colère du jeune homme. Il était d’humeur à claquer des portes et a ruer dans les brancards. « Assied toi. » « Je préfère rester debout. » Lâcha t-il hargneux en plantant fermement ses jambes sur le plancher. Son grand père soupira et le dévisagea en silence, jusqu'à ce que Thybalt finisse par s’asseoir. A ce petit jeu là, Giulio finissait toujours par gagner. « Merci. » Le remercia le vieil homme d’un geste de la main. « Sache que j’étais sincère en te demandant de m’accorde une nouvelle chance. Je sais que tu m’en veux, et que tu as découvert certaines choses au sujet de l’accident… » Thybalt fronça les sourcils. « Tu es mon petit-fils, le dernier membre de cette famille, mon rôle est de protéger de toi et des autres … J’ai provoqué la mort de ta famille et cette pensée me rongera jusqu’à ma mort, pour cela je ne mérite pas ton pardon et je ne le désire pas. Je répondrais de mes actes devant Dieu. J’ai commis une erreur, et en quittant ton poste au Sénat tu t’es mis en danger… J’ai chargé quelqu’un de veiller sur toi… Je t’ai vu entrer dans cette banque et j’ai compris que Reena avait prit quelques précautions pour te protéger… Je t’ai aussi vu rencontrer cette jeune personne, Tosca Dal Cappello, j’ai enquêté sur elle et … » « Tu n’avais pas le droit ! Elle est … » S’emporta aussitôt le jeune homme, le regard de son grand père fit mourir sa réplique acerbe dans sa gorge. « Laisse moi finir avant de m’écharper vif. J’ai enquêté sur elle. C’est une jeune personne tout à fait convenable, bien que sa famille soit dans une situation difficile, je t’ai aussi vu revenir à la vie grâce à elle… reprendre goût à la vie, à ses plaisirs… Maria elle-même témoignait de tes progrès quotidien... Lorsque j’ai appris qu’elle t’avait épousé… J’étais heureux pour toi. Inquiet également. La spontanéité n’a jamais été ton fort, c’était Reena la démonstratif, toi tu étais plus prudent, avançant à petits pas. Je n’aurais pas du me mêler de tout ça… Mais lorsque tu m’as prévenu de ton retour à Rome. J’ai compris qu’il fallait que je fasse quelque chose. A nouveau tu fuyais … Je savais que ce n’était pas ce qu’il te fallait. Alors j’ai demandé à mon ami la Juge Ramirez de retarder la procédure, d’égarer les documents ou bien de mettre son véto à votre divorce tant que vous n’auriez pas comparu devant elle…N’importe quoi… le temps que tu comprennes ton erreur ! » Un silence glacial lui répondit, Thybalt contemplait fixement une rayure profonde dans le plateau de chêne patiné par les années et les Andreotti qui avaient siégés derrière. Reena avait fait cette rayure avec sa bague de fiançailles en diamant, Thybalt se rappelait de cette journée avec précision. Elle était venue dans ce bureau, s’était approché de son grand père et lui avait annoncé de but en blanc qu’elle allait se marier… dans sa joie elle avait raillé le plateau en voulant montrer le solitaire à son grand-père. Sa colère semblait être retombée comme un soufflé. « Je ne veux pas divorcer… Mais je le dois. » Soupira t-il en redressant les yeux. « C’est ce qu’elle veut. Elle ne le quittera pas. Et j’ai besoin d’être le seul homme de sa vie. La savoir dans les bras d’un autre me donne envie de me cogner la tête contre les murs pour faire sortir les images de mon esprit. Elle ne veut pas de moi… Elle ne me fait pas confiance. Elle me fuit. Elle n’est pas prête a tout abandonner pour moi… Ce mariage tout ça c’était une erreur. » Son grand père contourna son imposant bureau pour venir s’asseoir près de lui. Il lui glissa un verre de bourbon entre les mains, puis il posa sa main sur son avant bras. « Réponds sincèrement à ma question, si c’était à refaire, l’épouserais-tu une fois de plus ? » « Oui… » « L’aimes-tu ? » « Oui. » « Est-ce qu’elle t’aimes… » « Je … C’est compliqué. » « Il n’a rien de plus complique que l’amour, cependant penses-tu compter pour elle Thybalt ? Si on fait abstraction de tout le reste. Est-ce qu’elle t’aimes ? » « Je crois oui… » « Alors laisse-moi te poser une dernière question. Qu’est ce que tu fais ici ? » Etonné le jeune homme releva les yeux vers son grand-père. Giulio avait toujours prôné la tolérance zéro en matière de distraction pour son petit-fils, durant sa campagne il s’était arrangé pour qu’il se concentre sur le travail et rien que le travail. Et aujourd’hui… Le sourire du vieil homme lui réchauffa le cœur. Il avait cru que c’était une nouvelle manœuvre de son grand-père pour diriger sa vie. Mais peut être avait-il été prompt à le juger. « Elle m’en veut… Elle croit que je l’ai trompé… A cause de ses photos dans la presse. » « Avec la fille Leone Di Marco ? Andréa c’est ça ? » Thybalt hocha la tête. « Et bien où est le problème ? » De nouveaux le regard surpris de Thybalt se riva dans les yeux bleus de son mentor. « Elle pense que je l’ai trompé. » Répéta t-il. « Je t’ai connu plus décidé mon garçon. Plus têtu. Pourquoi plies-tu devant elle comme un roseau sous le vent ? Tu l’aimes, elle t’aime et elle se méprend sur une situation. Retourne à Vérone et montre-lui le chemin. C’est plus simple que de se tenir face à ses opposants dans une tribune du Sénat, j’en ai conscience. Tu sais ta grand-mère et moi n’étions pas si différent qu’elle et toi... » « Et qu’as-tu fais ? » « Je lui ai montré le chemin. » Doucement il déposa dans les doigts de son petit fils les clés de sa Porche. « En dépassant les limitations de vitesses tu devrais être à Vérone demain matin… Après tout, il faut bien que ton immunité diplomatique serve pour une fois… je n’ai jamais vu un sénateur aussi soucieux de la loi que toi… Une chose que tu ne tiens surement pas de moi. » Ajouta t-il avec un sourire cynique. « Va. » Il referma les doigts de son petit fils autour des clés. Son sourire redonna confiance en lui au jeune homme. Une chose qui n’était pas produite depuis longtemps. « Tiens. » sortant une épaisse enveloppe de son bureau il la tendit au jeune homme. « Les papiers pour le divorce. Diane me les a envoyés cette nuit. Fait en bonne usage. » L’étreinte que lui donna son petit-fils le surprit. Depuis la mort de sa famille, Thybalt avait toujours refusé tous contacts physiques avec lui. Raide dans un premier temps entre les bras du jeune homme, il finit par se détendre et lui rendre son étreinte. « Va » Souffla t-il alors que les larmes perlaient à ses paupières en poussant Thybalt vers la porte. « Et ne reviens pas sans cette jeune femme. Ma brève rencontre avec elle m’a donné envie de faire plus ample connaissance … Elle est vivifiante. » « Non le mot que j’aurais employé serait… casse-pied, têtue, fière, allumée… » « Tout ce dont tu as besoin en sommes. Un peu de fantaisie. Un grain de folie.»
(…)
L’annonce de son départ de Rome pour une durée indéterminée avait provoqué un nouveau tôlé dans les rangs de son parti. Thybalt le savait politiquement il était de toute évidence en mauvaise posture, il sabotait sa carrière de lui-même et en avait pleinement conscience. Mais, il n’aurait pu être un sénateur dévoué au peuple alors que son esprit dérivait sans cesse vers Vérone et la Villa Dal Cappello. il avait quitté Vérone sans la revoir, sans lui parler et ce silence pesait sur ses épaules bien plus qu’il ne l’aurait admit. Quelque chose s’était produit en lui auprès d’elle, pour la première fois de sa vie il ne s’était plus sentit vide, esseulé. Avec elle il s’était épanouit, bien plus qu’avant l’accident. Elle l’avait transformé. Et, il avait tout gâché. Il avait commit des erreurs, erreurs qui lui avait coûté la confiance et l’amour de Tosca. Il avait volontairement commit ses erreurs. Il s’en rendait compte à présent, pas dans le but de la blesser mais pour tester son amour… l’arrivée du fiancé de la jeune femme en ville avait remué quelque chose en lui, cette peur viscérale d’être trompé une fois de plus, de la perdre à nouveau après l’avoir tant espéré. Il avait été stupide. Il avait eut besoin de parler, de se confier au sujet de ce qu’il ressentait. Si seulement Reena avait été là… Sa sœur lui avait tant manqué. Le destin avait alors mis sur sa route Andréa Leone Di Marco. Qui pouvait mieux écouter les déboires d’un amoureux transit qu’un écrivain de roman romantique à suspense ? il n’avait pas su parler à celle qu’il aimait, il avait confessé ses doutes, ses peurs à un tiers, et en cela il avait trahit la confiance de Tosca. Les journalistes et chroniqueurs people était le quotidien du jeune homme à Rome. Lorsqu’il avait quitté le Sénat pour prendre un congé sabbatique, il avait été accompagné de cette meute de journalistes qui le suivait sans arrêt. Mais, passé 3 mois à Vérone sans scandales à se mettre sous la dent, les journalistes qui l’accompagnaient avaient finis par déserter leurs postes… il s’était cru à l’abri. Il avait suivit Andréa dans une soirée entre amis… Et il avait oublié que chaque individu armé d’un téléphone portable était le potentiel vecteur d’un scandale. Lorsque la photo avait été prise, il se rappelait avoir baissé les yeux sur leurs mains enlacées. Il regrettait à présent de n’avoir trouvé dans ce geste rien qui n’aurait pu prêter à confusion. Il n’était pourtant pas sans ignorer que toutes les craintes de Tosca à son sujet n’étaient pas éteintes, il éprouvait la même chose à ce sujet et pourtant … Il avait cru que rien ne découlerait d’une vulgaire photo le représentant avec Andréa dans une soirée privée. Une cruelle illusion de sécurité dont il souffrait à présent milles mots. Qu’avait-il dit à Maria lorsque les journaux avaient affichés à leurs unes la fictive romance entre lui et Andréa ?
« J’ai besoin de changer d’air. Tout ce que j’ai fait ici depuis mon retour… » Il avait été incapable de terminer sa phrase. Il s’en voulait tant. Thybalt avait serré Maria dans ses bras de toutes ses forces, humant une dernière fois les fragrances familières d’eau de Cologne et de Lavande que portait sa vieille gouvernante depuis des décennies, une odeur qui avait émaillé les souvenirs de son enfance.
Thybalt était heureux de se retrouver derrière un volant. Débrayer, embrayer, freiner, accélérer. Plier, déplier les jambes. Relever le pied en gardant le talon bien au sol pour passer les vitesses. Tant de gestes longtemps inaccessibles qu’il retrouvait et dont il jouissait intérieurement. Quand bien même la voiture parût sous ses doigts douée d'une vie propre, il n'en appréciait pas moins ses qualités de routière et sa tenue dans les virages. Tant et si bien qu'il se demandait comment il avait pu si longtemps se priver du pur plaisir d'être ainsi seul maître à bord de son existence. Voilà une parfaite métaphore du mariage, pensa-t-il alors qu’un panneau de direction l’informait qu’il avait déjà fait la moitié du trajet... Et du divorce. Mais basta, se dit-il en secouant la tête. Il n'allait tout de même pas repenser à cela maintenant, il avait prit sa décision, et il voulait profiter de ce voyage pour ne penser à rien d’autre qu’à son autonomie retrouvée. Pourtant, il poussa un profond soupir. Afin de chasser le steelblues qui se déposait de nouveau sur son esprit, il augmenta le niveau sonore de la stéréo. Et, tandis que les notes entraînantes d'un tube de Muse s'envolaient dans l'air frissonnant de la nuit, Thybalt accompagnait le rythme de son pied libre sur le plancher de la voiture. La nuit était belle. Depuis qu’il avait prit sa décision il se sentait mieux, plus en paix avec lui-même qu’il ne l’avait été depuis longtemps. Il roulait fenêtre ouverte, profitant de la fraicheur de cette nuit d’hiver avant arrivée du printemps. La Porsche filait en direction de Vérone, bien au dessus des limitations de vitesse, les routes nationales étaient désertes. Il serait à Vérone à l’aube. Pour le petit déjeuner. L’air embaumait cette odeur caractéristique d’herbe humide et de soleil, loin de l’agitation de la ville, la campagne Vénitienne. Cette odeur qu’il associait depuis toujours à la liberté d’être lui-même. Bientôt, il serait « à la maison ». Bientôt il devrait se confronter à sa pire peur, prendre le risque de perdre celle pour qui son cœur tambourinait follement dans sa poitrine.
(…)
L’aube se levait sur Vérone tandis qu’une voiture sombre aux lignes sportives grimpait la route à flanc de coteaux menant à la ville ancienne. Les rues étaient encore désertes à cette heure bien matinale. Les quelques lèves-tôt présent dans les rues se retournèrent sur le passage de la voiture de sport aux lignes félines. Intrigués. Le conducteur, invisible aux yeux des passants à cause des vitres teintés, manœuvrait souplement sa puissante voiture dans les étroites venelles de la Cita Antica. Un habitué de toute évidence, qui connaissait la ville comme sa poche. Il était rare de voir revenir les « riches migrants » Véronais avant le début de l’été. Pourtant aucuns d’eux ne se souviendrait de cette voiture puissante, une chance ou bien un cadeau du destin, l’avenir seule le dirait. Thybalt Andreotti avait conduit toute la nuit, et une bonne partie de l’après midi précédent, il s’était accordé une heure de pose pour se dégourdir les jambes et masser ses muscles encore fragiles ainsi qu’un café. L’adrénaline et l’impression d’avoir enfin retrouvé le contrôle de sa vie avait fait le reste. De larges cernes mauves alourdissaient son regard et son costume n’avait plus rien de frais, ses vêtements hors de prix étaient froissés et ses cheveux dans un désordre sans nom se dressait sur son crane. Il y avait pourtant dans son allure quelque chose d’attendrissant, et se lisait dans ses yeux une remarquable détermination. S’il avait l’air perdu, égaré, son regard démontrait le contraire. Il savait exactement où il allait. Les pneus de la Porsche crissèrent sur les pavés de la rue ??? lorsqu’il freina brusquement à hauteur de la Casa di Giuletta. Il remarqua aussitôt le portail bardé de chaines et d’un cadenas flambant neuf. Il nota que le cadenas avait du bravement défendre sa vie avant d’être éventrer par un objet pointu qui l’avait fait céder à force de pression. Les grilles de la cours étaient grandes ouvertes, décidément le destin, en la personne de jeunes romantiques naïfs, était de son côté aujourd’hui. Il claqua les portières de la voiture et à peine eut-il fait trois pas que le verrouillage centralisé se mit en marche. Plus besoin de se soucier de choses bassement matériel désormais, même les voitures se verrouillait dès que vous éloigniez d’elle, clés en main. Les papiers du divorce étaient nichés contre son cœur dans la poche intérieur de son costume. Il ne portait que ce fin smoking dans le froid mordant d’une journée de février pourtant il ne frissonnait pas, et ne semblait même pas avoir conscience du monde extérieur. Il y était. Le moment était venu. Il rajusta ses vêtements dans un geste familier, répéter une centaine de fois dans la journée et passa une main fébrile dans ses cheveux achevant l’œuvre de destruction qui était à l’œuvre sur son crâne. Il était résolu, canne et chaussures italiennes cliquetant joyeusement dans les pavés de la cour, il prit le chemin de la porte d’entrée de la demeure. Il devait être à peine six heures et pourtant, il se moquait pour une fois des convenances, on ne faisait pas attendre le destin. Il remarqua les centaines de petits mots glissés entre les interstices du mur principal, face à la statue de la mère de Tosca, et sourit, la dénommée Tosca n’en aurait pas finit de tempêter une partie de la journée, le temps qu’il lui faudrait pour effacer les traces du passage de centaines d’inconnus. Il sourit. Le premier vrai sourire depuis longtemps, le premier sourire depuis qu’il pensait à elle, d’ordinaire c’était plutôt une mine assombrie qu’il affichait lorsqu’il pensait à la jeune femme et à la douleur de son cœur meurtri. Il avançait d’un bon pas dans l’allée. Lorsqu’il avait quitté Vérone en Octobre, il tenait encore à peine debout, aujourd’hui loin de galopé cependant, il se débrouillait plutôt pas mal. Sa vieille secrétaire était allé jusqu’à lui assurer, sans qu’il ne lui eut demandé quoi que se soit, que cette canne en rajoutait à son allure « sénatorial ». Son seul petit plaisir avait été de se procurer une canne ostentatoire qui ne manquait pas de faire rire dans les rangs de l’opposition. Des flammes barraient le corps de sa béquille tandis que sous sa main le pommeau sculpté en argent représentait le monde. Belle métaphore, le diable tenait le monde dans sa main, n’était-ce pas ce que l’on avait dit de son grand-père lorsque le scandale avait éclaté ? Thybalt avait toujours eut un sens de l’humour particulier de l’avis de tous. Superficiellement aujourd’hui il se demandait ce que Tosca penserait de tout cela, s’il ne la perdait pas définitivement à cause de ce qu’il allait faire. La porte de la Villa se rapprochait, et les doutes revinrent de plus bels tentant de le faire fléchir, non pas réfléchir, était-il prêt a encaisser un refus ? Prêt à prendre le risque ? Mais que pouvait-il faire d’autre si ce n’était réagir. Leurs échanges de texto avaient été assez claire. Elle ne voulait le voir que s’il trouvait une raison de la convaincre. Sachant qu’il n’en trouverait jamais une qui aurait eut grâce aux yeux de sa compagne, il avait choisit de s’imposer par la force. De reprendre le contrôle arrêter cette chute en spirale vers le bas. Il avait prit une décision et c’est blindé de cette résolution qu’il gravit les deux marches menant à la porte. Il prit une grande inspiration et sa main se saisit du heurtoir qu’il cogna sur la porte avec force. Qu’importe qu’il réveillât toute la maisonnée. Cela n’avait plus d’importance. Plus maintenant. Il se fichait du secret, de Mattéo, de Paris et des autres. Elle avait provoqué cette réaction. Elle en gérerait les conséquences avec ou sans lui… Tout dépendrait de la réaction qui serait la sienne. Il savait que se serait-elle qui lui ouvrirait la porte. Paris et Donatello ses « colocataires » dans l’Antique demeure n’était pas ce que l’on aurait pu qualifier d’oiseaux de jours… Pourtant, son cœur manqua un battement lorsqu’il reconnu le galbe de sa jambe et le tee-shirt trop long qu’elle portait… Son tee-shirt, ne put-il s’empêcher de remarquer. Elle ne s’attendait pas à le trouver sur le bas de sa porte, avait-elle conscience qu’elle ne rêvait pas ? Il n’aurait su le dire. Elle venait de se réveiller et à en croire les marques sous ses yeux, elle avait aussi du mal à trouver le sommeil. Il fit un pas en avant. Il savait que sa technique était risquée, qu’il y avait 90% de chance pour qu’il y perde l’usage de ses jambes une nouvelle fois. Mais qu’importait…. Il ne pouvait pas la perdre sans avoir essayé. Au moins une fois. Elle était sa lumière dans l’obscurité. Son tout. Sa moitié. Son âme sœur.
Il fit un pas et ses bras se refermèrent autour d’elle. Un geste si simple, si naturel alors qu’il ne l’avait pas touché depuis des mois. Il avait cru que la décharge serait moindre après tout ce qu’ils avaient vécut, mais ce ne fut pas le cas. Sa peau fut littéralement électrisé par son touché. Le reste suivit. Thybalt n’avait jamais été un être habitué aux choses de l’amour mais avec elle, tout était différent. Il transcendait l’être timide qu’il était en privé. Il devenait celui dont elle avait besoin. Celui qu’il devait devenir. Il la plaqua contre le mur, emprisonnant ses poignets dans une main. Sa bouche trouva la sienne. Dévastatrice. Conquérante. Victorieuse. C’était aussi simple que respirer. Leurs corps s’emboitaient toujours parfaitement. Et le feu était toujours là. Dévorant, intrusif, violent et passionné. Peut être leur dernier baiser. Charnel comme jamais, sensuel et brûlant à l’aune de son désir pour elle, de son amour aussi. Preuve vivante qu’il ne lui avait pas mentit. On ne pouvait pas mentir de cette manière. Le désir n’avait rien a voir là dedans. Ce baiser était à lui seule une déclaration, une supplique, la demande d’un pardon, d’un avenir, une promesse aussi. Un baiser auquel elle répondait son corps se pressant contre le sien, sa main se mêlant à ses doigts. Consentante. Mais était ce volontaire ? Il allait le savoir.
Sa bouche à regret se détacha de la sienne, à regret son corps se sépara du sien, la morsure du manque le dévora aussitôt. Il fit deux pas en arrière, s’éloignant d’elle, de ce que lui dictait son instinct. Il était temps pour elle de choisir. Il lui referma les doigts autour de l’enveloppe de kraft.
« Maintenant dis moi que tu ne m’aimes pas. Que tu veux divorcer et que tout ce que je t’ai dis était un mensonge… Dis le moi si tu penses vraiment que tout ceci n’est qu’une mascarade. Si tu ne ressens plus rien pour moi. »
Tosca J. Dal Cappello
FORBIDDEN FRUIT — Cause the morning always come to kill the dream —
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Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Ven 25 Fév - 3:49
Des coups donnés à la porte, comme d’habitude. Le chien grattant et aboyant pour sortir de la chambre, comme d’habitude. Et le sentiment diffus de devoir se lever, de devoir à tous prix se lever. Pourtant il est tôt, comme à chaque fois. Et comme à chaque fois, en tirant son visage de l’oreiller et en ouvrant un œil au prix d’un effort surhumain, elle constate qu’il est encore trop tôt pour que le soleil n’ait décidé de se montrer. Etrangement, elle est seule dans le lit, et rien que ce fait, pourtant anodin, témoigne du fait qu’il s’agit d’un rêve. Si elle se trouvait dans la réalité, le corps de Pâris, ou bien celui de Chico, peut être même des deux, se trouverait recroquevillé à ses côtés (concernant Chico), ou plus vraisemblablement répandu sur la totalité du matelas, un bras entravant son corps à elle (pour Pâris). Mais ce matin là, comme à chaque fois, le lit est vide de toute présence, hormis celle du chien, qui a déjà bondit hors des draps pour entamer sa danse dite « danse du pissou » sur le seuil de la porte. Comme d’habitude elle cherche à atténuer le vacarme en se plaquant l’oreiller au dessus de la tête, et comme d’habitude cela n’a pour effet que de l’agacer davantage. Alors, comme d’habitude, elle s’extirpe de la couette en poussant un grognement de bête sauvage. Comme à chaque fois elle pense à enfiler un des pulls qui trainent sur le sol, mais se ravise en se disant qu’elle n’aura même pas la force de lever les bras pour l’enfiler. Alors elle traine les pieds jusqu’à la porte, et manque se casser la figure lorsque le chien décide de glisser entre ses jambes pour être le premier à sortir. C’est con un chien, parce que même s’il est le premier arrivé à la porte d’entrée, il devra quand même attendre qu’elle lui ouvre la porte. Si elle avait été un chien, elle serait plutôt restée derrière son maître et lui aurait bouffé le cul afin qu’il descende plus vite. Voilà à quoi elle pense en atteignant le haut de l’escalier alors que les coups à la porte n’ont toujours pas cessé, et puis elle se souvient qu’elle a déjà eu cette même pensée, comme d’habitude. Et comme à chaque fois, elle regrette de ne pas avoir pensé à enfiler une paire de chaussettes avant d’entreprendre la descente de l’imposant escalier aux marches de marbre. Elle se demande aussi pourquoi elle est la seule debout, pourquoi aucun des mecs n’a mit le nez dehors et dévaler les escaliers armé d’une batte de baseball, pourquoi elle est la seule à tenter de vaincre les vapeurs d’un sommeil lourd en cette heure plus que matinale. Mais comme à chaque fois, elle semble seule dans la demeure. Pas de Pâris, pas de Benvolio, et quand à Chico… non, lui, même si on tirait un feu d’artifice depuis sa chambre, il trouverait le moyen de poursuivre sa nuit sans encombre. Comme d’habitude elle jette un œil à la grande horloge s’imposant dans l’entrée, et relève qu’il est à peine six heures du matin. Comme d’habitude elle grimace en poussant le chien du pied afin de pouvoir atteindre la porte. Comme d’habitude elle recule légèrement afin de s’aménager l’espace nécessaire pour tirer la lourde porte à elle, après avoir fait cliqueter une longue série d’antiques verrous. Comme d’habitude elle s’étonne d’y parvenir malgré sa force de haricot vert au sortir du lit. Comme d’habitude, elle sait, avant même de relever la tête, quelle silhouette elle s’apprête à contempler. Mais malgré tout, et comme d’habitude, la surprise s’affiche sur ses traits tandis que d’une main elle vire les cheveux qui s’étalent sur son visage. Comme d’ordinaire, il est là, debout, face à elle, affichant fatigue et détermination, là où elle n’affiche que fatigue et stupeur. Comme d’habitude il ne lui laisse pas le temps d’émettre le moindre son, et comme une chorégraphie longuement répétée, il enroule ses bras autour de sa taille à 4. A 5, il la plaque contre le mur, et à 6 elle ferme les yeux tandis qu’il presse ses lèvres contre les siennes. Normalement, c’est à ce moment qu’elle commence à se débattre, tentant de se libérer à l’aide d’un genou vengeur venant s’écraser sur la partie la plus intime de l’anatomie masculine. Mais elle a renoncé depuis longtemps à ce scénario, décidant que si son esprit était suffisamment masochiste pour lui imposer encore et encore ce fantasme stupide, alors qui était-elle pour prétendre à ne pas le suivre jusqu’au bout ? Maintenant, dès le début, elle se laisse faire et profite. Et comme d’habitude, elle sent l’électricité se répandre en elle, faire se dresser chaque poil de ses avant-bras, faire se cambrer son corps, tandis que le reste de son être n’est plus réduit qu’à un seul et unique baiser, comme si chaque molécule composant la vie en elle se focalisait sur une seule et même action. C’est tellement réel et palpable, et furtif et volatile à la fois. Elle peut sentir ses doigts s’emmêler aux siens après qu’il lui eut lâché les poignets, elle peut sentir sa main glisser le long de sa cuisse, elle peut sentir son souffle anarchique répondant au sien. Et pourtant, elle sait que comme à chaque fois, chaque sensation est éphémère, qu’il lui suffit de compter jusqu’à dix pour que tout disparaisse comme par magie. 1… 2… 3… elle ne sent plus la pression de ses doigts autour de siens. 4… 5… 6… son corps semble s’être évaporé du sien. 7… 8… 9… ses lèvres ont déserté les siennes. 10… elle ouvre les yeux sur le blanc douloureux des murs de sa chambre soumis à la luminosité d’un soleil déjà trop haut dans le ciel. Elle étouffe un soupir de frustration qui ne manque pas de faire remuer le corps recroquevillé près du sien. Non, elle n’est pas seule dans son lit, et cette simple information lui suffit à prendre conscience qu’elle ne rêve plus. Encore une fois, son esprit a profité de la nuit pour lui offrir ce fantasme récurant et douloureux. La souffrance est tellement palpable qu’elle s’attend presque à sentir une plaie béante dans sa poitrine, mais ses doigts ne se referment que sur le tissu d’un tee-shirt trop grand. Nulle plaie visible. Tout est dans sa tête. Et sa tête semble dérailler depuis des mois. Combien de fois a-t-elle déjà fait ce rêve ? Vingt fois ? Trente fois ? Elle a arrêté de compter après le troisième réveil en sursaut, le cœur battant à s’en décrocher de sa poitrine. Elle est tellement frustrée et furieuse, qu’elle en hurlerait presque. Mais comme à chaque fois, elle enfonce son visage dans l’oreiller et le mord de toutes ses forces afin que ses violents sanglots ne réveillent pas Pâris.
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« Tu vois ? C’est exactement de ça que je parle. » Depuis combien de temps était-elle entrain de fixer sa paille qu’elle tournait encore et encore dans son soda, jouant à faire s’entrechoquer les glaçons déjà bien fondu ? Rien que le fait que ces derniers aient réduit de moitié aurait du la mettre sur la voie. Elle releva le nez, quelque peu interloquée et perdue, vers l’homme qui se tenait la tête entre les mains, rabattant ses cheveux en arrière dans un geste dont il semblait retenir la violence. Ses doigts s’accrochaient aux mèches soyeuses, tirant dessus avec une rage toute contenue. Etait-ce sa frustration qui s’exprimait ainsi ? Sûrement, et elle ne pouvait pas l’en blâmer, elle devait probablement être l’interlocutrice la plus agaçante du monde. Elle le fixa un instant, attentive aux moindres traits qu’elle connaissait par cœur, notant l’expression qu’elle avait observé maintes fois chez lui, sans jamais en être la cause, pour autant. Puis, comme une enfance souffrant d’un trouble de l’attention, son regard embraya sur le reste du décor, glissant vers le bar qu’elle percevait au-delà de lui, et l’homme corpulent qui s’acharnait à sécher un verre au torchon en sifflotant, puis vers l’habitué, installé sur son tabouret et s’enfilant son troisième ou quatrième verre d’alcool malgré l’heure précoce. Il ne devait pas être plus de seize ou dix-sept heures, et il était déjà là à leur arrivée, quelques heures plus tôt. La salle était presque vide –il faut dire que le froid faisait hiberner les autres véronais chez eux, et que les quelques courageux bravant l’hiver pour s’enquiller leur verre devant un bon match, ne pousseraient pas la porte avant quelques bonnes heures encore – hormis l’ivrogne solitaire, le barman, une famille de touristes autrichiens ou suisses, et eux. Eux qui siégeaient l’un en face de l’autre, mais qui ne se parlaient pas. Oh, il leur était arrivé de nombreuses fois de se retrouver tous les deux dans un bar et de ne pas se parler pendant de longues minutes sans que cela ne les dérange, mais cette fois ce n’était pas ce type de silence agréable et apaisant, où on se contente d’être bien avec l’autre et profiter du moment présent. Il s’agissait d’un silence pesant, celui qui nous oblige à nous creuser la tête pour le rompre le plus rapidement possible. Le pire étant qu’ils étaient là pour « parler ». Parler de quoi ? C’était à Matteo de le dire, même si Sca en avait une vague idée. Elle n’était plus que l’ombre de celle qu’il avait connu à Venise, celle qu’il avait côtoyé et aimé pendant huit longues années. Il l’avait dit lui-même, il ne la reconnaissait plus. Elle aurait bien aimé prétendre que c’était le deuil qui la rendait ainsi, mais elle savait que ça n’avait absolument rien à voir avec ça, et que Matteo le savait aussi. Elle aurait du le quitter depuis longtemps, rien que le fait d’en aimer un autre, même sans être avec cet autre, était un motif suffisant pour ne plus être légitime à ses côtés à lui. La logique aurait voulu qu’elle l’autorise à partir, à trouver quelqu’un d’autre qu’elle, quelqu’un qui saurait l’aimer comme s’il était l’homme le plus important au monde, et pas seulement le deuxième homme le plus important. Mais elle était lâche. Lâche et égoïste de surcroit. Elle redoutait de s’entendre dire « je ne t’aime pas assez » et de l’entendre lui répondre « je t’aime pour deux ». Après huit ans, comment voulez-vous une rupture douce et sans cris ? Comment épargner à l’autre une souffrance inutile ? Comment lui imposer son choix et oser prétendre qu’on sait mieux que lui ? Comment lui annoncer, sans douleur, qu’ils ne finiront pas leurs vies ensemble ? Comment accepter soi-même cet état de fait ? Si seulement elle avait pu être prête à l’envisager, mais elle n’était certaine de ce qu’elle souhaitait réellement. Ou bien si, peut être. Elle aurait souhaité pouvoir aimer Matteo comme elle aimait ce connard de sénateur qu’elle n’aurait jamais du rencontrer. Ca aurait été tellement plus logique. Alors, son envie de sauter par-dessus la table pour ce caller entre ses bras aurait été un besoin viscéral, et non pas une simple nostalgie alliée a un besoin de sécurité et de tendresse. Et si elle ne le faisait pas, c’était aussi parce qu’elle ne pensait pas y avoir droit. Elle n’avait plus droit à Matteo, et pourtant ne parvenait à s’en passer. Et lui restait. Il restait pourquoi au juste ? « Je vais partir. » Pardon ? Sa sentence était tombée aussi violemment qu’une lame de guillotine sur le billot. Comme s’il lisait dans ses pensées, il venait de lui donner la réponse à sa question. Pourquoi restait-il ? Et bien, tout simplement, il ne restait pas. Le regard de Sca se reporta en un temps record sur lui, effarée, effrayée. Mais elle ne répondit rien. « T’as entendu ce que je viens de dire ? » Oui. Oui, elle avait parfaitement entendu. Mais sa gorge sèche et étroite l’empêchait de parler, et son esprit vidé de toute motivation l’empêchait de réfléchir correctement. C’est comme s’il venait de bouleverser sa vision du monde. Tout avait changé, de l’intérieur du bar qui lui semblait à présent austère et froid, jusqu’à l’ivrogne au bar qui était passé de familier à totalement étranger. Alors elle se contenta d’hocher la tête, comme une conne, comme une gosse, comme une gosse conne. « Je vais retourner à Venise. » Reprit-il en détournant le regard à son tour, sa bouche ne formant plus qu’un pli d’amertume. « Objectivement, je n’ai rien à foutre ici. » Se justifia-t-il, plus pour s’en convaincre que pour la convaincre, visiblement. « Si encore je pouvais prétendre que tu as besoin de moi, alors peut être que tout ce semestre de fac foutu en l’air serait un peu moins dur à encaisser pour mon père, mais… Je vis à l’hôtel, Sca ! Tu passes ton temps avec un mec dont on ne sait absolument rien mais pour lequel tu t’es découvert un instinct maternel, et on ne se voit jamais. Je suis dans la même ville que toi, et pourtant on ne discute que par texto. Et encore, à base de deux ou trois par jour, c’est pas ce que j’appelle un véritable échange digne de ce nom. Ca, je peux le faire aussi depuis Venise. Je sais même pas si tu comptes retourner un jour là-bas. T’étais censée rester ici une semaine, tout au plus. Et t’es là depuis des mois. Et visiblement, c’est pas ton frère ou ton cousin qui vont te ramener à la raison puisque, eux aussi, semble avoir viré extraterrestre et ne plus vouloir quitter Vérone. Est-ce que le mariage est encore d’actualité ? J’en doute. T’es tellement loin dans ta tête et tellement proche physiquement, qu’il vaut mieux que je m’éloigne avant de péter un câble. » Il marqua une pause, puis reporta son regard sur elle, vraissemblablement dans l’attente d’une réponse quelconque. Une fois de plus, à court de mots, elle se contenta d’hocher la tête tout en retenant des larmes de colère et de frustration. Pas de tristesse, non, elle était au-delà de la tristesse, elle avait dépassé ce cap et souffrait mille morts. « Je vais rester jusqu’à dimanche, histoire de pas rater l’anniversaire, et je repartirais lundi si ça te convient. » Est-ce que ça lui convenait ? Absolument pas. Mais est-ce que, objectivement, quelque chose, quoique ce soit, était capable de lui convenir ? Non. Toutefois, elle releva un regard interrogateur vers lui. L’anniversaire ? C’était l’anniversaire de qui ? Mentalement elle fit l’inventaire de toutes les dates de naissances, mais aucune ne correspondait à dimanche. 27 février. Y avait quoi le 27 février ? Le soupir triste de Matteo lui indiqua qu’elle avait oublié quelque chose d’important. « Notre anniversaire de fiançailles, Tosca. » Merde ! « Ca fera deux ans, dimanche. » Re-merde ! Il se passa une nouvelle fois les deux mains dans les cheveux, accrochant ses mèches avec tant de force qu’elle su qu’il se retenait de lui hurler dessus, de lui cracher toute sa frustration au visage. Depuis combien de temps n’avaient-ils pas fait l’amour ? Ca se comptait en mois. Et alors qu’il tentait de se contenir, Tosca se surprit à se demander s’il l’avait trompé afin de satisfaire un besoin qu’elle n’était plus capable de calmer elle-même. « Tu sais quoi ? Laisse tomber ! » Finit-il par exploser, sans pour autant hausser la voix, mais laissant exprimer l’étendue de sa colère au travers son regard et le mouvement sec de la chaise qu’il repoussa pour se lever d’un bond. « J’ai qu’à partir maintenant ! T’en as rien à foutre ! Et n’essaye même pas de prétendre le contraire, s’il te plait, respecte au moins ça ! T’avais même pas une foutue idée de ce que pouvait être le 27 février ! T’as conscience de l’importance que ça a pour moi, au moins ? T’as conscience du fossé entre nous ? J’en ai marre. Je veux bien me battre, mais encore faudrait-il que je sache contre quoi j’ai à lutter. C’est quoi ton putain de problème, Dal Cappello ? » Elle aurait souhaité qu’il s’arrête, qu’il arrête de l’accabler de la sorte, mais dans un sens il en avait totalement le droit. Sauf qu’elle ne voulait pas que ça se termine comme ça, sur une énième erreur de sa part, sur une colère froide qui ne manquerait pas d’établir ses quartiers d’été entre eux. Et cette panique, encore et toujours. Cette peur implacable, celle de perdre encore quelqu’un qu’elle aime, qu’importe la nature de cette perte. Alors elle l’attrapa par le poignet, l’empêchant de poursuivre son mouvement de fuite qu’il venait d’amorcer. Bien sûr, elle ne faisait pas le poids face à sa force, et en un seul geste il aurait pu se dégager. Mais ça faisait tellement longtemps qu’elle ne l’avait pas touché, que cette simple main enserrant son poignet l’immobilisa aussi efficacement qu’un coup de taser. « Arrête ! » Le supplia-t-elle, recouvrant sa voix en s’étonnant presque d’être parvenue à sortir un son à peu près correct. « Je t’en prie… reste. Reste encore un peu. Pars pas comme ça. Je suis désolée. » Les mots sortaient en vrac, sans ordre précis, sans suite logique. Il fallait juste qu’ils sortent. Elle ne savait même pas ce qu’elle lui demandait au juste. De rester à Vérone ? Ou bien de rester dans ce bar ? Qu’importe. Matteo qui attendait une réaction depuis de longues semaines, venait enfin d’obtenir ce qu’il souhaitait. Instantanément calmé, il se réinstalla, sans bruit, sur sa chaise, laissant son poignet captif de cette main qu’il avait tant désiré. Tosca desserra son étreinte, et laissa ses doigts glisser jusqu’aux siens, les imbriquant, les mélangeant avec les siens. « Je suis vraiment désolée. » Répéta-t-elle alors qu’il entamait ses habituelles caresses de son pouce contre sa paume et qu’elle ne parvenait pas s’empêcher de penser à la façon dont sa main s’imbriquait à la perfection de celle de Thybalt alors qu’elle semblait si grossière et hors propos dans celle de Matteo. Pourquoi fallait-il que tout soit si compliqué ?
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Des coups donnés à la porte, comme d’habitude. Le chien grattant et aboyant pour sortir de la chambre, comme d’habitude. Et le sentiment diffus de devoir se lever, de devoir à tout prix se lever. Pourtant il était tôt, comme à chaque fois. Et comme à chaque fois, en tirant son visage de l’oreiller et en ouvrant un œil au prix d’un effort surhumain, elle constata qu’il est encore trop tôt pour que le soleil n’ait décidé de se montrer. Elle était seule dans le lit, mais cette fois, cela semblait logique. Elle avait souvenir d’un Chico se voulant discret en se faufilant hors de la maison par une heure tardive, la veille au soir, et d’un Pâris annonçant de ne surtout pas l’attendre pour se coucher. Donc, ce matin là, comme à chaque fois, le lit était vide de toute présence, hormis celle du chien, qui avait déjà bondit hors des draps pour entamer sa danse dite « danse du pissou » sur le seuil de la porte. Comme d’habitude elle chercha à atténuer le vacarme en se plaquant l’oreiller au dessus de la tête, et comme d’habitude cela n’eut pour effet que de l’agacer davantage. Alors, comme d’habitude, elle s’extirpa de la couette en poussant un grognement de bête sauvage. Comme à chaque fois elle pensa à enfiler un des pulls qui trainaient sur le sol, mais se ravisait en se disant qu’elle n’aurait même pas la force de lever les bras pour l’enfiler. Alors elle traina les pieds jusqu’à la porte, et manquait se casser la figure lorsque le chien décida de glisser entre ses jambes pour être le premier à sortir. C’est con un chien, parce que même s’il est le premier arrivé à la porte d’entrée, il devra quand même attendre qu’elle lui ouvre la porte. Si elle avait été un chien, elle serait plutôt restée derrière son maître et lui aurait bouffé le cul afin qu’il descende plus vite. Voilà à quoi elle pensait en atteignant le haut de l’escalier alors que les coups à la porte n’avaient toujours pas cessé, et puis elle se souvint qu’elle avait déjà eu cette même pensée, comme d’habitude. Et comme à chaque fois, elle regrettait de ne pas avoir pensé à enfiler une paire de chaussettes avant d’entreprendre la descente de l’imposant escalier aux marches de marbre. Elle se demandait aussi pourquoi elle est la seule debout, pourquoi Benvolio n’avait pas encore mit le nez dehors et dévalé les escaliers armé d’une batte de baseball, pourquoi elle était la seule à tenter de vaincre les vapeurs d’un sommeil lourd en cette heure plus que matinale. Mais comme à chaque fois, elle constata qu’elle était absolument seule dans la demeure. Pas de Benvolio, Pâris n’avait pas du encore rentrer et quand à Chico… se pourrait-il que son « fils » soit devenu un homme ? Comme d’habitude elle jeta un œil à la grande horloge qui s’imposait dans l’entrée, et releva qu’il est à peine six heures du matin. Comme d’habitude elle offrit une superbe grimace au miroir de l’entrée, tout en poussant le chien du pied afin de pouvoir atteindre la porte. Comme d’habitude elle recula légèrement afin de s’aménager l’espace nécessaire pour tirer la lourde porte à elle, après avoir fait cliqueter une longue série d’antiques verrous. Comme d’habitude elle s’étonna d’y parvenir malgré sa force de haricot vert au sortir du lit. Et comme d’habitude, elle su, avant même de relever la tête, quelle silhouette elle s’apprêtait à contempler. Mais malgré tout, et comme d’habitude, la surprise s’afficha sur ses traits tandis que d’une main elle virait les cheveux qui s’étalant sur son visage, histoire de ne pas avoir trop l’air d’une grosse quiche. Comme d’ordinaire, il était là, debout, face à elle, affichant fatigue et détermination, là où elle n’affichait que fatigue et stupeur. Alors, dans un dessein totalement masochiste, elle entreprit de faire l’inventaire mental de sa propre petite personne. Les cheveux en total freestyle lui courant sur les épaules et les dos, quelques mèches récalcitrantes dans les yeux, des cernes profondes sous les yeux, un tee-shirt trop grand jeté sur son pauvre corps si peu féminin, son tee-shirt à lui, pour couronner le tout, les paupières gonflées d’avoir trop pleuré la veille, et… merde ! une épilation des sourcils laissant à désirer. De quoi pouvait-elle avoir l’air ? De rien, évidemment. Mais comme d’habitude il ne lui laissa pas le temps d’émettre le moindre son, et comme une chorégraphie longuement répétée, il enroula ses bras autour de sa taille à 4. A 5, il la plaquait contre le mur, et à 6 elle fermait les yeux tandis qu’il pressait ses lèvres contre les siennes. Normalement, c’est à ce moment-là qu’elle commençait à se débattre, tentant de se libérer à l’aide d’un genou vengeur venant s’écraser sur la partie la plus intime de l’anatomie masculine. Mais elle avait renoncé depuis longtemps à ce scénario, décidant que si son esprit était suffisamment masochiste pour lui imposer encore et encore ce fantasme stupide, alors qui était-elle pour prétendre à ne pas le suivre jusqu’au bout ? Alors elle se laissait faire et profitait. Et comme d’habitude, il ne lui fallut qu’une petite seconde pour commencer à sentir l’électricité se répandre en elle, faire se dresser chaque poil de ses avant-bras, faire se cambrer son corps, tandis que le reste de son être n’était plus réduit qu’à un seul et unique baiser, comme si chaque molécule composant la vie en elle se focalisait sur une seule et même action. C’était tellement réel et palpable, et furtif et volatile à la fois. Elle pouvait réellement sentir ses doigts s’emmêler aux siens après qu’il lui eut lâché les poignets, elle pouvait réellement sentir sa main glisser le long de sa cuisse, elle pouvait réellement sentir son souffle anarchique répondant au sien. Et pourtant, elle savait que comme à chaque fois, chaque sensation était éphémère, qu’il lui suffisait de compter jusqu’à dix pour que tout disparaisse comme par magie. Alors elle se mit à compter. 1… 2… 3… elle ne sentait plus la pression de ses doigts autour de siens. 4… 5… 6… son corps semblait s’être évaporé du sien. 7… 8… 9… ses lèvres venait de déserter les siennes. 10… il le fallait, il fallait qu’elle ouvre les yeux, qu’elle se réveille et qu’elle constate que tout ceci n’était qu’un énième rêve cauchemardesque. Alors en grimaçant, elle ouvrit les yeux sur… Non, attendez ! Qu’est-ce qu’elle foutait encore là ? Pourquoi n’était-elle pas dans son lit avec un Pâris ronflant à ses côtés ? Où était la nausée qui suivait, irrémédiablement ce constat ? Elle tourna la tête, jetant son regard perdu et troublé tout autour d’elle. C’était à n’y rien comprendre. Et alors qu’elle observait par la porte ouverte, le soleil qui ne s’était absolument pas levé alors qu’il aurait du, elle le sentit s’approcher à nouveau. Il était toujours là, évidemment. Enfin pas si évident que ça, puisqu’il n’aurait plus du être là, mais puisque rien n’avait changé, qu’elle n’avait pas encore été transporté vers la réalité, il était, quelque part, logique qu’il soit toujours là. Alors elle reporta son regard de blonde à qui on viendrait d’expliquer qu’un cerf-volant c’est pas vraiment un cerf qui vole, sur lui, et recula contre le mur, soudainement paniquée par sa présence presque trop palpable. Et si ce n’était pas un rêve ? Il lui glissa une enveloppe kraft entre les mains, mais elle n’y prêta même pas la moindre attention tant elle le fixait toujours, comme si elle le découvrait pour la première fois, tout en jetant, ponctuellement, des regards autour d’elle, vérifiant qu’elle se trouvait toujours en plein milieu de l’entrée. Et puis, il lui parla, et plus que ce qu’il lui disait c’était sa voix qui l’intéressait. Elle semblait tellement réelle. Etait-il possible qu’elle ait retenu jusqu’à la moindre intonation, jusqu’au moindre accent légèrement romain sur la fin de ses phrases ? Comment son esprit pouvait-il se montrer aussi pervers ?
« Je ne t’aime pas. » Lui répondit-elle presque machinalement, ses yeux oscillant toujours entre les différents angles de la pièce, cherchant un détail qui prouverait qu’il s’agissait bien d’un rêve. « Je ne t’aime pas, je veux divorcer, tout n’était que mensonge et mascarade, et… » Elle reposa son regard sur lui, les sourcils légèrement froncés. « … C’était quoi le reste ? » Prendre des gants ? Essayer de ne pas faire preuve d’insolence pour une fois ? Pourquoi faire ? Dans quelques secondes elle allait se réveiller, et c’est encore elle qui allait chialer en silence dans son oreiller, pendant que lui serait probablement tranquillement au pieu, se faisant porter le petit dej sur un plateau d’argent. Totalement injuste. Mais il lui restait quelques secondes, et puisque son rêve avait décidé de jouer les prolongations, autant en profiter pour partir totalement en vrille, non. Elle n’eut qu’à tendre la main pour se saisir de sa nuque et l’attirer à elle. Tant pis pour sa fierté, sa colère, son angoisse de l’abandon, son envie de lui faire avaler son sourire à la noix. De toute manière, il ne souriait pas, il semblait presque aussi paumé qu’elle, vis-à-vis de ce qu’elle était entrain de faire. Qu’est-ce qu’elle faisait au juste ? Pourquoi le faisait-elle surtout ? Pourquoi ses lèvres revenaient s’écraser sur les siennes avec la résignation d’une condamnée à mort ? Pourquoi l’attirait-elle encore plus contre elle, faisant fi de cette pression électrique frôlant l’insupportable ? Parce qu’en cet instant, elle se foutait d’à peu près tout le reste. Elle se sentait protégée dans les confins de son rêve, parce que rien de ce qu’elle ne ferait maintenant ne pourrait être retenu contre elle, ou bien entrainer des conséquences dans la réalité. Ce n’était qu’un rêve. « Ha oui ! Je ne ressens absolument plus rien pour toi. » Acheva-t-elle, dans un souffle, avant de fondre à nouveau sur sa proie, nouant ses bras autour de son cou, plaquant son ventre contre le sien, cherchant une proximité toujours plus improbable. « Viens. » Murmura-t-elle, tout en reculant, l’entrainant avec elle, vers l’escalier. Il eut la présence d’esprit de se laisser faire, et de faciliter le mouvement. « T’es sûre ? » Murmura-t-il à son tour en parvenant, par miracle, à se soustraire à ses lèvres avides des siennes. Elle ne répondit à sa question qu’en grimpant une nouvelle marche avec lui. La seule chose qui l’indisposait ? Sa canne. Elle voulait sentir ses deux mains sur elle, elle voulait qu’il cesse d’observer ses pieds à chaque pas. Alors, sans lâcher sa bouche, elle laissa une main glisser le long de son bras, contourner la sienne cramponnée au pommeau, et s’emparer du bois vernis. « T’as pas besoin de ça. » L’informa-t-elle en la jetant plus loin. N’en avait-il vraiment pas besoin ? C’est ce qu’elle allait voir. S’il voulait récupérer son bien, il devrait la lâcher et redescendre les quelques marches qu’ils venaient péniblement de grimper. Mais, bizarrement, il ne semblait pas plus emballé par cette idée qu’elle. Alors, il l’attrapa un peu plus fermement par la taille, et mu par sa volonté plus que par ses jambes, il reprit l’ascension avec elle. Les marches se souviendraient d’eux, les murs aussi. Ils auraient été certainement plus rapidement en montant normalement avant de parcourir le couloir de manière traditionnelle, mais c’était peut être un peu trop leur en demander. Elle le cognait dans presque tous les murs qu’ils croisaient, et il le lui rendait bien. Ils risquaient de se taper quelques hématomes et courbatures dans quelques heures, mais qu’importe puisque rien de tout ça n’était réel, pas vrai ? Elle avait le souffle court, les doigts fébriles, elle ne cessait de laminer sa peau de ses lèvres, laissant un sillon chaud sur son passage. Sa chemise n’était plus vraiment un obstacle, tant elle avait prit soin d’ôter bouton après bouton sans qu’il n’en ait vraiment conscience. Son propre tee-shirt n’avait plus vraiment d’utilité tant il le remontait, le froissait, à chaque fois que ses grandes mains venaient lui pétrir le dos, les hanches, les cuisses, les fesses. Est-ce qu’il avait conscience de ce qu’ils s’apprêtaient à faire ? de la route qu’ils étaient sur le point d’emprunter ? Elle, elle en avait un peu trop conscience, et un feu puissant lui ravageait le bas-ventre. Une de ses lèvres à lui coincée entre ses dents, elle chercha à tâtons la poignée de porte. Elle avait le dos plaqué sur cette dernière, le poids de l’homme contre son corps, lorsque la porte céda enfin, ils manquèrent tomber à la renverse. Elle se rattrapa in-extrémis, les deux mains de chaque côté du chambranle, bras tendus, et vint nouer ses jambes autour des hanches masculines. Ses doigts relâchèrent l’encadrement de porte, et rapidement se retrouva propulsée sur le lit. Etait-ce la cause de l’empressement de son partenaire de jeu, ou simplement de son équilibre précaire ? Peu importe, il n’eut aucun mal à refermer la porte d’un coup de pied fort à propos, avant de jeter des regards alentours, sur l’immensité de la chambre, comme s’il s’intéressait vraiment à la décoration d’intérieur , comme s’il avait une conscience propre, comme s’il souhaitait réellement découvrir son intérieur. Heu… c’était pas vraiment ce qu’elle avait espéré de son fantasme, et le rappela à l’ordre en lui mordant ce qu’elle avait à portée de bouche. Un avant-bras en l’occurrence. Bon, pas fort, hein, on n’était encore loin du cannibalisme, mais suffisamment pour récupérer son attention. Mais alors qu’il récupérait ses lèvres, et que ses mains entreprenaient de la défaire de son tee-shirt superflu, quelque chose se produisit. Un détail. Rien qu’un détail. Et pourtant, son œil captant la mince ligne lumineuse par-delà l’horizon qu’elle percevait par la porte-fenêtre, l’immobilisa. « Attends ! » Souffla-t-elle en le repoussant doucement, sans brusquerie. Elle fixa l’extérieur et sa luminosité croissante, puis elle nota d’autres détails qui n’auraient jamais du se trouver là. Le chien grattant à la porte, des coups de klaxon dans le lointain, un putain de piaf entamant sa sérénade juste sous la fenêtre. Toutes ces petites choses qui n’auraient jamais été présentes dans le décor sonore et visuel, s’il avait réellement s’agit d’un rêve. « C’est le matin ? » Demanda-t-elle brusquement, surprise en reportant son attention sur lui, qui ne l’avait pas quitté des yeux. « Ca change quelque chose ? » Une question légitime, qui ne devait pas avoir la même signification pour elle que pour lui. Est-ce que ça changeait réellement quelque chose ? Est-ce que brusquement elle n’avait plus envie de lui, est-ce qu’elle n’avait plus le cœur qui tambourinait comme un dingue, est-ce qu’elle allait se laisser submerger par sa rancœur, est-ce que celle-ci allait prendre le pas sur tout le reste ? Est-ce que le matin changeait quelque chose ? Est-ce qu’elle pouvait ignorer cette main dans sa nuque, ce pouce allant et venant doucement contre sa peau ? Est-ce qu’elle pouvait ne pas noter sa fébrilité, son air… intimidé ? Non, c’était au-delà de ça. Il avait la trouille. Et ça n’avait rien à voir avec un rejet éventuel, il avait peur d’autre chose. Pas une peur viscérale, quelque chose de plus ténu mais bel et bien là. Alors elle comprit. Tout lui revint en mémoire, et elle occulta le reste, les mois passés à ronger son frein, a entretenir sa colère, à le détester plus que de raison. Elle n’avait rien oublié de tout ça, elle n’oublierait probablement jamais, mais pour l’instant… pour l’instant ça n’avait plus la moindre importance. « Non. » Non, ça ne changeait rien. Ou alors, si, ça changeait tout, mais elle n’en avait plus rien à foutre, parce que sans le vouloir, il venait de lui apporter tout ce dont elle avait besoin, et un peu plus même. « Ca ne change absolument rien. » Ajouta-t-elle dans un sourire qui se voulait rassurant, alors que des ses mains nouées derrière sa nuque, elle le rappelait à elle d’un mouvement énergique.
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Des coups donnés à la porte, comme d’habitude. Le chien grattant et aboyant pour sortir de la chambre, comme d’habitude. Et le sentiment diffus de devoir se lever, de devoir à tout prix se lever. Pourtant il était tôt, comme à chaque fois. Elle avait le sentiment de ne pas avoir assez dormi, et d’être tirée de force d’un sommeil si doux et confortable. Et comme à chaque fois, en tirant son visage de l’oreiller et en ouvrant un œil au prix d’un effort surhumain, elle constata qu’il est encore trop tôt pour que le soleil n’ait décidé d’inonder la pièce. Comme d’habitude elle était seule dans le lit, et en étendant le bras pour en caresser le matelas, elle nota une fraîcheur prouvant que ça faisait un moment qu’il était en l’état. Alors, Comme d’habitude elle voulu atténuer le vacarme en se plaquant l’oreiller au dessus de la tête. Sauf quand cherchant à agripper l’oreiller sous sa tête, ses ongles se plantèrent dans tout autre chose, une chose qui lâcha un grognement de bête sauvage. Hey ! C’était censé sortir de sa bouche, ça ! Immobile, totalement statufiée, les yeux écarquillés et le cœur battant à tout rompre, elle tenta de retenir jusqu’à sa respiration pour se faire oublier du truc se trouvant dans son dos. Et lorsque les grognements cessèrent pour se transformer en une respiration plus lente et apaisée, elle osa un bref mouvement de rotation de globes oculaires le temps d’un bref repérage visuel. Et en baissant les yeux, tout ce qu’ils trouvèrent fut une main ! Une main humaine lui sortait de la tête, bordel de merde ! Un peu paniquée, quand même –c’est pas tous les jours qu’on trouve un bras dans son lit-, elle souleva légèrement la couette pour constater qu’elle avait également une jambe supplémentaire. Sans déconner ! Y avait un truc tout poilu qui dépassait d’entre les siennes ! Putain, des membres lui avaient poussé pendant la nuit ?! C’était bien sa veine, tiens ! Ouai, et on lui avait certainement ôté une partie du cerveau aussi, puisqu’elle mit plusieurs longues secondes de totale panique, avant d’avoir la présence d’esprit de se retourner pour vérifier que ces membres n’appartenaient pas, par le plus grand des hasards, à une tierce personne. Thybalt. En le voyant là, endormi, paisible, totalement imbriqué en elle au point qu’ils avaient tenu à deux sur SA partie de lit, sans empiéter d’un orteil sur celle de Pâris et Chico (à temps partiel), tout lui revint en mémoire avec la violence d’un coup de poing en plein cœur. C’était comme logique et déroutant, comme si elle avait toujours vu ce visage là à chacun de ses réveils, alors qu’elle savait, pourtant, que ce n’était pas ces traits-là qu’elle avait contemplé durant les huit précédentes années. Ce sentiment de familiarité et d’habitude ne collait pas, il était improbable, hors sujet, incompréhensible, et pourtant bien là. Et derrière ça, sou jacent, il y avait un sentiment d’urgence, comme si elle devait absolument en profiter avant qu’il ne soit trop tard. Trop tard pour quoi ? Elle reposa sa tête sur son bras, mais tournée vers lui, afin de ne plus rien manquer du spectacle qu’il offrait. Et comme s’il avait sentit son regard posé sur lui, il esquissa un sourire, à peine l’ébauche d’un, et pourtant suffisant pour qu’elle le remarque. « C’est le matin ? » Demanda-t-il de sa voix enrouée par le sommeil. « Est-ce que ça change quelque chose ? » Lui répondit-elle en s’interrogeant tout de même, sur l’heure qu’il pouvait être, puisqu’elle n’était définitivement plus dans son rêve, et qu’il ne pouvait pas être à peine six heures du matin. Alors elle remarqua les rideaux tirés, plongeant la chambre dans une pénombre caduque. Elle nota aussi que le chien ne se trouvait pas dans la chambre. Il avait cessé d’aboyer et de gratter aussi. Et les coups à la porte qui l’avaient tiré du sommeil, quand était-il ? Elle se concentra sur les bruits de la maison, et c’est là qu’elle comprit. Il ne s’agissait pas de coups frappés, ça n’avait jamais été le cas, c’était simplement un espèce d’égoïste peu soucieux du sommeil des autres, qui avait du être croisé pachyderme tant il était incapable de faire le moindre truc sans un maximum de bruit. Pâris. Ou plus exactement, Pâris luttant pour trouver la serrure, Pâris luttant pour ouvrir la porte, Pâris la refermant en la claquant comme un malade, Pâris jetant sac, manteau, femme et enfant, sur n’importe quel meuble de l’entrée, voir sur la carrelage himself, Pâris ratant une marche, Pâris ratant deux marches, Pâris se rattrapant en gueulant après le chien, Pâris appelant sa sœur en lui demandant si elle dormait ou pas. « Merde ! » Voilà ce qui s’échappa des lèvres de la brune, tandis que dans un même mouvement, elle poussait Thybalt hors du lit, et rabattait les couvertures sur elle. « Quoi ?! » Gémit l’homme au pied du lit, passablement surprit de se retrouver étalé par terre alors que la seconde d’avant il se trouvait confortablement installé dans un lit qu’il avait tant convoité. « Planque-toi ! » Le supplia-t-elle, tout en s’enroulant d’avantage dans les draps. Et alors qu’il semblait évaluer s’il était possible ou non de se planquer sous le lit, elle lui pointa la porte fenêtre du doigt. « Le balcon ! Vite ! » Déjà les bruits de pas se rapprochaient. Elle récupéra la couverture au sol, et la lui envoya tandis qu’il écartait les rideaux, et luttait avec la porte récalcitrante. Il venait à peine de refermer le rideau sur lui, camouflant une porte-fenêtre entrouverte qui aurait pu sembler suspecte en plein mois de février, lorsque la porte de la chambre s’ouvrit en fracas sur un Pâris qui n’avait visiblement pas fermé l’œil de la nuit. « T’es réveillée ? » « Comment ne pas l’être, Godzilla ? » « J’t’ai manqué ? » « C’est pas le mot. » « J’t’ai beaucoup manqué ? » « Je ne dirais pas ça non plus, non. » « Tu me files un bout de drap, steuplé ? » Il venait de rejoindre le lit après avoir prit soin de secouer chacun de ses pieds pour être certain que les deux chaussures voleraient, l’une après l’autre, à travers la pièce en faisant un maximum de bruit. Cet homme devait avoir peur du silence. Un silenciophobique. Et, à présent, tendait la main vers elle pour qu’elle partage le maigre bout de tissu qu’elle plaquait contre sa poitrine. « Non. J’suis à poil. » « Depuis quand tu dors à poil ? » Demanda-t-il en soulevant un sourcil. « J’avais chaud. » « Et la couverture, elle est où ? » « J’avais très chaud. » Silence. Regard en chien de faïence. Pâris semblait la sonder du regard, et elle ne cherchait qu’à dissimuler le sien en tentant de réfléchir à toute vitesse. « En fait, j’crois que je couve un truc. » Joignant le geste à la parole, elle toussa à plusieurs reprises dans son poing, puis passa une paume de son front à sa tempe, comme pour en effacer une suée inexistante. « Je dois avoir de la fièvre. J’ai mal au crâne, j’arrête pas d’éternuer et de tousser, les bronches et les sinus tout pris. Sans parler de mon bide, je te raconte pas, c’est l’enfer ! Tu voudrais pas venir me faire un câlin ? » L’effet fut immédiat. D’un bond, Pâris sauta hors du lit, installant une distance de sécurité entre sa sœur et lui, protégeant sa bouche et son nez d’une main afin de ne surtout pas respirer le même air qu’elle. « Tu sais quoi ? J’pense qu’il vaut mieux que tu puisses te reposer tranquillement. » Lui répondit-il en reculant vers la porte. « Je vais aller squatter le lit de Benny histoire de te laisser ton espace, et… » Et bah rien ! Il venait d’atteindre la porte, l’avait ouvert à la volée, et se trouvait déjà dans le couloir. « Salut ! » Conclu-t-il avant de claquer la porte derrière lui, et de laisser sa sœur tout sourire dans une chambre vide. Enfin, presque vide. « Roméo ? » Chuchota-t-elle en se tournant vers le rideau tiré. Pourvu qu’il n’ait pas sauté. Il était quand même haut ce foutu balcon.
Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
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Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Lun 14 Mar - 13:23
« I'm sorry that I hurt you It's something I must live with everyday And all the pain I put you through I wish that I could take it all away »
Elle reposait paisiblement entre ses bras, le souffle léger de la jeune femme caressait son torse régulièrement. Elle s’était endormie au bout de longues heures de passion. Il souriait, la regardant dormir alors que lui-même était épuisé. Il luttait contre le sommeil conscient que la discrétion était de mise, et qu’il allait devoir se lever pour récupérer tout ce qu’ils avaient semé sur leur passage. Un sourire amusé joua sur ses lèvres alors qu’il se rappelait les heures qui avaient suffi à effacer le doute, la peur qui lui nouait l’estomac durant le trajet. Il caressa doucement la joue de la jeune femme, chassant les cheveux qui lui mangeaient une partie du visage, elle soupira et nicha sa joue contre sa paume sans se réveiller. Il sourit, déposa ses lèvres sur son front. Ils ne faisaient qu’un, étroitement serré l’un contre l’autre, un fil à couper le beurre n’aurait pu passer entre eux. Il n’avait pas envie de se lever, de la quitter, pourtant il le devait. Ses lèvres quittèrent son front pour se poser sur sa bouche. Elle soupira, ses paupières papillonnèrent.
« Dors » lui souffla-t-il doucement en caressant son oreille de son souffle. Elle hocha doucement la tête sans se réveiller et enfouit son visage contre le matelas. Délicatement, il démêla leurs jambes, détacha les mains de la jeune femme de sa peau, il glissa sans faire frissonner le matelas hors du lit. « Je t’aime. » Confia t-il à la douce lumière du jour en caressant son front de ses lèvres une dernière fois. Il enfila son boxer mais ne retrouva pas sa chemise, surement dans le couloir comme le tee-shirt de sa belle. Il boitilla jusqu’à la fenêtre, prenant garde à ne pas faire grincer l’antique plancher de chêne. Alors qu’il contemplait la vue quelques secondes avant de tirer les rideaux, une étrange sensation de déjà-vu le frappa, comme s’il s’était déjà tenu ici, dans cette chambre, devant cette fenêtre. Mais la vue ne correspondait plus. Des maisons s’étaient rajoutées dans le paysage et les gens qui déambulaient dans les rues malgré le froid n’étaient pas les mêmes qu’autrefois. Il chassa ses étranges pensées. Il ferma les rideaux, masquant la lumière du jour qui jouait déjà sur le visage de Tosca, préservant le sommeil de celle qu’il aimait. Il sortit de la chambre sur la pointe des pieds, dans le couloir il trouva les vestiges de ce qui était sa chemise, mais aussi une culotte sur le seuil de la porte. Il ramassa ses vêtements, boitillant silencieusement le long du couloir. Des souvenirs lui revenaient par brides de cette escapade folle qu’ils avaient menée dans ce couloir. Chaque mur heurté, chaque souffle. Son sourire s’accentua alors qu’il s’appuyait sur la rampe pour descendre l’escalier de marbre où il récupéra sa veste de costume, son ceinturon, ses boutons de manchette. Il se rhabillait au fur et à mesure, afin d’avoir les mains libres. Grand bien lui en prit. En débouchant dans le hall alors qu’il s’appropriait sa canne et les papiers du divorce abandonné sur le sol, un jeune éphèbe à moitié nu, vêtu seulement d’un caleçon émergea de la cuisine, un bol de café greffé à la bouche.
« B’jour » Articula t-il non sans mal. Thybalt se demanda un instant comme justifier sa présence ici, et bénit le ciel d’avoir eu l’idée de s’habiller. Soudainement, l’inspiration lui vint. « Je suis l’agent immobilier. » Se présenta-t-il avec un sourire. Dieu merci l’adolescent, car il devait avoir à peine l’âge de se raser non, n’avait pas les yeux assez en face des trous pour faire le point sur le visage de Thybalt. Un visage qui, s’il avait regardé un peu plus les journaux que Tosca, ne manquerait pas de lui rappeler quelque chose. « Ok » marmonna le jeune homme. « ‘Sca… en haut… » Balbutia t-il en se dirigeant vers le salon, avec la ferme attention de se recoucher. Thybalt fronça les sourcils. Quel intérêt de boire du café si c’était pour se rendormir après. Le sourire de Thybalt se fit malicieux alors qu’il le regardait sombrer instantanément dans le sommeil. Levant les yeux au ciel, il fit jouer sa canne dans le creux de sa main, avant de la placer sur son épaule. C’est d’un pas guilleret qu’il remonta les escaliers. Il reperdit rapidement ses vêtements pour revenir se lover contre elle, se collant en petite cuillère contre son dos. « Où tu étais ? » Murmura t-elle totalement endormie mais assez consciente pour constater son retour. « Au pays des Merveilles Alice, rendors-toi… »
(…)
L’opposition allait trouver cela hilarant. C’était la seule pensée qui traversa l’esprit de Thybalt alors qu’il se retrouvait à moitié nu, une couette enroulée autour des reins comme seul vêtement, frissonnant en plein hiver sur le célèbre balcon de la Casa di Giulietta. L’opposition allait trouver ça hilarant. Le grand Thybalt Andreotti fervent défenseur des valeurs familiales à poils sur le balcon de Juliette, après avoir passé la nuit avec sa femme, qui était fiancé à un autre. Les yeux levés vers le radieux soleil qui illuminait la fin de matinée il pria pour que pour une fois aucun touriste chinois muni d’un Nikon flambant neuf à zoom ultra perfectionné ne se trouve dans la cour. Pourtant, malgré le risque, cela en valait la peine… Si Tosca arrivait à se débarrasser de son frère. Il écoutait la conversation entre les deux jeunes gens, un sourire amusé jouant au coin des lèvres, malgré le froid. Ce serait lui qui bientôt aurait de la fièvre, mal à la tête, qui éternuerait et tousserais à qui mieux mieux et tout le tintouin que simulait Tosca pour rebuté son frère et l’envoyer loin de ses draps. Il n’avait jamais pensé se retrouver un jour sur ce balcon et tandis que la dispute se jouait à l’intérieur il profitait de la vue, en retenant le rire nerveux qui ne manquait pas de grossir dans sa poitrine. Il trouvait la situation comique au plus haut point. Comme un Roméo des temps modeste il attendait que Pâris, son beau frère et non pas son rival, quitte la chambre et libère la place qui allait être à présent la sienne dans le lit d’une Tosca bien plus fougueuse et expérimentée que la vierge effarouchée qu’était Juliette dans la pièce, d’après Thybalt. À vrai dire, quand on y songeait c’était lui Juliette. Le sourire qui jouait sur ses lèvres s’accentua. Il venait de se voir avec claireté vêtu d’une robe sur ce balcon en train de soupirer après Tosca. Alors que Paris devenait inquisiteur sur la nudité de sa sœur, Thybalt lutta contre sa crise de rire, sachant que le moindre pouffement pourrait lui être fatal. De là où il se trouvait il avait une vue plongeante sur la grille et la cour, la matinée tirait sur sa fin, et par miracle aucun touriste ne flânait dans les rues pour l’instant. Alors qu’il se disait que le ciel était de son côté pour une fois, Pâris continuait de se la jouer réincarnation de David Caruso. Pas croyable comme on ne pouvait jamais être seul dans cette maison. Dieu merci le second colocataire de Tosca avait le sommeil lourd… Le sourire de Thybalt s’accentua. Vingt-cinq ans avant de rencontrer cette femme. Et quelle femme. Il avait rêvé d’elle durant des années, il l’avait attendu… Et il avait enfin compris qu’il y avait une bonne raison à cela. Il avait eu l’espace d’un instant effleuré le paradis… L’amour complet et véritable. La communion du corps et de l’esprit. Cette nuit… Enfin cette matinée avait été magique. Passé un moment de flottement durant lequel il avait hésité, les gestes étaient venus d’eux-mêmes. Il sourit, rêveur, en repensant à ce moment où il lui avait semblé avoir enfin trouvé des réponses à ses questions. Il savait pourquoi il avait été placé sur cette terre, pour cette femme. Tout en eux s’emboitait parfaitement, elle était aussi petite que lui était grand, son corps couvrait le sien, le creux de sa clavicule semblait avoir été moulé pour qu’elle y enfouisse son visage ensommeillé, leurs soupirs se répondaient, tout comme leur désir. Ce n’était pourtant pas qu’une question de sexe, cela allait plus loin. Sa main semblait avoir été conçue pour abriter la sienne, son rire faisait écho au sien. Ensemble ils étaient unis, bien plus que tout ce qu’ils avaient connus l’un et l’autre. Ils se comprenaient, pourtant leur histoire ne s’était pas faite sans heurts. Pourtant, c’était ici qu’il voulait vivre, ici qu’il voulait faire sa vie. Il savait que les épreuves n’étaient pas finies. Que Tosca l’ait chassée de sa chambre et la bague de fiançailles autour de son doigt le lui rappelait. Pourtant il était en paix avec lui-même. Il savait que les choses s’arrangeraient, bien entendu il acceptait la chose là maintenant, car il était seul face à cette supposition, mais il savait qu’il accepterait la chose bien moins facilement lorsqu’elle lui présenterait la chose. Il souriait toujours, béat et de plus en plus amusé par la situation. Il était euphorique. Elle n’avait rien pardonné. Il avait commis une erreur, pourtant il avait l’impression que cette épreuve était derrière eux désormais. Ça n’avait pas d’importance plus maintenant. Il trépignait sur ce balcon mythique, pressé de retrouver cette femme dont il ne se lasserait jamais de la découverte. Il l’aimait. Rien n’aurait pu ternir le bonheur de se savoir aimé en retour. Ou presque… Car le destin semblait vouloir tester la capacité de Thybalt à accepter la vie comme elle venait. Et bien entendu … il avait fallu que comme épreuve le Tout-Puissant lui envoie un groupe de touristes allemand. C’était décidé, pour Thybalt la plus grande plaie de l’humanité était décidément les Allemands bedonnant en short, chaussette haute et sandales. Et les Allemandes tout aussi fringantes. À croire que ce peuple ne connaissait pas le froid… ou bien était-il comme les Saint Bernard, stockant un petit tonneau de bière qu’ils buvaient à longueur d’année pour pouvoir se promener 365 jours par an dans cette tenue ridicule. Et bien entendu comme tout touriste qui se respectait, ils étaient munis d’un appareil photo flambant neuf, bien trop perfectionné pour eux. Ciel. C’était le cas de le dire, sacré destin. Thybalt se plaqua contre la paroi de l’antique demeure, en priant pour que les Allemands ne lèvent pas les yeux vers lui. Bien entendu, autant demander à un aveugle de ne pas se servir de sa canne. Logiquement lorsque l’on se rendait dans la Casa di Giulietta, s’était pour voir son célèbre balcon, peloter les seins de la statue de ladite jeune fille, et glisser un de ses petits mots dans les antiques joints dessoudés de l’antique mur, au grand damne de Tosca. Et ce dans cet ordre. Alors bien sur lorsqu’il vit leurs têtes, greffés à leurs appareils photo se lever vers lui Thybalt sentit son esprit se mettre en branle alors qu’il était en train de calculer si il serait autre chose qu’une silhouette floue sur les photos. Ce fut Tosca qui lui inspira sa brillante diversion.
« Roméo ? » Chuchota t-elle. Alors que le regard de merlan frit des Allemands se figeait sur lui, l’inspiration fut brusque. Se drapant avec autant de dignité possible dans la couverture d’un violet soutenu, il se pencha au balcon et déclama d’une voix profonde. « Ô Juliette, Juliette, pourquoi es-tu Juliette ! Renie ton père et refuse ton nom, ou si tu ne veux pas, fais moi simplement veux d’amour et je cesserai d’être un Montaigu. C’est ce nom seul qui est mon ennemi. Tu es toi, tu n’es pas une Capulet. Oh sois quelque autre nom. Qu'est-ce qu’une Capulet ? Ni la main, ni le pied, ni le bras, ni la face, ni rien d’autre en ton corps et ton être de femme. Qu’y a-t-il dans un nom ? Ce que l’on appelle une rose, avec tout autre nom serait aussi suave, et Juliette, dit autrement que Juliette, conserverait cette perfection qui m’est chère malgré la perte de ces syllabes. Juliette, défais-toi de ton nom, qui n’est rien de ton être, et en échange, oh prends-moi tout entier ! » La main sur le cœur, il s’inclina telle une âme en peine alors que les applaudissements éclataient en bas. Il se redressa souriant. Et lança dans un allemand parfais. « Merci ! Merci. La représentation finale de notre nouveau Roméo et Juliette inversée aura lieu l’été prochain ! » Garder son sérieux et sa dignité en toute circonstance lui avait toujours dit son grand-père, pour le coup cet enseignement lui avait valu de se tirer magistralement de cette situation. Pas de photo prise, il avait subjugué le public, sous les applaudissements nourris il quitta le balcon, se glissant dans la chambre, la couverture serrée autour de ses reins. Il se demanda brusquement comment il avait pu déclamer de tête des mots qu’il avait dû lire une seule fois, mais ne s’attarda pas sur cette pensée. Soudainement quelque part dans la maison, une fenêtre s’ouvrit à la volée, et la voix suave et mélodieuse de Pâris se déversa dans la cour tandis que Thybalt refermait les battants de la fenêtre.
« Ce n’est pas bientôt fini oui ! Fichez le camp de chez moi ! Vous n’avez aucun respect pour le sommeil des autres, bande de mangeurs de choucroute ! » C’est hilare que Thybalt se tourna vers Tosca adossée à sa taie d'oreiller, la poitrine découverte tandis qu’elle riait silencieusement, des larmes roulant sur ses joues. « Tu vas me payer ça… » Lui souffla-t-il amusé lui aussi. Il se dirigea vers la porte, attrapant au passage une chaise dont il plaça le haut du dossier sous la poignée de la porte, afin de s’assurer que personne ne ferait irruption immédiatement dans la pièce. « A nous deux Juliette… » Plaisanta t-il en se réinstallant au dessus d’elle, s’emparant de sa bouche. « Je crois que ce n’est pas encore le matin. »
(…)
Sa main glissait paresseusement le long de son dos, profitant de la douce chaleur que son contact faisait naitre en lui. « Umh » Soupira t-elle en se lovant contre cette main aventureuse. Il sourit et continua de remonter ses doigts le long de sa colonne vertébrale en une délicieuse caresse. Il l’embrassa dans le cou tendrement taquinant sa peau de la pointe de sa langue. « Umh » répondit-elle faisant s’accentuer le sourire qui jouait aux coins des lèvres de son compagnon. « Tu n’as qu’un mot de vocabulaire pour une fois… Voilà qui est étonnant. » Elle rit, mais ne bougea pas, le laissant continuer ses caresses. « Tu n’étais pas censé rester concentré ? » Répondit-elle en ôtant de son visage quelques mèches de cheveux. « Ne bouge pas. » Répliqua t-il en tapant doucement sur sa main. « C’est toi qui me déconcentres…. Je prenais simplement en compte les volumes, les courbes… » Elle eut un sourire malicieux et promena sa propre main le long de son propre cou, tentatrice. « Je te déconcentre vraiment ? » Il lui lança un regard sombre, non pas de colère, mais de désir. « Tu joues un jeu dangereux Dal Cappello, je tiens ta silhouette entre mes mains… » « Vraiment ? Parce que je ne les sens pas tes mains… » Elle joua avec la chaine qui reposait entre ses seins, cette chaine à laquelle pendait son alliance. Elle leva un sourcil amusé alors que le jeu de crayon de son amant s’immobilisait sur le papier. « J’ai l’impression d’être ce pauvre Jack dans Titanic. » Soupira t-il en recommençant à dessiner. « Le collier où est-il ? » Replongé dans son travail il ne releva pas les yeux pour demander. « Quel collier ? » « Le cœur de l’Océan. » Répondit-elle. « Je savais que tu avais vu un film à l’eau de rose dans ta vie… » Commenta t-il en souriant. « Quand est-ce que je pourrais voir le résultat ? » Elle s’impatientait pourtant il ne se tenait pas loin d’elle, à une demi-main de son corps tout au plus. « Arrête de gigoter Tosca… » Sa main libre glissa entre ses seins pour s’emparer de l’alliance et avec un sourire tendre il déclara. « Tu sais, c’est censé se porter à l’annulaire… » Elle ouvrit la bouche pour protester. « Je sais, je sais… Pour vivre heureux vivons cachez. Ça me va si c’est ce que tu veux. Je disais juste qu’une alliance se porte normalement au doigt… Quoique sur toi, une bague se nichant là où elle se trouve actuellement a quelque chose… d’érotique. » Il laissa sa main s’attarder quelques instants sur sa peau puis la retira. « Maintenant tiens toi tranquille petite aguicheuse ! Tu vas me faire rater ma lumière.»
(…)
« Je n’arrive pas à croire que ton ventre puisse faire un bruit pareil » se moqua-t-il en posant son oreille près du nombril de sa compagne, son petit sourire goguenard avait le don de taper sur le système de Tosca qui lui assena un coup d’oreiller sur la tête, accentuant son sourire. « Il faut faire quelque chose, ce n’est pas humain un bruit pareil ! Tu glougloutes comme une vieille machine a expresso. » Un deuxième coup sur la tête ne parvint pas à le faire cesser de sourire. « Il y a urgence. Quel homme je serais si je ne t’offrais pas le petit déjeuner après une matinée pareil… » Il la tira par la main, la forçant à quitter le confort douillet du lit qu’ils avaient méticuleusement défait depuis de longues heures, alternant veille et soif de l’autre. « Tu es fou ? » Lui demanda-t-elle alors qu’il lui jetait sa chemise à lui et sa petite culotte, il enfila simplement son caleçon et son tee-shirt celui avec lequel elle avait dormi pendant leur séparation. Il avait posé la main sur la poignée de porte. « J’ai toujours rêvé de jouer aux cambrioleurs, j’ai un certain talent pour la discrétion. » Elle éclata de rire puis sa mine s’assombrit. « Thybalt si… » Il la fit taire en posant un doigt léger sur sa bouche. « Arrête de te faire du souci pour rien. Pâris ronfle tellement fort que je l’entends d’ici, quant à ton gigolo adolescent il dort comme une pierre dans le canapé du salon. Personne ne va nous surprendre…. Aller… Un peu d’aventure sans risque ma belle. C’est une bonne action qui me motive, je ne peux pas te laisser mourir de faim dans cette chambre. J’y resterais bien à vie. J’adore ta chambre, le côté réminiscence d’une tragédie italienne et cet aspect panic room séquestré dans ta maison… Mais ton bien-être passe avant tout. » « Dit surtout que tu as faim. » « Pas faux. » Elle lui tendit la main. « Très bien, suis-moi. »
(…)
« Chut ! » Souffla la jeune femme alors qu’il descendait délicatement l’impressionnant escalier donnant dans l’entrée. « Je crois que j’ai entendu un bruit. » murmura-t-elle en posant la main à plat sur son torse pour l’arrêter. Il sourit et en profita pour taquiner sa nuque de ses lèvres. « Thybalt ! » Le gronda-t-elle à voix basse. « J’ai entendu quelque chose te dis-je ! » Pour lui faire plaisir Thybalt dressa l’oreille, mais ne parvient à lui que le son de deux ronflements différents. « Ça devait venir de dehors. » Répondit-il à son tour en chuchotant. « J’ai faim. » Se plaignit-il pour lui rappeler le but de cette mission commando. Elle sourit et la main qui se nicha contre la sienne suffit à l’apaiser. « Suis-moi. » Silencieusement, ils reprirent leur descente vers la cuisine. Ce fut Thybalt qui stoppa la marche arrivée au rez-de-chaussée. « Tu as entendu ? » Chuchota t-il « Très drôle » Souffla t-elle en voulant reprendre la marche. Il posa la main sur son épaule. « Je t’assure que j’ai entendu un bruit… Je crois que ça vient de la cuisine. » Il la fit passer derrière lui sans même y penser et précautionneusement s’approcha de la cuisine. Sur le coup Tosca se demanda comment il pouvait savoir où se trouvait la cuisine avant de se rappeler qu’il avait cuisiné pour elle un matin de février presque un an plus tôt. Elle voulut protester et reprendre la tête de l’expédition, mais la manière dont Thybalt se déplaçait ne laissait pas la place à la discussion, l’oreille aux aguets il essayait de définir la nature de la « menace ». « Attends-moi là. » Souffla t-il avant d’entrer dans la cuisine. « Ohhoh mon petit vieux, tu vas te faire une ennemie… » L’entendit-elle murmurer, elle glissa un coup d’œil dans la cuisine et se figea, atterrée. Thybalt avait saisi Puck par la peau du cou et le tenait loin de lui alors que le chien tentait de léché la figure de son maitre de joie de le voir de retour, mais au vu de l’état de l’animal Tosca comprit pourquoi son amant tenait la boule de poils loin de lui. Affamé, tout comme ses maitres, le chien s’était attaqué aux réserves qui se trouvaient dans les placards du bas, à sa portée. Barbouillé de sauce tomate et de miettes de pain il avait piètre figure, mais frétillait de bonheur de se trouver entre les mains de son maitre. « Je crois que notre brunch vient d’être repoussé. Cette bestiole a besoin d’un bain. » Il souriait, il était heureux.
Tosca J. Dal Cappello
FORBIDDEN FRUIT — Cause the morning always come to kill the dream —
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Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Lun 21 Mar - 5:59
Ne pas s’emporter, ne surtout pas précipiter les choses. Elle avait toujours eu horreur de ça. Elle y avait été contrainte parfois, quand l’urgence de la situation ne lui avait pas permis de faire autrement, mais à choisir, elle préférait toujours prendre son temps, ne pas bâcler ça sous le fallacieux prétexte d’une envie pressante. Et aujourd’hui plus que n’importe quel autre. Elle était tiraillée entre son envie d’aller plus vite encore, muée par son besoin de découverte, et son autre besoin, moins avouable, d’agir avant d’avoir l’occasion de réfléchir, et son envie de profiter au maximum de quelque chose qu’elle désirait depuis trop longtemps et se refusait depuis toujours. Risquait-elle de revenir en arrière, de stopper la machinerie si ses lèvres, ses mains, sa peau lui offraient quelques secondes de répit nécessaire à une réflexion plus pousser que « moi vouloir toi » ? Le fait qu’elle soit actuellement entrain d’y songer prouvait que non. Non, elle était bien décidée à aller jusqu’au bout cette fois, et pas seulement parce qu’un besoin impérieux, indépendant et totalement irrationnel les y obligeait. Elle savait qu’elle était capable d’arrêter à tout moment. Elle n’en avait pas l’envie, mais elle s’en sentait capable. Pour se prouver cet état de fait, elle le repoussa d’elle, les deux mains à plat contre son torse, le projetant vers l’arrière sans réel ménagement. Elle surprit son regard décontenancé, ses mains et ses lèvres rendues inutiles ne sachant trop quoi faire, mais elle détourna le regard, les yeux dans le vide, comptant mentalement jusqu’à dix. Et puis, elle revint vers lui, l’attrapant par la nuque pour reprendre exactement là où ils en étaient resté, et une petite minute plus tard, elle l’éjecta de nouveau, et compta mentalement jusqu’à vingt, cette fois. Oui, elle était totalement capable de s’arrêter. Elle n’avait plus besoin d’attendre de compter sur une intervention extérieure pour les tirer de cette prison charnelle de débauche. Elle était maîtresse de cette débauche, et son envie était donc totalement sienne, à cent pourcent. Cool. Alors elle lui offrit un sourire rayonnant. Un sourire qu’il ne comprit pas puisqu’il venait de gentiment mais sûrement quand même, se faire éjecter pour la deuxième fois, qu’à chaque fois elle ne lui fournissait aucune explication, et se contentait de beuguer sur un mur d’un blanc douteux, les sourcils froncés et l’air concentré. Il devait surement se demander si cela faisait partie des préliminaires, ou un truc dans le genre, mais n’ayant jamais entendu parler d’un espèce d’ « 1…2…3…soleil ! » sexuel, il était en droit d’en douter. Mais pourquoi pas ? Dans un haussement d’épaule à peine perceptible, il revint à la charge, et de ses mains, qu’elle sentit trembloter contre sa peau, tenta de soulever le tee-shirt sur lequel il s’acharnait avant et après chaque bug de la brunette. Alors, elle comprit que prendre son temps n’était pas une option. Il en avait besoin lui aussi. Elle ne voulait pas que sa première fois se résume au même souvenir que le sien, à savoir un coup rapide et raté. Dans une chambre d’hôtel, certes, mais d’un hôtel Cipriani, donc clandestinement entre deux passages de l’équipe de ménage. Naze. Evidemment, ce n’était pas comparable, puisqu’elle n’avait que 17 ans à l’époque, Matteo était à peine plus âgé, et ils n’avaient pas la maturité qu’on peut acquérir avec le temps. Thybalt avait 24 ans, il n’avait peut être aucune expérience réelle avec les femmes, et une appréhension toute naturelle, il avait quand même un certain vécu et une éducation, il n’était plus un enfant trop pressé découvrant pour la première fois qu’un corps féminin est quand même infiniment plus complexe que celui de Barbie, sur lequel il entrainait son Ken. Alors elle stoppa la progression de cette main hésitante sur sa peau. Elle lisait dans son regard l’appréhension, le désir, la douleur aussi, et ce besoin stupide d’être à la hauteur, de ne surtout pas la décevoir, comme si son avenir tenait plus au fait qu’il se surpasse et la satisfasse, plutôt qu’au fait d’être simplement là, avec elle, dans cette chambre, et qu’elle se laisse faire sans émettre la moindre protestation, pire qu’elle cherche elle-même à repousser les limites jusqu’à présent fixées. Elle récupéra cette main, et en baisa chaque phalange, avant de la lui rendre, la ramenant dans son espace personnel, afin qu’ils ne se confondent plus, chacun dans sa bulle personnelle. D’un geste assuré, elle ôta son tee-shirt, le jetant plus loin, là où les fringues atterrissaient toujours en général, comme pousser par la gravité vers un amas improbable de vêtements en tout genres en attente d’être re-portés ou lavés –en fonction de l’odeur qu’il dégageaient, et selon un barème inventé par Chico et sa classification de degré de portabilité olfactive, scientifiquement (ou pas) prouvé-. A genoux, les mains sur les cuisses, elle s’offrait à lui dans toute son innocente nudité, sans provocation ni audace, juste naturellement. Et c’était suffisant à en croire la main fébrile qui s’avança à nouveau, en direction de sa taille fine, alors qu’à en croire l’axe de son regard, c’était une toute autre zone qu’il aurait préféré toucher s’il avait été un peu moins respectueux. Mais cette main n’eut même pas l’occasion de caresser un peu de peau, à part celle de la paume qui s’abattit sur ses doigts propulsée à Mac 3. Elle venait de réprimander sa vaine tentative de caresse, et le contemplait, néanmoins, avec désir.
« Dessine-moi, encore… » Chuchota-t-elle dans un souffle chaud, alors qu’il l’observait avec surprise, s’apprêtant certainement à lui rétorqué qu’il avait un peu oublié de ramener son matériel dans sa précipitation à lui prouver qu’il n’aimait qu’elle. Mais elle interrompit toute tentative de réplique. « Sur moi. » Ajouta-t-elle. « Dessine-moi sur moi. » Elle se recula légèrement, toujours à genoux sur le matelas, face à lui, mais lui offrant un champ de vision plus large sur son corps. « Arrête-moi si je me trompe, il faut d’abord étudier la toile, n’est-ce pas ? » Sa voix n’était plus qu’un murmure si fin qui aurait pu lui échapper s’il n’était pas entièrement concentré sur la fréquence de son timbre chaud, velouté, presque aguichant. Il se contenta d’un hochement de tête, luttant péniblement pour se focaliser sur ses yeux, et non sur le reste de son corps. « Alors observe-la, ne manque aucun détail, mémorise-la, approche-toi si nécessaire, mais ne la touche pas, ne la touche surtout pas avant de savoir exactement ce que tu vas en faire. Regarde-moi, Thybalt, regarde-moi dans mon entièreté. » Elle ne bougeait pas, se contentant de le laisser aller à son rythme, abattre les limites de sa timidité et de ses excessives bonnes manières, une à une. D’abord il peina pour s’autoriser à regarder autre chose que ses prunelles d’émeraude, puis, par mouvements brusques et rapides, il s’autorisa à lorgner ses courbes, mais jamais plus de quelques secondes avant de revenir à ses yeux, comme pour s’assurer qu’elle n’était pas froissée par ce manque de respect. Voyant qu’elle ne s’en fâchait pas, il s’attarda un peu plus longtemps, risquant son regard plus bas aussi, mais revenant toujours à ses yeux. « C’est comme ça que tu étudies une toile ? » Finit-elle par lui demander. « Moi qui te prenais pour un véritable artiste. » La provocation eut l’effet escompté, la mine sévère, il s’approcha d’elle, glissant dangereusement en périphérie de son espace vital. « Une toile, ça ne parle pas. » Rétorqua-t-il alors qu’elle sentait son regard s’attarder sur le galbe d’un sein. « Détrompe-toi, une toile à souvent beaucoup de choses à raconter, au contraire. » Elle ne subissait que l’assaut de ses yeux, et pourtant son souffle était déjà lourd dans sa poitrine, et ses mains moites sur ses cuisses. Il semblait prendre un malin plaisir à l’étudier de très près, comme pour la punir d’avoir osé se moquer de son excès de pudeur. Il ne faisait que la respecter et elle râlait de ne pas être considérée comme un simple objet, une toile vierge qui plus est, alors qu’elle était pleine de courbes, d’angles, d’ombre et de lumière. La dessiner était chose impossible quand on avait l’originale en face de soi et qu’on prenait conscience qu’aucun coup de crayon, même le plus flatteur qui soit, ne saurait rendre justice à sa beauté atypique et insolente. Mais il comprenait qu’elle ne cherchait qu’à le mettre en confiance, à lui offrir tout ce qu’elle était afin qu’il ne rate pas l’essentiel, lorsque l’essentiel surviendrait. Il aurait pu continuer longtemps comme ça, promenant son regard sur sa peau, même si le pantalon qu’il portait toujours, avait tendance à s’éveiller de lui-même. Alors c’est elle qui mit fin à la torture qu’elle s’imposait. « Bon ! Il est temps de voir comment réagit cette toile ! » Annonça-t-elle alors qu’elle ne discernait plus que le sommet de son crâne, juste au-dessus de son nombril. Il releva un regard victorieux dans sa direction, et elle eut comme l’envie de lui faire bouffer ses dents, envie qui fut vite supplantée par celle, plus dévastatrice, de son corps dans le sien. Il haussa un sourcil, visiblement dans l’attente de la suite de l’énoncé, et elle reprit : « Ses réactions aux altérations du temps, le soleil, l’air, le vent… » Le vent… Telle une brise légère, son souffle chaud vint chahuter son épiderme tout aussi chaud, provoquant frissons et chair de poule. « Elle réagit bien. » Hésita-t-il, laissant entrevoir, pendant une fraction de seconde, l’état de fébrilité dans lequel il se trouvait, lui aussi. Il s’attarda sur ses deux petits seins, s’intéressant, visiblement, très attentivement, à l’érection que son simple souffle provoquait en leur sommet. Et dès qu’il s’arrêtait, la température ambiante, presque glaciale comparée à son souffle, semblait les faire durcir davantage. Il souffla une nouvelle fois dessus, et elle laissa échapper un gémissement de plaisir teinté de frustration. Le regard qu’il lui lança alors, était celui, presque courroucé, de quelqu’un qu’on vient de déranger en plein travail d’analyse. Puis ce dernier se transforma, passant de l’agacement à la surprise. Il découvrait ses réactions, il découvrait ce qu’un simple souffle pouvait provoquer. Alors il recommença, s’extasiant à chaque fois qu’elle étouffait un de ces discrets gémissements qu’elle tentait de faire taire, pourtant. Et lorsqu’il décida de poursuivre son exploration plus bas, elle l’en empêcha, bloquant son menton entre ses doigts, et l’obligeant à remonter jusqu’à elle. Si elle avait déjà du mal à supporter son souffle sur la partie supérieure, il y avait fort à parier que la partie inférieure risquait de déposer les armes avant même d’avoir combattue.
« Il est temps de passer à l’esquisse, je crois. » Soupira-t-elle avant de déposer ses lèvres sur les siennes, assoiffée de contact, même le plus infime fut-il. « Juste une esquisse. » murmura-t-elle encore en récupérant une de ses mains, qu’elle garda dans la sienne un instant. Elle s’accorda quelques secondes afin de faire redescendre la pression en elle, puis dirigea cette main masculine, jusqu’à son cou, l’obligeant, du bout des doigts, à en caresser le satiné. Il se laissa totalement guider, ne cherchant absolument pas à décider de la suite des opérations. Alors, à son rythme, un rythme lent, forcément, pour ne pas perdre tout self-control trop rapidement, elle laissa glisser leurs mains jointes, sur sa clavicule, puis sa gorge, appréhendant le moment où ils devraient descendre encore. Elle glissa entre ses seins, les évitant et faisant naître un premier geste de révolte chez lui, qui tenta de la forcer à remonter. Après un immobilisme forcé, il redevint sage comme une image. Elle leur fit faire le tour de son nombril, glisser jusqu’à une cuisse, éviter soigneusement la zone pubienne, puis remonter sur son flanc, passer sur l’autre épaule, remonter jusqu’à ses lèvres pour les déposer sur la paume offerte, puis redescendre, glisser délicatement sur un sein, décrire des cercles lents et concentriques, jusqu’à arriver au bouton dressé qui provoqua en elle la bouffée tant redoutée. Elle du se mordre la lèvre pour que la douleur occulte l’impérieux plaisir, puis elle relâcha sa main, le laissant maître de la situation. Et pourtant, il ne bougea pas. Sa paume resta en suspension, le bout de ses doigts toujours au contact de l’aréole sombre en comparaison de la peau laiteuse de son sein. Il semblait hésiter, attendre de nouvelles instructions. « Les volumes… les courbes… » Parvint-elle à articuler. « … par jeux d’ombres… au fusain… » Alors, elle s’agrippa à ses épaules, lovant son visage ravagé de désir dans le creux de son cou, son corps formant un arc afin qu’il ne soit pas collé au sien, et qu’il puisse jouer à sa guise. Il hésita juste un instant, puis elle l’entendit déglutir avec difficulté, à l’instant même ou sa main chaude venait soupeser un sein rond comme une pomme, plein et doux, plus lourd qu’il ne l’aurait imaginé. Son pouce s’attarda sur la zone érogène, curieux de stimuler au touché, ce qu’il avait observé de part son souffle. Elle soupira dans son cou, et il glissa sur son ventre si lentement qu’il aurait pu lui compter les côtes. Ses doigts se refermèrent sur une cuisse, en savourant la fermeté et le touché délicat. Il descendit jusqu’au genou, puis remonta en passant par le versant intérieur. Lorsqu’il fut assez haut, assuré et confiant, d’un mouvement preste, il la désolidarisa de l’autre, l’écartant avec ce qu’il faut de ménagement, mais pas trop. La surprise pu se lire sur les traits de Tosca, des traits auxquels il n’avait pas accès de par sa position. Il lui offrit, tout de même, les quelques secondes qui lui auraient été nécessaire pour revenir à sa position initiale et lui faire comprendre, alors, qu’il n’avait pas encore accès à cette zone-ci. Sauf qu’elle n’en fit rien. Elle se contenta de se figer sur place, enfonçant un peu plus ses doigts dans ses omoplates. Aussi, laissa-t-il remonter sa main, le bout de ses doigts venant caresser l’intérieur d’une cuisse jusqu’à présent resté inaccessible, et lorsque, le bras tendu à l’extrême entre leurs deux corps, ses doigts vinrent se glisser sur et entre le renflement, protection naturelle, de sa partie la plus intime, l’intégralité du corps féminin s’arque bouta sous la pression électrique, voir nucléaire, ressentie immédiatement. Elle ne retint pas le gémissement, elle ne chercha ni ne pu le retenir, et son corps s’affaissa contre le sien, le bras toujours coincé entre eux, les doigts toujours plus présent à l’orée de son intimité. Mais il ne lui laissa aucun répit, s’aventurant toujours plus, fouillant avec plus d’audace, elle tenta de parler, mais n’y parvint pas. Elle voulait savoir où ils en étaient dans l’évolution de la toile, et comme s’il lisait dans ses pensées, il répondit à sa question sans qu’elle n’ait à la poser : « De la couleur, il me faut de la couleur. » Chuchota-t-il si près, et pourtant si loin, alors qu’elle avait le sentiment de le sentir partout sur elle. Est-ce qu’elle planait déjà ? Surement un peu, et déjà beaucoup trop par rapport au peu qu’il lui avait fait subir, jusqu’à présent. Et pourtant, son bras s’activait d’avantage, au rythme de cette respiration qui devenait totalement anarchique. A qui appartenait-elle ? A elle ? A lui ? Peut-être bien aux deux. Elle s’était légèrement redressée, ses fesses quittant ses talons pour lui offrir un axe plus large de manœuvre. Et il avait comprit la requête de son corps, poursuivant sur sa lancée avec toujours plus de maîtrise et d’assurance. Acculée par les vagues de désir teintées de plaisir, ses mains quittèrent ses épaules, cavalèrent jusqu’au bouton du pantalon qu’il portait encore, et le firent sauter rapidement, avant de progresser jusqu’à sa chute de rein, pour les glisser sur ses fesses, les dénudant aussi rapidement qu’elle en était capable, et elle était encore capable de beaucoup de choses. Surprit par ce mouvement soudain, plus que par le fait de se retrouver avec le cul à l’air libre, il s’immobilisa partiellement, cherchant le regard de sa compagne dans la brume qui semblait s’être formée autour d’eux. Et alors, il obtient une réponse claire et précise, concise aussi, simplement deux mots, un ordre tacite, une supplique avérée : « Prends-moi. »
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«Je crois que notre brunch vient d’être repoussé. Cette bestiole a besoin d’un bain. » Il ne portait qu’un tee-shirt et un caleçon, le chien au pelage gluant dans ses bras. Cette scène aurait pu la faire rire, l’attendrir, ou encore la faire hurler, mais elle créa une toute autre réaction en elle. PLOP. C’est le bruit que fit sa bulle quand on la creva d’un coup d’aiguille aiguisée. PLOP. Et plus rien de ce doux apaisement ne subsista en elle. Ce fut comme si un voile quittait ses rétines, comme si elle était enfin apte de réagir et de raisonner comme une personne normale, une personne avec un cerveau, une personne qui ne serait pas uniquement dirigée par des pulsions bêtement charnelles, une personne qui ne serait pas… son frère… et elle, à présent. C’était ça qu’elle était devenue ? Une Pâris avec des boucles et des seins ? Est-ce que c’était ça qu’il ressentait au petit matin, son esprit lui criant un « et merde ! » le tout sur une musique pop à la « oups I did it again » en fond sonore ? Bien sûr, elle avait eu conscience de ce qu’elle faisait et pourquoi elle le faisait, mais pendant toute cette période de douce euphorie, elle avait tenté de chasser de son esprit, les conséquences de ses actes. Et là, en le voyant lui, parader dans la cuisine, à moitié à poil, proposant d’aller shampouiner le chien, alors que Chico commençait à s’agiter sur son canapé inconfortable –qu’est-ce qu’il foutait sur le canapé, d’ailleurs ?-, la panique la submergea d’un coup. Non, non c’était pas la petite maison dans la prairie là. Oui, ils avaient couché ensemble, et oui… putain de merde, elle avait prit un pied d’enfer ! Mais, HEY HO ! Y avait pas de happy end à la « ils se marièrent, eurent beaucoup d’enfants, et vécurent heureux à jamais entourés de licornes et de papillons » ! C’était pas ça la vie de Tosca, ça n’avait jamais été ça. Et comme s’il avait perçu le changement dans l’attitude de la jeune femme, Thybalt perdit son sourire, et le chien gigotant toujours dans ses bras, l’observa avec une sorte d’inquiétude. Oui, coco, tu peux t’inquiéter, parce que la brune est à deux doigts de craquer son slip puissante vénère. « Non ! » Lui répondit-elle finalement, à voix basse, son regard oscillant avec frénésie entre lui, et Chico toujours endormis. « Non, on peut pas aller laver le chien ! Ca parait con, mais les nanas coupables d’adultère s’amusent rarement à aller laver le chien, tranquillement, avec l’amant en question, dans une baraque peuplée de potentiels fouteurs de merde ! Pas plus que tu ne peux te permettre de descendre en caleçon dans la cuisine ! Bon Dieu, Thybalt ! Qu’est-ce que tu as dans la tête ? Ca t’arrive de penser, parfois ? » Mauvaise foi flagrante, mais elle-même n’était plus en état de réfléchir puisque la panique prenait le pas sur tout. Elle craignait que Dona ouvre un œil, elle craignait que le chien aboie et qu’il réveille définitivement toute la maisonnée. Combien de personne y avait-il là ? Deux ? Trois ? Plus ? La Casa étant souvent prise pour une auberge de jeunesse, on ne savait jamais sur qui on allait tomber avant de lui tomber dessus. « D’accord, Pâris et Dona dorment, mais rien ne les empêche de se réveiller. » Continua-t-elle en ramassant des vêtements d’homme à terre. A qui étaient-ils ? Aucune idée. C’était des vêtements d’homme, c’était le principal. Un jean et un pull. « Et puis même, Benny pourrait rentrer, ou Babar, ou pire encore, Matteo ! Je fais quoi, je dis quoi, si Matteo déboule et te voit comme ça ? Non, non, non. Tout ça n’avait rien d’intelligent, ni de réfléchi, ni de… de rien ! Je trouve même pas les mots pour qualifier ce que je viens de faire. Oui, ok, j’en avais envie depuis un siècle environ, mais est-ce une raison pour me montrer si… si quoi, au juste ? Je suis même pas sûre qu’un mot existe dans le dictionnaire pour définir ma traîtrise, ma lâcheté, et la nonchalance avec laquelle j’ai l’audace de m’afficher. Non, Thybalt, c’est carrément pas possible en ce moment. » Et voilà, après un monologue où elle ne semblait parler qu’à elle-même, elle venait de lâcher la bombe. Elle lui avait arraché le chien des bras, le remplaçant par les vêtements d’homme trouvé au sol. « C’est trop vite, trop fort, trop tout. C’est trop, j’ai… je… » La bouche coincée dans cette ébauche de phrase qui ne voulait pas sortir, elle releva les yeux vers lui, incapable de calmer la panique en elle. Le moindre bruit la mettait sur le qui-vive, et chaque seconde qui s’écoulait alors qu’il était encore dans la maison était une seconde de torture. «… pars ! Pars s’il te plait ! Pars ! » Ne tenant plus une autre de ces secondes insupportables, elle tourna les talons et cavala jusqu’à l’escalier. En petite tenue, elle enjamba les marches quatre à quatre, avant de s’enfermer dans sa chambre. Elle se jeta sur son lit, mais lorsqu’elle voulu enfouir son visage dans l’oreiller, ce fut son odeur à lui qui la submergea. Elle le jeta au loin, où il alla rebondir contre un mur. Elle ferma les yeux, et lorsque la porte d’entrée claqua, et qu’elle prit une profonde inspiration, elle se rendit compte qu’elle la retenait depuis qu’elle avait quitté la cuisine.
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« Ma très chère Juliette, Ma vie n’est plus qu’une succession de jour sans soleil, et de nuit sans lune depuis que j’ai perdu mon Roméo. Il m’aime toujours, je le sais, je le sens au plus profond de moi, de ma chair, de mes entrailles. Ca a été un véritable coup de foudre, comme pour toi, quand nos regards se sont croisés, nous avons su, immédiatement, que nous étions fait l’un pour l’autre. C’était une évidence ! Il était tellement beau, tellement charmeur, et il n’avait d’yeux que pour moi. Les autres filles de la boîte n’existaient plus, il n’avait plus que mon prénom à la bouche… enfin presque, parce que dans le vacarme, il avait mal entendu et n’arrêtait pas de m’appeler « Celia ». Je m’appelle Virginie, mais ça ne m’a pas dérangé. Je me suis noyé dans son regard, j’ai bu chacun de ses mots. « Tu viens souvent ? » qu’il m’a demandé, et j’ai répondu « non » avec la voix qui tremble. Et là, il m’a dit la plus belle chose qui soit : « C’est bien ce que je me disais, sinon je me serais souvenu d’un canon comme toi. ». Un canon ! Te rends-tu compte, Juliette ? Il me trouvait canon. Le coup de foudre, je te dis. Et puis, il m’a emmené danser sur la piste, nos corps s’harmonisaient à la perfection, et sa main dans ma chute de rein me rendait toute chose. Et puis, comme dans ton histoire, on a eu le sentiment que cette nuit pourrait nous être fatale, comme si le destin pouvait nous séparer à tout moment. C’est ce qu’il m’a chuchoté à l’oreille en ajoutant qu’on avait pas de temps a perdre, qu’on en avait déjà trop perdu en vivant séparément. Alors on s’est aimé, on s’est aimé très fort dans les toilettes de la boîte. Le lieu n’avait rien de romantique, mais l’urgence étant là, on avait pas vraiment le choix. On s’est aimé le temps d’une chanson, et puis nous avons rejoins la salle. C’est là qu’il m’a dit qu’il devait partir, qu’il n’avait pas le choix. Il a disparu avec ses potes, et j’ai gardé sur moi l’odeur de sa peau. Le lendemain je suis retournée dans cette boîte. Il est arrivé plus tard, avec une autre fille. J’ai d’abord cru que c’était sa sœur, mais maintenant je sais qu’il s’agit de sa Rosalinda. Il ne l’aime pas, c’est une évidence, puisqu’il m’aime moi. C’est pour ça que j’implore ton aide, Juliette. Je ne sais plus quoi faire, je ne sais plus comment faire. Dois-je intervenir ? Je t’en prie, Juliette, aide-moi. Virginie. » Un grand éclat de rire accueillit la fin de la lecture de Benvolio, qui se réinstalla tranquillement sur son banc, après avoir replié consciencieusement la lettre pour la remettre dans l’enveloppe. Il salua son auditoire d’une petite révérence, puis froissa la lettre en une petite boule de papier qu’il envoya directement dans la poubelle. « Mais qu’elle est conne ! » s’exclama Pâris, formulant tout haut ce que tout le monde pensait tout bas « Elle s’est fait culbuté par une type dans les chiottes d’une boîte de nuit, et elle croit que c’est l’homme de sa vie ? » questionna-t-il l’assemblée en ouvrant une lettre à son tour. C’était le moment de la journée, rituel auquel personne ne manquait jamais, où la casa se réunissait autour du panier composé d’une dizaine, parfois d’une trentaine de lettres, récolté sur le mur d’enceinte. Avant, lorsque la Casa était encore à l’abandon, les lettres s’étendaient sur la façade entière, mais maintenant que les grilles restaient closes, ils se contentaient du passage sous la voute menant à ces dernières. Le mur, là-bas, faisant quand même près de trois mètres de largeur, il était impensable de laisser les lettres s’y entasser. Alors, tous les jours, un volontaire était désigné pour les ramasser, et ensuite, le travail de lecture commençait. Dans un film récent, on prétendait que des petites mains bien intentionnées s’empressaient de leur répondre, mais inutile de vous dire que la réalité était bien loin de ce joli conte de fée moderne. Non, si les Dal Cappello (et pièce rapportée) ouvraient les lettres, c’était bel et bien pour se foutre de la tronche des expéditeurs, et se détendre en se faisant partager les perles. Benvolio venait d’en trouver une, c’était le moins qu’on puisse dire, ce qui avait même redonné le sourire à Tosca. « Mais en fait, c’est de toi qu’elle parle, Pâris, c’est ça ? » Rétorqua-t-elle avec sadisme avant de se manger une boulette de papier en pleine tête. « Attendez ! Attendez ! J’en ai une !! » S’exclama alors Chico, en bondissant du banc, les yeux rivés sur la lettre qu’il tenait à la main. « Faites silence ! Le gamin a enfin réussi à ouvrir sa lettre ! » Se moqua Benny en imitant un roulement de tambour sur le bois de la table. Il faut dire qu’il venait de batailler pendant de longues minutes avec tout le scotch accumulé sur la si petite enveloppe. A croire que l’expéditrice avait peur qu’elle ne tombe entre de mauvaises mains. Raté ! « Vas-y, on t’écoute. » L’encouragea Sca après avoir gratifié son cousin d’une tape derrière la tête. « Ma très chère Juliette… » « Ca commence bien. » « La ferme ! » « Continue. » « Ma très chère Juliette… » « Tu te répètes. » « Mais ferme-la ! » « Quoi, la lettre ? » « Non, ta gueule ! » « Ma très chère Juliette… Je suis amoureuse. Cela fait plusieurs mois que je suis amoureuse, amoureuse d’un homme que je ne vois plus, malheureusement. Il était encore là, il n’y a pas longtemps, et puis, brusquement, il a quitté la ville sans un mot. Je ne sais quand il va revenir, je ne sais même pas s’il va revenir un jour, mais son absence me pèse. Avant, je pouvais l’aimer en silence, cela ne me dérangeait pas du moment que je pouvais le voir quotidiennement, surprendre le sourire qu’il m’adressait à moi, et à personne d’autre. Cela me suffisait. Mais depuis son départ, je me rends compte que le souvenir d’un sourire ne comble pas la solitude de cette absence pesante… » « Sortez les violons ! » « Scaaaaaa !! » « Pardon, ça m’a échappé. Reprends. » «… J’ai besoin de le voir, j’ai besoin de ces moments hors du temps où il venait s’enquérir de mon bien-être pendant que, juchée sur un escabeau, je tentais d’atteindre les derniers livres, ou qu’attablé sur le grand bureau, je demeurais plongée dans ma lecture. Je sais bien que je ne suis pas de son monde, mais il ne me la jamais fait sentir, au contraire, il a toujours fait en sorte de me témoigner respect et gentillesse. C’est ça qui m’a tout de suite séduit, en plus de son allure incroyable et de ses talents de séducteur. Il m’a toujours fait me sentir unique, comme si j’étais plus importante à ses yeux que n’importe qui d’autre. Et ça me suffisait. Peut être parce que j’avais peur aussi, peur de ressentir ce genre de chose pour un homme comme lui. Il est plus âgé, et moi totalement inexpérimentée. Comment ne pas avoir la frousse ? Ou simplement peur de décevoir ? Mais maintenant qu’il est loin, je me rends compte que je ne peux me contenter de son image dans les magazines, et je… » « STOP ! » C’était Pâris qui venait d’intervenir en levant une main bien haut. « Son image dans les magazines ? Cette gamine en pince pour une star ? Une star qu’elle a côtoyée et avec qui elle a une ouverture ? Putain, mais on tient un scoop, là ! C’est peut être Silvio ? » « Elle est bien, ma lettre, hein ? » se galvanisa Chico, un sourire s’étendant jusqu’à ses oreilles. « Pauvre gamine. Elle doit avoir quoi ? 14 ? 15 ans ? » Soupira Tosca, le menton posé dans ses mains en coupe. « Quelque chose comme ça, elle fait des cœurs au-dessus de ses « i ». » « Flasher sur une star, pouah, c’est bien un truc qui m’arrivera jamais ça. » « Il ne faut jamais dire jamais, comme dirait Justin. Bon, si vous avez terminé vos commentaires, puis-je reprendre ? Oui ? Bien. Donc… je ne peux me contenter de son image dans les magazines, et je désespère de le revoir un jour. J’ai posé la question discrètement, à sa gouvernante, mais cette dernière n’en sait pas plus que moi. Elle dit qu’il a préféré fuir loin de la cause de ses tourments. Et elle ponctue ça d’un mouvement de menton entendu, comme si elle cherchait à me faire comprendre quelque chose. Serais-je la cause de ses tourments ? Moi, qui n’aie été autorisée à fouiller dans sa bibliothèque que grâce à mes bonnes notes en classe et un mot de mon professeur d’Histoire ? Je n’ose pas y croire, et pourtant. Que puis-je faire, Juliette ? Mes parents ne me laisseront jamais aller à Rome, même pour les vacances scolaires. Dois-je lui écrire une lettre ? Est-ce que ça ne fait pas trop nouille ? Je ne sais pas comment agissent les femmes de son âge, je suppose qu’elles ne s’encombrent pas de jolies lettres parfumées, et qu’elles vont droit au but, mais comment pourrais-je agir de la sorte alors que tant de kilomètres nous séparent ? Demain je retourne chez lui, c’est mon dernier jour de recherche. Je tâcherais de soudoyer sa gouvernante afin d’obtenir son adresse, bien que je me doute que me contenter d’un « Thybalt Andreotti, Sénat, Rome », pourrait suffire au facteur. Et après j’… » « Arrêtez !!! » Perça soudain la voix de Tosca au milieu de cette lecture ponctuée de rires sonores. « Arrêtez ça ! » S’emporta-t-elle en étendant le bras pour arracher la lettre des mains de Chico, et la froisser par la même occasion. « Mais… » s’indigna Dona, tout penaud. « J’avais pas finit de lire. » « Ouai ! Et c’était drôle en plus ! » Jugea bon de renchérir Benny. « Non ! Ca n’a absolument rien de drôle ! Et au lieu de vous moquer de la vie sentimentale des autres, vous feriez mieux de vous occuper de la votre ! » toute à sa colère, elle froissa, plus que de raison, la pauvre lettre, et la jeta rageusement dans la corbeille en quittant la cuisine au pas de charge. « Qu’est-ce qu’il lui prend ? D’habitude elle adore ces lectures. » « Ca doit être ses règles qui la travaillent. » Ouai, ça devait être ça, ouai.
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Il lui fallut moins d’une minute pour s’habiller convenablement, c'est-à-dire autrement qu’avec un bas de jogging masculin et donc trois fois trop grand pour elle, et un tee-shirt « Hello Kitty must die », et claquer la porte d’entrée sous le regard médusé de ses hommes. Et il lui fallut moins de cinq minutes pour parcourir la Citta Antica d’une allure quasi militaire. Autrement dit, moins de six minutes après la révélation de la lettre, elle se trouvait face à la grande grille infranchissable, le visage renfrogné tourné vers la caméra de vidéo-surveillance. « C’est bon Cerbère, ouvrez au lieu de me faire poireauter dans le froid. » Grogna-t-elle lorsque le léger grésillement de l’audiophone se fit entendre. Un soupir d’exaspération lui répondit, bientôt suivit par le déclic habituel de la grille qui s’ouvre. Elle s’empressa de se faufiler entre les deux battants à peine écartés, puis martela le gravier de ses converses. Elle avait pour habitude de se montrer aimable et chaleureuse avec le personnel de maison, surtout Maria, mais pas aujourd’hui, aujourd’hui elle n’avait pas l’intention de s’encombrer de bonnes manières, elle était énervée, et elle voulait que ça se sache. Aussi, lorsque la corpulente sexagénaire, poings enfoncés dans ses larges hanches, et mine des mauvais jours, s’approcha d’elle, Tosca ne s’en laissa pas compter. « Oui, je sais, il est au plus mal, je lui ai brisé le cœur, je ne suis qu’une salope sans scrupule. Je sais tout ça, Maria, je le sais. Mais est-ce qu’une fois dans sa vie il pourrait arrêter de subir et de se comporter comme un gamin de six ans à qui on vient de dire que le Père Noel n’existe pas ? Non, bien sûr que non ! Ca vous dépasse tout ça, c’est tellement plus facile quand tout est tout noir ou tout blanc ! » Tout en parlant, elle avançait, inexorablement vers l’imposant escalier qu’elle savait se situer au-delà du grand couloir, juste avant la salle d’apparat. Maria la suivait de près, peu habituée à ce que l’on entre chez elle comme dans un moulin. « Alors, oui, je sais, il ne mange plus, ne dort plus, et a perdu au moins huit kilos depuis… ça fait quoi ? 3h qu’il est partit de chez moi ? Mais vous savez quoi ? Je suis là, maintenant, alors pas la peine d’en faire un fromage. » Semant Maria au pied des escaliers, elle monta ses derniers aussi vite que ceux qu’elle avait gravi après lui avoir ordonné de partir. Il s’était exécuté, et maintenant c’était elle qui revenait en rampant. Enfin, ramper est un bien grand mot. Disons qu’elle revenait, et que c’était déjà le mieux qu’elle puisse faire. Alors qu’il ne s’attende pas à des excuses ou quelque chose comme ça, puisqu’en plus, si elle revenait c’est sous le vrai-faux prétexte de l’engueuler au sujet de cette lettre. Cela dit, plus elle gravissait de marches, et plus elle repensait à ce qu’elle venait de dire à Maria. Elle avait été vraiment moche avec lui, elle avait paniqué et jeté aux orties tout ce qu’ils venaient de vivre ensemble. Ce n’était pas son intention, et bien sûr que ça avait une importance capitale dans sa vie, mais il aurait du comprendre qu’il était assit sur une bombe a retardement, et qu’au lieu de tester les limites, il aurait du se contenter de ce qu’il avait. Dans quel état allait-elle le retrouver ? Est-ce qu’il était reclus dans sa chambre plongée dans le noir ? Est-ce qu’il avait tout démoli autour de lui, déchirant les hypothétiques esquisses qu’il aurait pu faire d’elle ? Est-ce qu’elle allait devoir sécher ses larmes ? C’est étonnant, mais en tournant la poignée de porte, toute colère au sujet de cette foutue lettre l’avait quitté, elle n’avait plus que de l’appréhension, de la culpabilité, et une pointe de tristesse. Mais lorsque la porte s’ouvrit sur une chambre baignée de lumière, avec un Thybalt tranquillement assit sur son lit, son mac posé sur ses jambes, bizarrement, tout revint d’un coup. « Tu te fous de ma gueule ? » S’exclama-t-elle alors qu’il lui offrait un sourire qu’il perdit très rapidement. « Quoi ? » « Tu fous quoi, là ? » « Je check mes mails, pourquoi ? » « C’est bien ce que je dis, tu te fous carrément de ma gueule ! Pourquoi les rideaux sont ouverts, et pourquoi tu chiales pas ? » « Pardon ? » D’un mouvement qu’elle jugea plus qu’agaçant, il souleva un sourcil de surprise tout en se grattant le menton à la barbe naissante. « Tu m’as demandé de partir, c’est ce que j’ai fait. Je ne savais pas qu’hystérie et dépression nerveuse étaient comprises dans le forfait. » « Ha ouai, et donc, normal, toi tu rentres et tu consultes tes mails comme si cette journée n’avait absolument rien de particulier ? » La colère revenait en flèche, atteignant des sommets encore inexplorés par l’Homme. « Oh si, c’est une très belle journée que rien ne saurait me gâcher, et elle a de particulier que je viens de recevoir un mail de pub m’invitant à consulter les offres pour une augmentation pénienne. » Répliqua-t-il, toujours très calme, bien trop calme, en fronçant les sourcils avant de supprimer le mail en question d’une simple pression sur la souris tactile. « Ridicule. » « T’en as rien à foutre, en fait ! C’est ça ? » Hurla-t-elle, en désespoir de cause. « C’est surtout que je commence à être habitué. » D’un mouvement preste, il claqua l’écran de son ordinateur, et se leva pour aller le reposer sur le bureau. « C’est ta manière de fonctionner, tu agis, tu paniques, tu m’envoies chier, et puis tu reviens. Alors, au lieu de me morfondre dans mon coin en attendant ton retour inévitable, je check mes mails. » Il se tenait devant elle, à présent, à bonne distance tout de même, afin de parer au coup qu’elle semble vouloir lui donner. Il savait que ce genre de répartie la mettrait hors d’elle, parce qu’il l’énonçait avec calme, déjà, mais aussi parce qu’elle savait qu’il avait raison, et qu’elle détestait ça par-dessus tout. Non pas qu’il ait raison, mais simplement d’être faible à ce point, surtout lorsqu’il affichait ce petit sourire en coin qu’il peinait à retenir. « Tu comptes fermer la porte, un jour ? Non pas que ça me dérange, mais je ne suis pas sûr que Maria donne beaucoup dans le voyeurisme. » « Pardon ? Tu ne crois quand même pas que je suis venue jusqu’ici pour te sauter dessus ? » Répondit-elle en claquant, tout de même, la porte derrière elle. « Ha non ? T’es venue pourquoi, alors ? » Demanda-t-il en l’observant avancer vers lui, puis le dépasser sans même le toucher. « Checker mes mails. » Riposta-t-elle en s’emparant du mac, un sourire triomphant aux lèvres.
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Il n’était toujours pas remonté et elle commençait à s’impatienter. Il avait dit que ça ne lui prendrait qu’une petite poignée de minutes, mais maintenant, cela faisait plus d’une demi-heure qu’il était descendu. Est-ce qu’il avait besoin d’autant de temps pour ce coup de fil ? Certainement, sinon il serait remonté depuis longtemps, mais la question n’était pas là. Elle s’ennuyait. Aurait-elle été chez elle que les occupations n’auraient pas manqué, mais là… Elle avait déjà lu en entier le rapport se trouvant sur la table de nuit, elle y avait même fait quelques annotations en marge. C’était un projet de loi soporifique concernant l’aménagement du territoire, et pourtant, elle s’ennuyait tellement qu’elle y avait presque trouvé un semblant d’intérêt. Elle avait surfé un peu sur le net, se tenant informée des dernières informations en direct de la Libye, du Yémen, ou encore du Japon, mais elle en avait vite fait le tour. Elle n’avait plus rien à faire à part compter le nombre de poutres au plafond, mais comme elle savait déjà qu’il y en avait exactement 23, elle décida qu’il était plus que temps de sortir de cette chambre. Elle enfila le grand tee-shirt aux armoiries de l’université de Rome –oui, d’accord, elle ne s’était pas contentée de checker ses mails- et le caleçon qui avait atterrit sur la lampe de chevet, puis s’en alla rejoindre le monde civilisé. Vu les bruits de casseroles en provenance de la cuisine, Maria devait être aux fourneaux. Tant mieux, elle n’aurait pas à souffrir du regard scrutateur de la vieille gouvernante. La brune passa devant la porte sans faire le moindre bruit, et s’approcha discrètement des doubles battants du bureau restés entrouverts. Aucun bruit ne lui parvenant, elle décida de passer la tête pour connaître la raison d’un tel silence. Thybalt était installé derrière le grand bureau, sa joue reposant d’un sa paume, tandis que de l’autre main, il tournait les pages de ce qui ressemblait beaucoup au rapport qu’elle avait trouvé sur la table de chevet. Comme s’il avait sentit sa présence, il releva les yeux vers elle, et dans une ébauche de sourire, lui fit signe d’entrer. Ce qu’elle fit. Pieds nus, elle foula le parquet grinçant de l’imposante bibliothèque, et tout en s’approchant du bureau, récupéra une pomme dans la corbeille de fruits sur la table centrale, celle où l’imposant écran, qui l’avait tant perturbé lors de sa première visite, se trouvait, tourné vers le bureau. D’ailleurs, ce ne fut qu’une fois derrière ce dernier, et une fois qu’elle eu posé les fesses sur l’accoudoir du fauteuil de Thybalt, qu’elle remarqua que l’écran affichait la mine presque caricaturale d’Il Divo. Immédiatement le rêve où elle lui rendait visite dans cette même pièce transformée en chambre, alors qu’il était mourant, lui revint en mémoire. Mais elle tenta de camoufler son malaise, et leva une main en guise de salut. « Bonsoir Monsieur Tête de télé. » Entonna-t-elle gaiement avant de croquer dans sa pomme. « Sénateur Tête de télé, je vous prie, jeune fille. » Rétorqua-t-il avec humour. « Je comprends mieux les raisons de ton départ précipité, Thybalt. » ce dernier leva à peine les yeux du rapport pour grommeler un vague assentiment, alors que son grand-père, d’humeur taquine, semblait se croire dans un stand-up. « Une femme à moitié nue croquant une pomme ? Tu devrais te méfier. » « Tant qu’il n’y croque pas à son tour… » Se défendit-elle, en tendant, par pure provocation, la pomme sous le nez de son amant qui croqua dedans sans même prendre conscience de la portée de ce qu’il venait de faire. « Les hommes sont si faibles… » Soupira le vieillard avec théâtralité. Mais Thybalt semblait à des années lumières de cet échange atypique, il était entièrement accaparé par sa lecture. Si bien qu’il manqua le départ de son grand-père qui mit fin à la communication après dix bonnes minutes d’humour potache auquel on ne s’attendrait pas de sa part. Il manqua aussi le passage de Maria qui jaugea les jambes nues de Tosca avec une feinte sévérité. Et surtout, il manqua l’arrivée de la charmante tête brune qui manqua faire tomber tous les livres qu’elle tenait serré contre sa poitrine, en découvrant le sénateur derrière son bureau. Tosca n’eut aucun mal à l’identifier comme l’auteur de la lettre. Ses quatorze printemps, ses formes juvéniles, et ses joues rouges pivoines suffirent à ne pas se tromper. Et lorsque son regard remonta jusqu’à la main qui massait la nuque masculine, suivit la ligne du bras pour aboutir sur un visage féminin et souriant, c’est de l’incompréhension que Tosca pu déceler dans ses prunelles. « Bonjour. » Chantonna celle-ci, soudain ragaillardie, ce qui fit lever la tête de Thybalt, et remarquer la présence de la jeune fille. « Oh… Tu es là depuis longtemps ? » Demanda-t-il alors qu’elle avait bien du mal à contempler autre chose que la tenue peu conventionnelle de Tosca. « Je viens d’arriver, mais… Vous n’étiez pas à Rome ? J’ignorais que vous rentriez sinon je me… » Commença l’adolescente. Je me serais un peu mieux coiffée, maquillée, habillée… songea Tosca in petto. « C’est Giulia. » Expliqua-t-il en se tournant vers sa compagne. « Je lui prête ma bibliothèque pour le dossier qu’elle doit écrire en Histoire. » Tosca hocha la tête, attendant qu’il la présente à son tour, ce qu’il ne manqua pas de faire, ou presque pas. « Giulia, je te présente… » « Sa femme. » Voilà qui avait le mérite d’être clair et de laisser un sénateur sur le cul. Encore plus lorsqu’elle lui vola ses lèvres pour la première fois en dehors du cercle confiné d’une chambre et sous le regard médusé d’une tierce personne. « Oui, sa femme. » Répéta-t-elle en se relevant de l’accoudoir pour avancer en direction de la jeune fille. « Tosca Giulietta Andreotti. » Enonça-t-elle en lui tendant sa main. « Mais on m’appelle souvent Giulietta, simplement parce que la Casa di Giulietta m’appartient et qu’il est dit que je serais sa descendante directe. Qui sait ? C’est peut être vrai. Personnellement, je ne crois pas qu’elle ait réellement existé, qu’elle soit autre chose qu’une fable. Mais ça n’empêche pas les gens de lui écrire. » Elle aurait bien poursuivit davantage, mais la jeune fille, horrifiée, avait déjà tourné les talons en expliquant qu’elle repasserait un autre jour. Tosca haussa les épaules, et referma les deux battants après son départ. « Tu vas bien ? » Demanda Thybalt dans son dos. « Très bien, pourquoi ? » Adossée à la porte, elle lui souriait franchement. « Et si elle décide de tout raconter à je ne sais pas qui ? » Il était visiblement inquiet, et dans un sens, ça touchait la brune. « Crois-moi sur parole, elle ne racontera absolument rien à personne. » Répondit-elle en imitant son sourire en coin à lui. « Par contre, toi et moi, il va falloir qu’on parle de ton comportement un poil trop prévenant envers des gamines impressionnables, mon pote… Et ça va chier. »
Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
■ Messages : 3716 ■ Age du Personnage : 25 ans ■ Logement : ANDREOTTI; 34 Via Barchetta ; Citta Antica ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
♠ ♠ ♠ ♠ ■ Relazioni & Famiglia: ■ Job: Maire de Vérone ■ Sono : marié(e)
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Lun 28 Mar - 14:26
« Oh dios moi ! » Thybalt leva les yeux au ciel. Il avait pensé pouvoir éviter Maria en rentrant chez lui mais de toute évidence une bonne âme, surement Giulio, l’avait informé que l’oisillon serait de retour au nid sous peu. Ou bien était-ce André qui avait repéré la superbe Porsche devant la Casa di Giulietta. « Je n’ai rien Maria. » Soupira Thybalt alors que la matrone le serait si fortement dans ses bras qu’il se demanda si ses côtes malmenés par ses ébats avec Tosca n’allaient pas se fissurer sous le choc. « Je vais bien, tout va bien. » Il lui rendit son étreinte, conscient d’avoir été la cause de nombreuses insomnies de sa vieille gouvernante depuis son départ de Vérone. Un départ relativement précipité et dans un état quasi identique à celui de son arrivé. « Vous auriez au moins pu m’avertir que vous comptiez passer la matinée dehors ! » Le gronda t-elle en le libérant enfin de sa puissante étreinte. « Regardez-vous, vous avez au moins perdu 10 kilos. » Continua t-elle en le désignant de son impressionnante cuillère en bois. Etrangement face à Maria, il avait toujours l’impression d’avoir cinq ans. Il avait beau être devenu un sénateur réputé et respecté, un homme de pouvoir qui se trouvait à la tête d’un poste important, auprès d’elle il éprouvait toujours le sentiment d’être un enfant têtu et honteux de cinq ans. André se matérialisa alors dans l’entrée, venant au secoure de son jeune employeur. « Maria cesse donc de dramatiser, ce petit à toujours eut la peau sur les os. Va donc t’occuper de lui préparer à manger au lieu de la tarabusté, c’est lui qui a conduit toute la nuit, au lieu de râler occupe toi donc de son bien être. » Thybalt adressa un sourire chaleureux à son vieux chauffeur et serra amicalement la main que lui tendait le vieil homme. « Bah elle se fait beaucoup de souci pour vous, ne vous en faite pas, une fois que vous aurez fait honneur à sa table elle ne jurera plus que par vous. » Il eut le mérite de décrocher un éclat de rire au jeune sénateur. « Je m’occupe de votre voiture je suppose ? » Proposa t-il alors que de la cuisine leur parvint les éclats de colère de Maria. « Oui allez y André, je crois que pour une fois je vais aller stoïquement faire usage de mon charme ravageur sur votre épouse, en espérant que cela suffise. » Le vieil homme eut un sourire amusé avant de franchir la porte. « Doit-on s’attendre à la visite de Madame Andreotti ? » Demanda t-il avant de refermer la porte. « Espérons que oui. Je crois que contrairement à ce que pense votre femme, elle et Maria se ressemblent énormément. Je serais dans la cuisine si elle cherche mon cadavre pour s’acharner sur ma dépouille. » Ajouta t-il en éclatant de rire alors que lui parvenais les jurons de plus en plus fleuries de la cuisinière. « Souhaitez-moi bonne chance. » « Je ne crois pas que ce soit de chance dont vous ayez besoin, mais d’un gilet par balle. » Plaisanta André en récupérant les clés de la Porsche que Thybalt venait de repêcher dans le fond de la poche de son jean. « JE VOUS ENTENDS JE VOUS SIGNALE ! » Cria Maria en ouvrant avec violence le battant de la porte de la cuisine, elle les foudroya du regard avant de disparaitre à nouveau dans son antre. « Réglez votre sourire sur la puissance maximale. » Lui chuchota André en refermant la porte. Le sourire de Thybalt s’estompa légèrement, il contempla quelques instants le parc depuis la baie vitrée du hall, il savait qu’elle reviendrait, il commençait à avoir l’habitude de ses coups de sang, de ses doutes mais il ne pouvait empêcher l’angoisse de lui serrer légèrement le cœur. Il détestait la voir ainsi douter de la justesse de leurs actes, mais il comprenait. Elle était fiancée et longtemps Mattéo avait tenu la place qu’occupait à présent Thybalt dans son cœur. Il passa une main dans ses cheveux et grimaça lorsque son jean lui rentra douloureusement dans les fesses. « Aie. » Grogna t-il en tirant sur le jersey dans l’espoir d’élargir un peu le tissu. Il se demandait comment il était arrivé à s’asseoir dans sa Porsche avec un jean aussi étroit. Comment diable le dénommé Chico pouvait-il passer la journée dans un jean aussi … serré. Les abdominaux contracté et les fesses serrés il se dirigea avec raideur vers la cuisine, aussi baptisé la « tanière de Maria ». il suffit qu’il fasse quelques pas dans la cuisine pour qu’elle braque sur lui un regard plus intrigué que réellement fâché. « Pourquoi diable marchez vous ainsi… Vos jambes … » « Non, non, mes jambes vont bien » Répondit-il en s’approchant de la table de service avec précaution, se demandant ce que Tosca lui ferrait s’il craquait le pantalon de Chico. Après tout, elle n’aurait pas son mot à dire à ce sujet, c’était elle qui l’avait mis dehors avec les fringues d’un autre, ce n’était pas de sa faute s’il n’était pas battit comme une allumette, lui. Maria le fixa intensément. « Tant que vous êtes debout allez donc me chercher des pommes de terres dans le sellier. » Le soupire qu’il lâcha en dit long mais elle ne se laissa pas attendrir et le regarda avancé jusqu’au sellier à petit pas, soudainement son regard zooma sur le fessier moulé dans un jean bien trop étroit de celui qu’elle considérait comme son petit fils. Puis elle nota le pull en laine blanc tout aussi moulant et la lumière se fit dans son esprit. « Seigneur Jésus ! » S’exclama t-elle en posant la main sur son cœur. « Il faut que je m’assoie. » Alarmé Thybalt se retourna et la dévisagea, inquiet. « Vous vous sentez mal ? Maria ? » La vieille femme avait posée la main sur son cœur, et le dévisageait avec stupeur. « Maria ? » Il prit sa main dans la sienne, conscient qu’un drame était en train de se jouer, un drame dont il ne comprenait rien mais dont il était de toute évidence la cause. « Je savais que cette petite allait attirer le malheur sur nos têtes mais votre grand père n’a pas voulu me croire ! Je le savais. » Soupira la vieille femme en s’éventant pour se remettre de ses émotions. « Personne n’a voulu m’écouter et voila le résultat … Nous allons nous retrouver avec un scandale sur les bras mais pire, Dieu ne vous pardonnera jamais ce pêché… Ô seigneur ! » Thybalt fronça comiquement les sourcils. Comment avait-elle pu deviner qu’ils avaient … Seigneur était-ce vrai qu’on lisait ce genre de chose sur le visage ? Ses joues se tintèrent de rouge, lui qui ne rougissait jamais d’ordinaire. « O seigneur ! C’est donc vrai ? » Soupira Maria en le dévisageant. « Qu’allons nous faire … » Oh il n’était pas nécessaire d’en faire tout un plat, il fallait bien que cela se produise à un moment où à un autre tout de même. Il venait d’avoir 25 ans, la plus part des mères italiennes se seraient plutôt réjouit que leur « fils » leurs donne enfin une preuve de sa virilité non ? « Maria, ce n’est pas aussi grave que cela, après tout j’ai … » « Pas si grave ? » Elle plaqua une main horrifiée sur sa bouche. « Ce n’est pas si grave ! C’est malsain, mauvais, déshonorant ! » Se lamenta la vieille femme en haussant le ton. « Oh que va dire votre grand père en l’apprenant… Je savais que cette petite vous briserait le cœur et qu’ensuite … ô seigneur, le malheur c’est abattu sur notre famille… Jamais vous n’aurez d’enfants… Dios mio ! » « Maria arrêtez voyons, elle finira par accepter l’idée que nous sommes mariés, que nous allons construire notre vie ensemble et avoir consommé une union déjà célébrée n’a rien … » Il se stoppa net, captant le regard incrédule que Maria dardait sur lui. « Quoi ? » S’étonna t-il en lisant l’incompréhension dans les yeux de sa gouvernante. « Elle ? » Répéta t-elle incrédule. « Tosca… » Il réalisa soudainement qu’ils n’avaient pas eut le même sujet de conversation et qu’un énorme quiproquo venait de lui faire avouer qu’il avait eut des relations sexuelles avec Tosca Dal Cappello … Il préféra oublier cette confidence, espérant que l’information était tombé dans l’oubli suite à la surprise de Maria. « Mais de quoi diable étiez vous en train de parler si ce n’est de cela ? » « Mais de votre accoutrement … j’ai cru que … enfin vous ressemblez à … » Elle semblait gêner, Thybalt laissa son regard errer sur son accoutrement et soudainement, il comprit. Elle avait cru qu’il était gay. Incroyable. Lui, gay. Il partit dans un grand éclat de rire, incapable de retenir le fou rire qui lui chatouillait les côtes. Vexée, Maria croisa ses larges bras sur son opulente poitrine, la mine renfrognée et lâcha. « Non mais regardez vous, on dirait l’un des Village People, je n’aurais pas été la seule à m’interroger ! » Le fou rire de Thybalt redoubla, il dû s’accouder au plan de travail pour ne pas s’effondrer sur le sol et se rouler par terre en se tenant les côtes. « Vous avez cru que j’étais devenu gay ? » Arriva t-il à lâcher entre deux éclats de rire. « Parce que je porte des vêtements trop petit couleur marine ? » Il se demandait comment cette idée avait pu germer dans l’esprit tortueux de sa gouvernante. Il se décida a stopper l’abonnement du câble de la maison le soir même, ou d’installer le contrôle parental pour certaines chaines. « Mais regardez vous ! Vous qui êtes toujours tiré à quatre épingles, on vous dirait échapper d’un de ses clips ou pire encore vous ressemblez à ce jeune homosexuelle dans Glee ! » L’indignation de la vieille femme était plus imputable à l’hilarité du jeune homme qu’à sa tenue vestimentaire. Il filait un mauvais coton. Posant une main « condescendante » sur l’épaule de sa gouvernante il lui assura avec une certaine solennité « Je ne suis pas gay Maria… J’ai simplement … eut un souci de garde robe ce matin. Rien de plus. » Les sourcils de sa gouvernante se froncèrent comiquement. Attrapant un meug de café qui trainait sur l’égouttoir, remplit sa tasse et réalisa qu’il était temps pour lui de battre en retraite avant que Maria ne fasse le point sur ce qu’il lui avait avoué bien malgré lui. « Je serais dans ma chambre… a l’étage si besoin est… Un sandwich sera idéal, pas besoin de sortir l’argenterie. Nous aurons un couvert supplémentaire ce soir… merci Maria. » Il déposa un léger baiser sur la joue ridée de sa gouvernante et s’acharna à progresser « en crabe » jusqu’à la porte de la cuisine. Battre en retraite n’était pas chose aisée avec un pantalon tel que celui là. Un bruit de déchirure se fit entendre alors qu’il accélérait son claudiquement jusqu’à la porte. Il ferma les yeux et se promit d’acheter le même pantalon au colocataire de Tosca s’il arrivait à temps à la porte. Cinq… quatre…trois…deux pas… un de plus et il était libre. Il posa sa main sur le battant, franchit le seuil de la pièce lorsque la voix de Maria claqua derrière lui. « Vous avez quoi ?! » Il était dehors. Enfin. La porte se referma. « Le sandwich, dans la chambre. Mais rien ne presse. » Cria t-il en souriant. Il venait d’échapper bel à un discours moralisateur tel qu’une bonne mamma italienne n’aurait pas manqué de lui infliger. Alors qu’il montait doucement les escaliers une brusque vague de tristesse le submergea. Il se demanda ce que lui aurait dit sa mère… car il aurait parlé de tout cela avec sa mère, elle aurait su quoi lui dire, elle aurait su comme réagir face à la réaction de Tosca. Un sourire s’épanouit brusquement sur son visage lorsqu’il pensa à ce qu’aurait pu être la rencontre en Tosca et sa mère. Rien ne gâcherait cette journée. Déjà la tristesse refluait. Enfin, il faisait son deuil. Un jour il pourrait penser à sa famille sans ressentir cette subite douleur.
(…)
« J’en ai pour une dizaine de minutes… » Soupira Thybalt à même sa peau en tentant de s’échapper de l’étreinte de sa compagne. « Umh… Je croyais que tu ne laisserais rien gâcher cette journée. » Répliqua t-elle en nouant ses jambes autour de ses hanches, le bloquant une fois de plus. Il sourit, secoua la tête et recommença à butiner la gorge de Tosca, cherchant à la faire flancher et dénouer ses jambes, ô combien tentatrices, de ses reins. « Et moi, je croyais que tu devais vérifier des emails. » Se moqua t-il alors qu’elle desserrait sa prise sur son cou. « Plus sérieusement… » Ajouta t-il en laissant ses mains s’égarer à hauteur de sa poitrine menue. Il titilla les pointes sensibles que le frottement de son tee-shirt de coton avait agacées. Profitant de l’abandon de la jeune femme pour se sauver hors du lit. Il déposa un baiser sur sa bouche et s’écarta vivement du lit alors qu’elle se redressait étonnée de s’être laissé avoir. Foutu choque électrique addictif. « J’en ai pour 5 minutes. Si je ne donne pas mon aval à ce projet de loi, mon grand-père est capable de prendre un avion pour venir voir ce qui me retient … Et là la journée sera vraiment gâchée. Je suis en train de faire campagne, même si officiellement je suis ici dans le but de monter mon équipe, si je ne remplis pas mes obligations sénatoriales, je risque de devoir rentrer très prochainement pour me faire botter les fesses par le président du Sénat. » Il la repoussa doucement sur le matelas et lui posa sur les genoux son Mac. Il agaça son nez du bout de son doigt et sourit de la voir si … affamé. Il ne pourrait décemment jamais se rassasier du corps de sa… femme. Il ne pouvait décemment pas être tenu pour un pêcheur, il avait attendu d’être marié pour consommer une union. « Je reviens vite … Attends moi et nous finirons ce que tu voulais commencer. »
Il ne pu pas éviter le regard désapprobateur de Maria lorsqu’il passa devant la cuisine, dont la porte était ouverte, vêtu uniquement de son boxer et de son tee-shirt de coton. Il lui adressa un sourire rayonnant en guise de réponse. Dès qu’il aurait le temps, il ferrait livrer un énorme bouquet de fleur à la maison destiné à sa nourrice. Elle serait calmée si tôt qu’il lui présenterait ses excuses pour avoir découché et perdu sa vertu à un âge auquel la plus par l’avait déjà perdu depuis une dizaine d’année. La porte de son bureau était ouverte, un plateau garni de deux tasses de café y trônait, signe que Maria n’était finalement pas si hostile que cela à la présence de sa « femme » dans la maison. Il brancha l’écran de son mac de bureau, acceptant presque dans la foulée la conversation vidéo qui attendait son bon vouloir pour démarrer. « Tu es en retard. » Annonça Giulio avec un sourire. « J’espère que tu as une très bonne raison, et que cette raison est brune, petite et a un sens de l’humour discutable. » Thybalt se servit une tasse du délicieux café de Maria en souriant à son grand père. « Pour le sens de l’humour discutable, tout est une question de goût. » Commenta t-il en s’emparant du dossier qui trônait sur sa table de travail. Un petit sourire joua au coin de ses lèvres lorsque le dernier trait d’humour de Tosca lui revint à l’esprit. « Oh… » Souffla Giulio avec un sourire goguenard. « Oh oh. » « Quoi ? » S’insurgea Thybalt en souriant, sans relever les yeux, il commença la lecture du projet de loi qu’il devait ou non parapher dans la matinée et faire renvoyer à Rome. « Je connais ce petit sourire. Ta sœur avait le même, à mon grand damne, lorsqu’elle découchait… Je suis heureux pour toi. Tu t’es enfin destiné à offrir un petit fils ou une petite fille au grand père que je suis ? » Thybalt secoua la tête en souriant, se plongeant dans les premières pages du rapport que Giulio lui avait fait mander. « Je ne compte pas discuter avec toi de ma vie privée. » Commenta t-il en commençant à annoter le projet de loi. « Mais tu reconnais avoir une vie privée. » Remarqua son grand-père en l’observant. « Je rêve où tu n’es pas habillé ? » « Tu ne rêves pas. » Répondit distraitement son petit fils en tournant une nouvelle page. « Ce projet de loi est bourré de contre directive. Je savais que la Sénatrice Visconci allait essayer de faire passer quelques unes de ses idées mais pas comme cela… C’est ridicule. » « Oh Thybalt je me fiche de ce projet de loi. Ce que je veux savoir c’est pourquoi tu n’es pas habillés à près de deux heure de l’après midi ! » Il détaillait son petit fils en souriant, heureux qu’enfin une page ce soit tourné pour lui, et entre eux. « J’ai parlé avec Maria. Elle réclame que je fasse insonoriser ta chambre si tu dois passer plus de quelques mois à Vérone. » Ajouta t-il goguenard en dévisageant son petit fils en attente d’une réaction quelconque. Thybalt rougit à peine, gribouillant dans la marge de son rapport. « Tu ne nies même pas. Seigneur mais mon petit tu ferrais bien de changer l’axe de ta campagne à ce rythme là. » « Techniquement je ne dévie pas de l’axe de ma campagne… Je suis marié. » Lui rappela t-il, preuve qu’il écoutait tout de même ce que lui disait son grand père. « Et mes devoirs d’époux me pressent de terminer rapidement cette « mission » pour éviter la colère de ma tendre et impulsive épouse. Si tu veux des petits enfants il serait judicieux de me laisser travailler sinon la tigresse risque de s’en prendre à mes parties intimes. » « Parties intimes ? » S’étonna Giulio. « Tu sais de nos jours je crois bien que l’on dit bijoux de familles mon petit. » « Sémantique quand tu nous tiens. » Marmonna le jeune homme alors que le silence se faisait de l’autre côté de l’Italie.
(…)
« Je te jure que ce n’est pas ce que tu crois. » Articula lentement Thybalt en la voyant se saisir d’une poêle à frire. « Pose cette poêle tu veux ? »
5 MOIS PLUS TOT
« Thybalt ? » Le jeune homme sortit le nez de son contre rendu. Son jeune « maitre » était d’une humeur inégale ces derniers temps, impossible de prévoir les phases de dépression ou de suractivité, il passait parfois plusieurs jours sans mettre le nez dehors et a contrario le lendemain se démenait pendant deux jours auprès des autorités juridiques de la ville, accomplissant sa mission d’élu. Un comportement dans lequel Maria reconnaissait les affres du désespoir amoureux. Elle avait envisagé d’aller dire sa façon de penser à Tosca Dal Cappello, de lui apprendre ce que devait faire une bonne épouse pour contenter son mari, et pour lui apprendre l’état dans lequel se trouvait « son petit » parce qu’elle n’était pas capable de se rendre compte qu’elle seule comptait aux yeux de son « garçon » et qu’importe que dans les journaux on le voit au bras d’une amie de sa sœur à une soirée huppé ! Thybalt avait des devoirs, dont celui d’exhausser son souhait à elle, de faire en sorte que leur relation reste un secret pour tous. Elle avait manqué de se rendre à la Casa pour une bonne fessée déculottée à la jeune femme mais, elle avait finalement décidé de les laisser régler leurs problèmes, au prix d’un effort surhumain. Néanmoins elle avait trouvé comment forcer le jeune homme à sortir de son apathie. Giulia Mariotti était la nièce, de la nièce de Antonia, la fille de la petite sœur d’un certain âge à présent de sa meilleure amie. Cette petite était un véritable petit génie, brune aux yeux candides de quinze printemps, elle était promit à un avenir universitaire brillant. Passionné d’histoire elle s’était attaquée à la tâche titanesque d’écrire une histoire de la ville, se basant sur le mythe de Roméo et Juliette, « R&J la naissance d’une légende urbaine » voila comment elle avait présenté la chose sur la page de garde. La famille Andreotti possédait une impressionnante bibliothèque ainsi que des archives complètes sur la ville, des œuvres originale et rarissime conservées en partie dans le bureau de Thybalt. Thybalt avait lu tout ce qu’il était possible de lire sur Vérone et son histoire, passionné par la littérature il connaissait mieux que personne l’organisation de la bibliothèque. Il avait besoin de compagnie, de quelque chose pour lui occuper l’esprit. Le jeune sénateur releva la tête lorsqu’elle l’appela pour la deuxième fois. Il haussa un sourcil étonné en découvrant une version adolescente de Suri Cruz au côté de sa gouvernante. « Vous vous souvenez, je vous avais parlé de Giulia Mariotti, la jeune femme qui souhaitait avoir accès à la bibliothèque.. Votre bibliothèque. » Souligna t-elle en le foudroyant du regard, se rendant compte qu’il ne faisait pas le lien, il avait « oublié » une fois de plus ce qu’elle lui avait pourtant rappelé deux jours plus tôt. « Oh bien sur ! Giulia ! » Il se leva, laissant sa canne sur le coin de son bureau, il avança doucement en direction des deux femmes. « Bienvenue. Maria m’a parlé de ton projet d’étude. Tu as frappés à la bonne porte. » Annonça t-il en souriant. Il lui tendit sa main que la jeune fille ne sembla pas remarquer tout de suite, perdue dans les yeux azurs du sénateur. Rougissante elle sera sa main dans la sienne. Maria leva les yeux au ciel en contemplant « son petit » qui n’avait pas du tout conscience de l’effet qu’il avait sur les plus jeunes et les moins jeunes. « Umh… Où va-t-on te mettre ? » Se grattant le menton où fleurissait un début de barbe naissante, il pivota sur lui-même contemplant son bureau passablement encombré. « Umh...Umh » Soudainement il s’avança jusqu’à une table de travail qu’il débarrassa en un tour de main de tous les rapports qui le recouvrait. « Voila qui est mieux… Te voila chez toi. » Annonça t-il en se tournant vers elle un sourire éclatant sur les lèvres. Maria se gargarisa intérieurement de ce succès.
(…)
La journée avait été longue. Cet aller-retour à Rome l’avait épuisé. Alors que la Berline filait en direction de la Citta Antica, Thybalt passait les derniers coups de files nécessaires à la clôture d’un vote en faveur de son parti. La nuque raide il sortit de la berline avec l’aide d’André. Le vieil homme lui adressa un sourire chaleureux comme pour lui signifier qu’avoir besoin de l’aide d’un ainé pour s’extraire d’une voiture basse n’était en rien une honte. Thybalt se saisit des deux béquilles qui avaient remplacés la canne de marche lorsque la douleur dans ses muscles s’était réveillée une semaine plus tôt. Il était d’une humeur massacrante pourtant en pénétrant dans son bureau il se força à sourire, l’adolescente qui se tenait perchée sur une échelle le long de la bibliothèque ne remarqua pas que ce rictus était forcé ou qu’il n’avait pas réchauffé ces yeux.
« Bonsoir Giulia. » Elle lui rendit son sourire en redescendant de son perchoir les bras chargés d’ouvrages, elle le déposa avec délicatesse sur sa table de travail alors qu’il claudiquait jusqu’à son bureau. « Bonsoir Monsieur Andreotti. » Elle lui adressa un sourire tremblant, de toute évidence elle hésitait sur la conduite à tenir. Cela faisait plusieurs semaines qu’ils cohabitaient dans ce bureau. Silencieuse et appliquée la jeune fille ne lui adressait que rarement la parole. Il avait tout fait pour la mettre à l’aise, il avait parfois aidé lorsqu’elle peinait, traduisant sur ses heures de repos des textes en italien médiéval, remerciant sa sœur d’avoir mené à bien des études de littérature et de langues. « Thybalt. » Corrigea t-il en se massant la nuque du bout des doigts. « Tu sembles préoccupés, besoin d’un peu de d’aide ? » Il était las et pourtant, il jouait le rôle de « grand frère » que Maria lui avait attribué des semaines plus tôt. « Vous avez l’air fatiguez et … » Commença t-elle en dansant d’un pied sur l’autre. « Je vais demander à Maria de me préparer un peu de café et une tasse de chocolat chaud pour toi, et nous discuterons. J’ai besoin de me vider l’esprit de tous ces débats politiques de la journée… Quoi de mieux que de plonger dans l’Italie du moyen-âge pour cela… » Le sourire de la jeune fille se fit plus franc et sure d’elle, Giulia s’empara d’un petit carnet de cuir usé par les années qu’elle posa sur le bureau du jeune sénateur. Elle se jucha sur une chaise en face de lui, de l’autre côté du bureau. « Qu’est ce que s’est ? » Demanda t-il après avoir passé commande à Maria via son interphone, en contemplant le carnet de bord ancien qu’elle avait posé entre eux. « Je n’ai jamais vu ce livre dans la bibliothèque. » Ajouta t-il après avoir passé mentalement au crible les rayonnages. « Je l’ai trouvé dans une chambre en haut… » Avoua t-elle en se tordant les mains. « Une chambre quelle…. » Le visage du jeune homme se crispa soudainement avant de se détendre. « Maria t’as laissé le passe de l’étage… » « Je me suis trompée de porte et … » « Ce n’est pas grave. Je suis incapable de rentrer dans cette chambre … Je ne peux pas te reprocher ta curiosité… Tu l’as trouvé … » « Dans la bibliothèque, je cherchais l’édition de Roméo et Juliette dont vous m’avez parlé… Maria m’a dit qu’il se trouvait probablement dans une des chambres. En fouillant, je suis tombé sur ce livre derrière une édition de la Bible… Je l’ai feuilleté et j’ai pensé que cela pourrait vous intéresser. » Il lui sourit et posa une de ses mains sur la sienne pour qu’elle cesse de martyriser ses mains. « Ce n’est pas grave Giulia. Cette chambre n’est pas un tombeau, encore moins un sanctuaire… Je t’ai autorisée a fouillé chez moi, tu n’as rien fait de mal. Parle-moi de ce livre. » Ajouta t-il en voyant qu’elle n’en démordait pas malgré sa gentillesse. Un jour il lui faudrait enter dans la chambre de sa sœur à l’étage. Il attira le recueil à lui et data aussi le manuscrit dans la case « ancien ». « Tournez les pages avec délicatesse. » Lui ordonna t-elle, tirant un sourire amusé à Thybalt son ainée d’une dizaine d’année. Un sourire qui s’effaça en voyant que certaines pages avait été arraché. « C’est de l’anglais … » Constata t-il en déchiffrant les premiers mots de la première page. « Carnet de bord de Willy Pears. » Lu t-il en suivant du doigt la première ligne. « Willy Pears… » Répéta t-il alors que ce nom lui rappelait étrangement quelque chose. « Je l’ai feuilleté rapidement, cependant … » Elle tourna quelques pages. « Ceci à attiré mon attention. » Elle lui désignait de multiples esquisses au crayon qui égrenaient les pages. « J’ai vu d’autres dessins comme ceux-ci dans votre bureau et… » Thybalt n’en revenait pas, sous ses yeux, le visage de Tosca Dal Cappello dessiné par un homme au début du siècle dernier. « J’ai pensé que c’était probablement un héritage familial perdu … Je voulais… » « Tu as bien fais… Très bien fais… » Marmonna t-il en examinant le dessin de la femme vêtue d’une robe au drapé compliqué typiquement du dix neuvième siècle. « Merci… Tu ferrais peut être mieux re rentrer chez toi… Il est tard. »
DE NOS JOURS
« Tu... Quoi ? » Etonnée elle se tourna vers lui, la casserole à la main. Maria n’avait pas appréciée de se retrouver mis à la porte de sa cuisine, mais le sourire lui était revenu lorsque Thybalt lui avait offert, à elle et à son mari, la réservation au restaurant qu’il avait fait pour Tosca et lui. « Tosca pose cette poêle s’il te plait. » Répéta t-il en lui faisant lâcher pise sur le manche. Elle préparait du pain perdu en guise de dîner, un plat dont Thybalt raffolait lui avait confié Maria avant de s’en aller. Il l’enlaça et posa la tête sur son épaule et répéta ce qu’il venait de dire. « Un homme au Etats Unis, a Gettysburg à dessiné ton visage … au début du 19ème siècle. Il parle de … de Vérone. Une ville où il n’avait jamais mis les pieds. Puisqu’il était un immigré irlandais venu chercher du rêve dans les Amérique. Et je ne sais pas pourquoi ma sœur était en possession de ce journal. Vraiment pas. » La découverte de ce journal quelques semaines après leur grande dispute avait mis en émoi son esprit. Il manquait trop de pages pour comprendre l’intégralité du récit et certaines phrases avaient été partiellement effacées par les passages du temps. Il avait confié le journal à une amie de Reena, une conservatrice travaillant sur les sites archéologiques de Rome en espérant qu’elle puisse restauré le plus de passage. Les mots « Vérone », « rêve », « Juliette et Roméo », surgissaient plusieurs fois, de plus en plus souvent vers la fin de l’ouvrage. Qu’est ce que tout ceci voulait dire…
Tosca J. Dal Cappello
FORBIDDEN FRUIT — Cause the morning always come to kill the dream —
■ Messages : 5364 ■ Age du Personnage : 24 ans ■ Logement : Casa di Giulietta, rien de moins ! ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Dim 3 Avr - 0:11
« Willy Pears ? » Demanda-t-elle, songeuse, en glissant sa joue contre le torse masculin, sans même noter que quelques secondes plus tôt, elle avait dans l’intention de lui enfoncer le crâne à coup de casserole, mais qu’il avait suffit que ses mains glissent sur sa taille et viennent se nouer dans son dos, pour que toute intention de meurtre soit remplacée par un besoin vital de tendresse. « C’est pas le nom d’un bar, ça ? » « Un bar ? » L’interrogea-t-il à son tour, une de ses grandes mains s’enfonçant dans ses cheveux, prenant plaisir à écarter ses doigts pour laisser les mèches brunes glisser entre eux. « Oui. Tu sais, le bar dans Borgo Milano, à l’angle de la via Santa Maria, pas loin du stade ? » Elle venait de prendre appui de son menton contre son torse, se rompant le cou afin de l’observer en parlant. « Le Willy Shake, tu veux dire ? » La reprit-il. Elle fronça le nez, semblant réfléchir au nom qu’il venait de lui donner, le retournant plusieurs fois dans son esprit, puis satisfaite de la façon dont il sonnait, hocha la tête, et se remit en position, joue contre torse. « Et comment tu connais ce bar ? » Insista-t-il en enroulant une boucle autour de son index, l’air de rien, comme s’il s’agissait de la question la plus anodine du monde. « Je suis née ici, je te rappelle… Et accessoirement, j’y ai fêté la Saint Valentin. » Le sentant se raidir contre elle, et pas la partie la plus satisfaisante de son anatomie, elle ajouta : « Enfin j’ai fêté l’anti-Saint Valentin. Ils nous filaient des pistolets à eau à l’entrée et une liste de mots interdits, et le premier qui prononçait genre « saint valentin » ou « amour » ou des trucs du style, se retrouvait avec une multitude d’armes vertes et jaunes fluo braquée sur lui. D’ailleurs, l’organisatrice c’était la nana du tramway. Tu sais, celle avec le chien ? Comment elle s’appelle, déjà ? Elle a un prénom à la con… » « Lennon. » Grinça-t-il entre ses dents. « Ouai, voilà, Lennon. En me voyant elle m’a fait passer devant tout le monde et m’a demandé de tes nouvelles. Tu la connais depuis longtemps ? » « Assez longtemps, oui, mais c’est pas très intéressant. En tout cas, moins qu’un dénommé Willy qui s’est amusé à te dessiner plus d’un siècle avant ta naissance, non ? » Tenta-t-il de la relancer sur le sujet, tout en évitant soigneusement celui de Lennon. Du deux en un quoi. « Ca ne t’intrigue pas ? » « Hum… bof. Pas plus que toi me dessinant sans me connaître. Pas plus que la statue de Juliette dans ma cour qui me ressemble trait pour trait tout en ayant été sculptée dans les années 50, ni que les nombreux tableaux représentant la dite Juliette et qui ont comme un air de ressemblance avec moi. Je dois avoir un visage très quelconque en fait. » Haussant les épaules pour se donner un air encore plus nonchalant, elle resserra son étreinte autour du corps masculin, soupirant d’aise à son simple contact. « Ton visage est loin d’être quelconque, crois-moi, je sais de quoi je parle, et quand bien même, la question n’est pas là. Il n’avait jamais mis les pieds à Vérone et pourtant il en parle. Il parle de Roméo et Juliette aussi, et… » « Il s’appelle Willy Pears ! » Le coupa-t-elle gentiment. « Crois-moi, si je m’appelais Jane Osten, moi aussi je parlerais de Pride & Prejudice dans mon journal de bord. » « Et tu y décrirais aussi les rêves étranges que tu fais ? » Demanda-t-il, l’air de rien. « Quel genre de rêves ? » Il avait piqué sa curiosité. Elle avait détaché son visage de son torse, et s’était suffisamment reculée pour l’observer en haussant un sourcil. « J’ai gardé des photocopies du document… » Annonça-t-il en amorçant le geste de s’éloigner. Mais alors qu’il tournait les talons pour aller dieu sait où, elle glissa un index dans l’élastique de son boxer pour le retenir. « Hep ! Tu vas où, là ? » « Chercher les documents. » Répondit-il totalement innocemment. « Ca peut attendre. D’abord y a le câlin. » L’informa-t-elle en le tirant par le tee-shirt pour qu’il revienne jusqu’à elle. Il se laissa faire sans broncher, au contraire, esquissant même un sourire en venant arrimer ses bras autour d’elle. Ses doigts accrochés à son tee-shirt, son front posé à hauteur de son cœur, elle souhaitait juste qu’il la ferme cinq secondes pour qu’elle profite de ça. Oui, juste ça, rien d’autre, une étreinte toute simple et innocente, le genre de geste que l’on fait machinalement, qui ne signifie pas forcément grand-chose, et qui pourtant, à ses yeux, revêtait une importance capitale, un plaisir presque interdit, quelque chose qu’elle s’autorisait enfin mais avec un sentiment d’urgence sous-jacent qu’elle ne s’expliquait pas. C’était comme si chaque seconde devait être vécue avec autant d’intensité qu’une année complète dans la vie d’un couple normal. Couple. Ce mot la dérangeait et la terrifiait en même temps. Est-ce qu’ils formaient un couple ? Oui et non. Oui parce qu’elle était mariée à cet homme, qu’elle lui avait prit sa virginité –Ô Seigneur, elle se faisait l’effet d’un pauvre mec abusant d’une jeune et naïve pucelle –, qu’elle l’aimait tout simplement, et parce qu’elle ne s’était jamais sentit aussi légitime dans les bras d’un autre. Et non, parce qu’officiellement, le seul couple qu’elle formait était avec Matteo. Matteo à qui elle était toujours fiancée, et dont l’engagement avait plus de poids, à ses yeux, que le mariage blanc qu’elle avait fait avec Thybalt. Oui, ses fiançailles étaient plus importantes que son mariage, parce que son mariage n’avait eu lieu que pour accéder à des documents, alors que celui qu’elle avait prévu avec Matteo était d’une toute autre nature. Demander le divorce ou l’annulation de son mariage avec Thybalt était plus facile que d’annuler celui avec Matteo. Pourtant, il allait falloir faire quelque chose. Angoissée par ses pensées parasitaires, elle resserra l’étreinte de ses bras autour du buste de son amant tout en reposant sa joue à plat contre son torse. Il du sentir son besoin d’apaisement puisque, presque immédiatement, il glissa ses doigts dans ses boucles, tout en posant ses lèvres sur le sommet de son crâne. Outre l’habituelle chaleur qui se propagea dans son être, sentir son souffle dans ses cheveux, et ses doigts s’enrouler autour de mèches brunes qu’il choisissait avec soin, lui apporta ce bien-être dont elle avait si incroyablement besoin. Il n’était plus seulement question d’un phénomène complètement dément et incontrôlable qui les électrocutait à chaque fois qu’ils se touchaient, c’était au-delà de ça, le simple fait que ce soit lui, là, la protégeant, la câlinant, la réconfortant, faisait que tout ce phénomène prenait un sens et une ampleur encore jamais atteinte. A présent, elle en était certaine, il aurait été capable de l’apaiser même sans l’aide de ce courant électrique. Elle glissa ses mains sous son tee-shirt, dans son dos, pour frôler sa peau, et en le sentant frissonner sous ses doigts, elle en éprouva un plaisir presque sadique. Elle aimait avoir ce pouvoir-là sur lui, consciente qu’il ne pourrait jamais espérer ressentir ça avec personne d’autre. Il l’attrapa par la taille pour la soulever de terre et l’obliger à grimper sur le plan de travail, comblant de ce fait les quelques centimètres qui lui manquait à elle pour être à niveau. Son nez vint se frotter contre le sien, tandis qu’il tournait autour de ses lèvres, tel un prédateur avide. « Juste un câlin ? » Demanda-t-il avec espoir, dans un souffle chaud. « Seigneur, j’ai créé un monstre ! » S’exclama-t-elle avec théâtralité tout en ôtant ses mains de sa peau pour les reposer très sagement sur le tee-shirt. Et dire qu’il était encore vierge il y a moins de 24h, et qu’à présent il était prêt à l’assaut au moindre effleurement de ses doigts sur sa peau. Elle esquissa un sourire avant de lover son visage dans son cou. Et de par ce simple geste, elle se soumettait une fois de plus. Pas à lui, non, mais à ce grand tout qui l’obligeait à se comporter de la sorte, ce grand tout contre lequel elle avait lutté sans relâche avant de comprendre qu’elle avait beau fuir, elle n’irait jamais nulle part, qu’elle aurait beau courir, elle n’aurait jamais nul endroit pour se cacher. Ils étaient comme les deux éléments d’une même entité, un assemblage de pièces qui ne formaient qu’une seule et même chose. Elle, son sale caractère, sa tendance au silence ou à l’excès de paroles, son aversion profonde envers la foule, sa petite taille, ses émotions en dent de scie, ses coups de gueule et ses éclats de voix, son hyperactivité, et lui, son calme légendaire, son talent d’orateur, son âme de meneur, son imposante stature, son self-control, sa passivité. Ils étaient tellement incompatibles, que cela en devenait presque trop étrange, comme si chacun avait hérité des qualités permettant d’annihiler les défauts de l’autre. « Juste un câlin… » Répéta-t-elle finalement, souriante, en sortant le nez de son cou. « Le meilleur des câlins. » Avoua-t-elle alors qu’il se montrait d’une tendresse à faire pleurer de jalousie une licorne pétant des papillons.
❧
« Je trouve rien !! » Se plaignit-elle en envoyant un coussin valdinguer par la fenêtre ouverte, tandis que l’homme allongé sur le ventre gardait les yeux rivés sur l’endroit où venait de disparaître l’objet. « Maria ne va pas être contente. » Se contenta-t-il d’annoncer, très calme, avant de jeter un regard amusé à sa compagne assise à ses côtés, une jambe repliée sous elle, tandis que l’autre s’étendait devant, s’appuyant sur sa cambrure de rein à lui. « C’était pas la fenêtre que je visais. » lui répondit-elle comme si c’était explication suffirait à calmer une gouvernante qui serait totalement en droit de ne pas apprécier retrouver ses coussins brodés dans les plants de rosiers. « Et puis c’est parce que ça m’énerve !! » Ca aussi c’était le genre d’explication qui ravirait la vieille dame. « Tu espérais réellement trouver un article wikipédia sur un pauvre type ayant vécu en 1860 à Gettysburg, mon ange ? » Mon ange. C’était son nouveau surnom. Et bizarrement, ça ne sonnait pas niais dans sa bouche. Au contraire, ça sonnait juste, comme s’il venait de mettre le doigt sur quelque chose qui leur échappait encore totalement. Et puis il y avait sa façon de le dire, sa façon de le prononcer. C’était comme une provocation. Pas une provocation envers elle, non, une provocation envers quelqu’un d’autre, quelque chose d’autre, comme s’il se montrait rebelle et insolent en l’appelant ainsi, en la promulguant au titre d’ange. Et bizarrement, ça lui plaisait à elle aussi. Elle ne comprenait pas pourquoi, lui non plus certainement, mais elle adorait cette sensation d’enfreindre une règle inconnue dictée par une personne inconnue. Etrange sensation, mais elle n’en était plus à une bizarrerie près. « Non, mais… On sait jamais, j’aurais pu trouver quelque chose en ligne, il doit bien exister des descendants de ce Willy à Gettysburg, tu crois p… » Et brusquement elle s’interrompit, semblant faire un lien qui lui avait échappé jusque là. « Putain ! » S’exclama-t-elle en le faisant sursauter. « Gettysburg ! » Il avait tourné la tête vers elle, se dévissant le cou pour la scruter avec curiosité et une pointe d’inquiétude. « C’est quoi la date ? » « Quelle date ? » « La dernière date à laquelle il a écrit ! » Cria-t-elle presque en pianotant furieusement sur le clavier du mac qui lui chauffait les cuisses. « Hum… » Un tas de photocopies étalé devant lui, il fouilla, plissa les yeux sur chaque en-tête, cherchant la date rendu presque illisible par cette écriture patte de mouche. « Juin 1863. Mais j’arrive pas à voir le jour exact. » « C’est ça ! Putain, on risquait pas de le retrouver ton Willy Pears ! » Ne cherchant même pas à lui poser la question, il se contenta d’hausser un sourcil interrogateur, l’invitant à lui expliquer d’elle-même. « Juillet 1863, bataille de Gettysburg , Thyb ! Je cherchais un vieux papy de 70 ans qui serait mort dans son lit entouré de ses petits-enfants, alors qu’en fait il s’agissait juste d’un des milliers de soldats morts sur le champ de bataille. Il devait avoir quoi… » Tout en réfléchissant, elle releva le regard vers lui, un regard où se mêlait incrédulité et inquiétude. « … ton âge. » Acheva-t-elle en luttant pour refouler toutes les idées funestes qui pointaient à la lisière de son esprit. « Enfin bon. » Enchaina-t-elle très rapidement, craignant que son esprit à lui s’avère aussi nébuleux que le sien. « C’est donc pas avec ces informations qu’on trouvera quelque chose sur notre Willy. Y a quoi d’autre à se mettre sous la dent ? » Demanda-t-elle en reposant le mac sur le matelas, pour venir s’allonger aux côtés de son amant, et l’aider à fouiller dans les photocopies à l’affût d’un indice quelconque. « Alors, on a quoi ? » Reprit-elle pour elle-même en s’emparant d’un feuillet avant de planter ses dents dans une épaule toute proche. Oui, comme ça, juste comme ça, pour le plaisir et poussée par une pulsion cannibale assez incontrôlable. Et vu le sourire qu’il lui lança en réponse, ce geste ne semblait pas le déranger le moins du monde. « Tu trouves ce que tu veux ? » Demanda-t-il avec son air faussement innocent. « Oui, oui. » Elle gigota un moment avant de trouver une position confortable, allongée sur le dos, la feuille maintenue en l’air au-dessus d’elle. Immédiatement une main masculine vint s’écraser contre sa face. Oui, comme ça, juste comme ça, pour le plaisir, avant que des dents ne se plantent doucement dans son cou. La réponse du berger à la bergère, évidemment. « Laisse-moi travailler ! » S’insurgea-t-elle en faisant claquer ses dents à quelques centimètres de son nez feignant de vouloir le mordre. Pour toute riposte, il s’empara de la feuille qu’elle avait toujours en main, et la leva bien au-dessus de la jeune femme, l’empêchant de la récupérer si elle ne levait pas ses fesses pour ce faire. N’ayant aucunement l’intention de changer quoique ce soit à sa confortable position, elle se contenta de promener un index sur le flanc de monsieur, agaçant ses côtes de la pointe de son doigt, faisant osciller le papier à mesure qu’il tentait de résister. Evidemment, il tenta une riposte, mais avec une seule main de libre et les côtes malmenées, il n’était pas vraiment en position de faire grand-chose. Pourtant il tenait bon, et le papier restait inexorablement hors de portée de la jeune femme. Elle tenta de se grandir, et pour se faire lui grimpa à califourchon sur le dos, tendant son bras au maximum pour attraper cette foutue photocopie. Oui, d’accord, elle aurait très bien pu en prendre une autre sur le matelas, mais c’était une question de fierté vous voyez ? Elle chercha à tirer sur son bras, à s’y pendre comme un poids mort histoire de le faire céder, mais bon… vous avez déjà testé la force dans les bras d’un ancien handicapé ? L’enfoiré ! Elle voulu le mordre à nouveau, mais quoi qu’elle fasse elle ressemblait plus à un chaton en colère qu’à la dangereuse fiancée de Dracula. Alors elle se laissa retomber les fesses dans sa cambrure de reins en soupirant. Elle venait de brûler 1200 kcalories, mais elle n’avait absolument pas récupérer ni son papier, ni sa fierté. C’est alors que lui revint à l’esprit la seule et véritable façon de faire céder un mec, le seul et véritable pouvoir de la femme sur l’homme… : LE SEXE ! Alors, de la manière sensuelle et presqu’innocente de celle qui est fatiguée et a besoin de se reposer un peu, elle alla s’étendre sur lui, laissant son buste caresser le dos nu de son amant sous elle. Ses lèvres vinrent frôler son cou, butinant doucement, s’attardant sur cette partie douce juste derrière son oreille. « Qu’est-ce que tu fais ? » ânonna-t-il, la feuille oscillant de plus en plus dangereusement au-dessus de sa tête. « Je trouve un moyen plus agréable de transpirer, pourquoi ? » Sa voix chaude n’était plus qu’une invitation à la luxure, elle en avait conscience, et ça lui plaisait. Jamais encore elle n’avait eu le sentiment de pouvoir être considérée comme une prédatrice sexuelle, elle ne s’était jamais trouvée ni très séduisante, ni même jolie, aussi se contentait-elle plutôt de subir et apprécier les assauts de Matteo au lieu de les provoquer. Elle se serait sentie ridicule. Alors qu’aujourd’hui, même sa voix semblait différente. Elle osait. Elle était. Elle aimait. « Serait-une tactique sournoise pour… » Commença-t-il avec méfiance avant d’être interrompu par ses lèvres se collant aux siennes. Il ferma sa gueule et entrouvrit les lèvres pour lui rendre ce qu’elle lui offrait. Son corps se désolidarisa du sien, glissant de côté pour pouvoir lui faire face, tout en amortissant sa descente de son dos, de son bras autour de son buste. Une jambe nue s’enroula autour d’une hanche masculine, une main grande et virile se posa sur une joue blanche pour la débarrasser des mèches brunes qui l’encombraient, des doigts fins vinrent désordonner les épis aux reflets cuivrés qui n’avaient pas vraiment besoin de ça. Jamais leurs bouches ne se désolidarisèrent, jamais leurs langues à la langueur insupportable ne cessèrent de se chercher, de se provoquer, de se quereller, et alors que d’une pression légère, la femme obligeait l’homme à se mettre sur le dos et que ce dernier l’attrapait par la taille pour la ramener contre lui, l’obligeant à ne surtout pas s’éloigner plus que nécessaire, une photocopie virevolta en une valse lente et silencieuse jusqu’au sol sans que personne ne lui prête la moindre attention. C’était là la seule erreur de Tosca. Elle n’avait pas pensé qu’en lançant les hostilités elle risquait de se prendre à son propre jeu et qu’elle ne serait plus jamais en mesure de s’arrêter avant que son corps ne soit totalement rassasié. Et là, en l’occurrence, son corps en demandait encore plus, toujours plus. Une main masculine avait glissée sous l’élastique du caleçon qu’elle portait, et prenait plaisir à malmener avec dévotion une fesse délicate. Et dire qu’il y a quelques heures, il avait encore du mal avec l’idée de contempler autre chose que son visage, qu’elle avait presque du le brusquer pour qu’il comprenne que ce n’était pas un manque de respect et qu’elle n’allait pas lui en vouloir de regarder et de toucher. Maintenant, après trois secondes de bouche à bouche, il glissait direct la main dans la culotte… Précoce ? Non. Surdoué ? Certainement. Galvanisé par son désir mêlé au sien, elle laissa ses lèvres glisser de sa bouche à son menton, puis sa gorge et le haut de son torse, ses mains suivant le même parcours en différé. Avec un plaisir non dissimulé, elle poursuivit sa descente, relevant les yeux vers lui, un sourire accroché à ses lèvres trainantes, afin de s’assurer de sa fébrilité à lui. Ha, il faisait moins le malin, là. Et lorsque ses mains arrivèrent avant sa bouche sur les boutons de son jean –Pourquoi avait-il réenfilé un jean ? Pour faire chier le monde semblerait-il.- il sembla contraint de fermer les yeux pour se concentrer, et se contenir ? Les boutons furent vite détachés, et le jean commença simultanément sa descente le long de ses cuisses qui avaient prit en volume musculaire depuis la dernière fois qu’elle avait eu le plaisir de les contempler de si près. Il avait l’air d’apprécier… visiblement. La jeune femme avait glissé en même temps que le jean, et se trouvait, tout comme lui, entre les cuisses de son amant, ses mains s’éternisant sur un bas ventre contracté de plaisir. Ses lèvres, par pur sadisme, vinrent se poser sur un genou, puis remontèrent le long des muscles de la cuisse qui se contractaient à chaque passage de sa bouche. Une main masculine vint se poser sur une des siennes, et les doigts se nouèrent presque automatiquement se refermant en une boule compacte, une boule dans laquelle elle pouvait ressentir la tension dont il était la proie. L’impatience la gagna à son tour, et ses lèvres vinrent explorer l’intérieur d’une cuisse, remontant toujours plus haut en prenant son temps, un temps qui devenait dangereux pour la santé mentale de son partenaire. Elle venait de décider de mettre fin au supplice, de le délivrer de sa torture lorsque ses yeux rencontrèrent une zone plus sombre, juste là, sur le haut de l’intérieur de sa cuisse, une zone sphérique a laquelle elle n’aurait probablement pas autant prêté attention si… « C’est quoi, ça ? » Demanda-t-elle en passant son doigt sur la cible de son interrogation. « humm… » Grogna-t-il incapable de former une phrase avec des vrais mots. « Thyb ! C’est quoi ce truc ? » Insista-t-elle en se redressant sur ses genoux, son visage quittant définitivement la périphérie dans laquelle Thybalt aurait bien souhaité qu’elle reste. « Heu… » Commença-t-il en se redressant sur le coude, se sentant quelque peu ridicule avec sa virilité victorieuse au milieu de tout ça. « Disons que les hommes et les femmes possèdent plusieurs différences anatomiques comme la taille, la force ou la pilosité, mais qu’il existe une différence plus notable et importante, et que cette différence se trouve… là ! » Acheva-t-il en désignant son sexe de ses deux mains en coupe. « Non, je suis sérieuse, Thybalt. C’est quoi cette drôle de tâche, là ? » Insista-t-elle avec sévérité en suivant la courbe plus foncée qui se formait sur sa peau. « Oh, ça ? » Lâcha-t-il après avoir jeté un œil à son tour. « Rien, un truc que j’ai depuis la naissance. Reena appelait ça : mon… oro… orou… » « Ouroboros. » Acheva Tosca, à présent livide. « C’est ça. » Fronçant les sourcils, il se redressa à son tour. « Le serpent qui se mord la queue… » Chuchota-t-elle presque pour elle-même, sans quitter la marque des yeux. Juste une petite parcelle de chair plus colorée, une parcelle de chair qui passait totalement inaperçue, et qui aurait pu le rester encore longtemps si elle n’avait pas justement mit le doigt dessus, au sens propre du terme. « C’est l’occasion de le dire. » Grinça-t-il. « Tu connais ? » Alors elle releva les yeux vers lui, calme en apparence, mais le regard témoignant de son agitation interne. « Un peu. » Répondit-elle, distante, avant de quitter ses cuisses offertes, de s’emparer d’un autre feuillet en se laissant tomber à plat ventre sur le lit, et d’en feindre la lecture. « Tu ne m’en diras pas plus, c’est ça ? » « Voilà. » Un sourire forcé aux lèvres, elle passa une main sur le dos masculin, comptant sur le courant apaisant pour lui faire lâcher l’affaire et, histoire de mettre toutes les chances de son côté, s’empressa de venir chercher sa bouche empêchant, ainsi, toute tentative de riposte. « Bon, on s’y remet ? » Enchaina-t-elle directement en reprenant son souffle et en s’échappant de l’étreinte avide dont il était déjà entrain de la faire prisonnière, s’imaginant surement que… « Heu… Mon ange ? » Tenta-t-il décontenancé alors qu’elle s’était éloignée pour se plonger dans sa lecture, le stylo entre les lèvres. Elle tourna vers lui un regard interrogateur qui lui laissa comprendre que la fête était bel et bien finie. Elle n’avait pas commencée, mais elle était déjà terminée. « Non rien. » Souffla-t-il en étendant le bras pour récupérer son jean. Chaque chose en son temps, et un truc bizarre par jour. Aujourd’hui c’était sauver Willy. Demain on parlerait de serpent et de queue…
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Le regard perdu dans ses fiches, accumulant de la pointe de son stylo des détails qui resteraient probablement sans importance, elle allongea le bras pour atteindre son portable qui faisait vibrer avec lui la quasi-totalité de tout ce qui se trouvait sur la table de chevet. Après les récents évènements au Japon, Thybalt avait eu un sursaut justifié, et avait probablement envisagé d’aller se planquer dans un encadrement de porte avant de voir la jeune femme lever un œil agacé vers la petite chose noire et bruyante, et comprendre, de ce fait, qu’un tsunami n’était pas à craindre. Quoique… Le portable en main, elle hasarda un bref coup d’œil sur l’écran puis décrocha en soupirant, déjà. « Oui Chico ? Non, Chico. Oui, oui, je te confirme que je suis toujours en vie, pourquoi ? Non, je t’assure que ma voix n’est pas bizarre, peut être que la réception est mauvaise, mais c’est bien moi, et je suis… hein ? Tu veux pas essayer de respirer normalement ? Là j’ai un peu l’impression de parler avec le fils spirituel de Darth Vador quand même…. Bah oui, c’est moi, qui veux-tu que ce soit d’autre ? Non je ne suis pas à la Casa, et non tu ne peux pas monter vérifier que je suis bien en vie et que je respire toujours. Mais je te confirme que je suis toujours en vie, hein. Par contre, je dois t’avouer que je songe sérieusement au suicide depuis que j’ai décroché le téléphone quand même… Oui… Oui d’accord. Promis je ferais attention en rentrant… Oui, je regarderais des deux côtés de la route avant de traverser et… quoi ? Une charrette ? Parce que tu crois qu’on croise souvent des charrettes en plein Vérone ? T’as bu ? Oui, oui, OUI ! Ca va, c’est bon ! Oui, je te jure de faire attention aux charrettes avant de traverser la rue ! Satisfait ?... non, m’oblige pas à faire ça, s’il te plait. Non ! Non, Chico, non ! Bon, tu me foutras la paix après ? D’accord… Croix de bois, croix de fer, si je mens, je vais en enfer… Voilà. C’est bon là ? Ok, alors retourne à ta sieste, et rends-moi service, à ton prochain cauchemar débile, oublie-moi. » Sans aucune explication à l’intention de son amant, elle reposa le téléphone sur la table de chevet après avoir mit fin à la conversation, et reprit sa lecture de la prose de Willy. Ce ne fut qu’après une bonne minute de fixation intensive de la part de Thybalt, qu’elle daigna relever les yeux vers lui. « C’était Chico. » Non, sans blague ? « Il a rêvé que je me faisais écraser par une charrette. » Normal. « Du coup, il voulait me mettre en garde contre les charrettes. » Encore plus normal. « Sinon, ça va toi ? » Parfaitement bien !
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« Je crois qu’il ne nous reste plus qu’à prendre la Batmobile et de se taper un petit aller-retour jusqu’à Gettysburg, Bruce. » Soupira-t-elle après une bonne heure de tentative de déchiffrage des photocopies. Elle venait de se laisser choir en arrière après être restée de longues minutes en position assise, le dos douloureux. Tout ce qu’ils avaient c’était deux prénoms et un nom. Willy Pears et une certaine Harriet qui ressemblait étrangement à Tosca. « Ca pourrait être ta jumelle. » Insista une nouvelle fois Thybalt en plaçant un des portraits contre le visage de la jeune femme. Alors d’un mouvement de main un peu brusque elle écrasa la photocopie contre le matelas l’arrachant, au passage, des mains d’un sénateur l’observant avec surprise. « Je suis fatiguée… » S’excusa-t-elle avant de lui tourner le dos pour se rouler en boule sur le matelas, consciente de la faiblesse qu’elle ne voulait surtout pas laisser entrevoir. « T’as pas beaucoup dormi. » Affirma-t-il en venant coller son torse toujours nu contre le dos de la jeune femme, hésitant à l’entourer d’un bras de peur d’avoir à subir un de ses nouveaux coups de flippe. « Sûrement… » Répondit-elle en allant elle-même chercher le bras pour l’enrouler autour d’elle façon ours en peluche pendant un soir d’orage. « Parfois je regrette que tout soit si complexe et… bizarre. Je voudrais juste être Tosca et pas l’illustre descendante de la non moins illustre et imaginaire Juliette, je voudrais pas être une Dal Cappello avec un prénom pourri, j’aurais aimé grandir autrement que dans l’ombre d’une pièce de théâtre. Toute ma vie on m’a murmuré que j’allais trouver mon Roméo en me tirant sur la joue, on m’a prédit un drame à la Shakespeare, on s’est amusé, on a plaisanté à mes dépends, on a rit de moi, on m’a habillé, coiffé, maquillé comme une Juliette, on m’a entouré d’une aura de romantisme écœurant, on a soupiré sur mon passage, on m’a observé avec méfiance, ou au contraire avec un respect qui ne m’était pas du, comme si j’étais elle, comme si j’avais ce même bagage émotionnel qu’elle. On m’écrit. Tu comprends ? Je reçois des lettres de gens que je ne connais pas qui viennent m’expliquer leurs peines de cœur et me supplier d’y trouver une solution. Bien sûr ils s’adressent à la Juliette de Shakespeare, mais en adressant une lettre à Juliette Capulet à la casa, forcément elle m’arrive directement. Déjà le geste en soi est débile, comment une fille se suicidant à 14 ans sur le corps sans vie de son amant peut-elle être de bons conseils sentimentaux ? Et comment une fille n’ayant jamais existé pourrait leur répondre. Comment une fille ayant vécu à la Renaissance pourrait leur répondre ? Ces lettres sont donc pour moi. Je n’y réponds jamais. Que pourrais-je bien répondre, moi qui suis mariée en secret et fiancé en public, moi qui m’électrocute à chaque fois que je te touche, moi qui suis dépendante de ce touché, moi qui ai le sentiment d’avoir fait quelque chose de mal en acceptant de te prendre ta virginité. Pas pour moi, mais pour toi, comme si je t’avais détourné du droit chemin, un peu comme si je venais de séduire un séminariste en lui faisant découvrir les plaisirs de la chaire. La comparaison est débile, mais c’est un peu ce que je ressens, comme si j’avais bafoué ton Dieu en incarnant la tentation. Tête de télé m’a comparé à Eve, il n’avait pas tort. Mais qu’est-ce que j’y peux ? Je fais un pas en avant et trois en arrière. Sauf que les pas en arrière ne sont pas les mêmes pour toi que pour moi. Tu considères mon corps contre le tien comme un pas en avant, et moi comme un pas en arrière. Je te déteste parce que tu compliques tout. Et je me déteste encore plus d’être incapable de résister. Tu as embrassé cette fille et j’ai souhaité ta mort, tu as quitté Vérone et j’ai souhaité la mienne. Pourquoi tout doit-il être si extrême ? Pourquoi ne puis-je pas, tout simplement, te laisser partir ? J’ai pas de place pour toi dans ma vie. Mais quand t’es pas là, j’ai tout simplement pas de vie. Et comme si c’était pas suffisamment compliqué, tu ramènes avec toi des vieux carnets, des croquis, des trucs bizarres qui me fatiguent le cerveau. J’arrive pas à quitter Matteo. Peut être, tout simplement, parce qu’il est la seule chose qui me rattache encore à la normalité. Une normalité qui me fait cruellement défaut ces temps-ci. Mais parallèlement, alors que c’est à lui que je devrais rester fidèle, c’est avec toi que je couche, et lui que je délaisse. Je sais que tu ne m’as pas posé la question et que tu ne le feras probablement jamais, mais… oui, je suis fidèle… à toi. Et ça non plus, c’est pas normal. Parfois il m’arrive de me demander s’il va voir ailleurs, s’il se distrait avec d’autres femmes en attendant que je revienne vers lui, et si l’imaginer dans d’autres bras peut faire mal, c’est assez supportable, alors qu’il me suffit de lire la lettre d’une gamine amoureuse de toi pour péter un plomb et courir jusqu’ici. Pourtant je n’envisage pas une seule seconde d’éclaircir les choses, de rendre cette relation publique, de faire de toi autre chose que mon amant, et accessoirement mon époux secret. Pourquoi ? J’en ai aucune idée, et ça aussi ça me fatigue. Je sais que ça doit rester secret, je le sais, c’est tout. Je dois faire en sorte que tu ne sois jamais complètement heureux, et que je ne le sois pas non plus. Sinon… je sais pas. Et puis j’arrive pas à chasser certains rêves de mon esprit, j’ai peur en permanence. J’ai peur de m’endormir et de rêver encore. Ca fait un mois que je rêve de la nuit passée, de cette aube où tu déboules à ma porte, un mois que je rêve de ce baiser. C’est comme si on avait cherché à me faire garder espoir, à me faire comprendre que ce n’était pas terminé. Mais maintenant que c’est passé, est-ce que mes rêves vont redevenir macabres ? Est-ce que je vais te voir mourir, ou bien j’aurais le droit à ton enterrement ? Est-ce que je vais revoir Julian ? Est-ce que je verrais ton grand-père sur son lit de mort ? Pourquoi je vois tout ça ? Pourquoi est-ce que mon inconscient ne me laisse pas tranquille ? Pourquoi est-ce que je ne peux pas rêver qu’on m’arrache les dents ou que Britney Spears s’invite chez moi pour refaire la déco ? Pourquoi ? » Alors qu’elle cherchait sa respiration devenue difficile par les larmes qu’elle n’avait pas conscience de laisser rouler sur ses joues, un silence de plomb s’abattit sur la pièce. Il l’avait laissé parler sans l’interrompre une seule fois, se contentant de caresser du pouce, le poignet de la jeune femme autour duquel sa main s’était enroulée alors qu’elle lui tournait toujours le dos. Il était tellement rare qu’elle parle ainsi, qu’elle s’ouvre ainsi, qu’elle accepte de laisser entrevoir un peu de sa faiblesse, alors cet étalage soudain en devenait surprenant et presque douloureux. Elle s’était arrachée la poitrine et lui avait envoyé à la tête le fardeau qu’elle portait depuis trop longtemps. Elle n’avait pas tout dit, sa douleur ne pouvant se résumer, même en un long monologue, mais une bonne partie de ses craintes et ses souffrances se trouvaient là, quelque part entre eux. C’était à lui, maintenant, soit de récupérer le fardeau en acceptant de le partager, soit de le laisser là, entre leur deux corps, augmentant le fossé croissant entre eux. « Viens là. » Chuchota-t-il alors à son oreille, en l’obligeant à se retourner vers lui. Elle se laissa faire, malgré son visage ravagé de larmes, au point où elle en était. « Je suis tellement fatiguée. » Chercha-t-elle à s’excuser de nouveau, alors qu’il séchait ses joues du pouce avant de l’entrainer tout contre lui pour la fondre dans une étreinte protectrice. Il pouvait sentir la tension de son corps frêle contre le sien, il pouvait sentir chaque angoisse créer un nœud en elle. Il passa un plat de main dans son dos, défaisant les nœuds du mieux qu’il pouvait. « Je sais… » Murmura-t-il ses lèvres contre son front. « Il faut que tu dormes un peu… Juste un peu. » Ajouta-t-il en la sentant se tendre davantage. «… et je reste là, je ne bouge pas. Si je soupçonne un mauvais rêve, alors je te réveillerais. Mais tu dois dormir, tu ne peux pas lutter contre le sommeil… » Il continuait de murmurer lentement, tout en lui massant la nuque, cherchant à l’endormir doucement. Elle n’avait pas mentit, elle était réellement épuisée, et la rapidité avec laquelle elle cessa de lutter en témoignait. Même attirée par les limbes du sommeil, elle s’agrippait toujours à lui, ses doigts crochetant sa peau, lui arrachant une petite grimace au passage, alors qu’elle se fondait toujours plus en lui. Il n’avait pas mentit non plus, il ne la quittait pas d’une semelle. Après avoir remonté le drap sur eux, il se contenta de récupérer une photocopie pour la relire une énième fois, alors que son autre bras entourait toujours sa compagne, la noyant sous sa présence palpable, sans savoir qui ce geste devait apaiser. Elle ou lui ?
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Elle avait sombré si rapidement et si profondément qu’elle aurait pu dormir pendant des heures. Ce n’était guère que le tout début de la soirée et pourtant, elle était bien partie pour faire sa nuit si un élément extérieur n’avait pas tiré sur le fil de ses songes. D’abord latent, ce détail de la réalité devint de plus en plus présent, dissipant, autour d’elle, le décor fabriqué par son inconscient dans lequel, une fois n’est pas coutume, elle se sentait si bien. C’était tellement rare ces temps-ci qu’elle aurait bien été capable de faire une crise à son réveil complet avec une petite tentative de meurtre envers la personne responsable de ses tourments. Sauf qu’en ouvrant un œil, ce n’est pas le mur blanc habituel de sa chambre qu’elle contempla, mais un torse d’homme contre lequel elle avait allégrement bavé. Enfin, c’est une façon de parler, hein, elle n’avait pas réellement bavé sur lui, faut pas déconner. Passé un premier instant de panique où elle se cru de retour dans la matrice originelle à devoir revivre sa propre naissance, elle se rappela vaguement où elle se trouvait et à quoi correspondait cette étreinte particulièrement imposante. Et bizarrement, son humeur s’en trouva arrangée presque instantanément. Elle remua doucement, juste pour lui signifier qu’elle était réveillée et qu’il pouvait commencer à la dorloter, elle glissa même une main contre son torse pour l’y inciter, lui montrer la marche à suivre pour un réveil tout en douceur. Sauf qu’à la place, il se dégagea rapidement, décollant son torse afin de mieux l’observer et vérifier, de ce fait, qu’il ne s’agissait pas d’une fausse alerte et qu’elle était bel et bien réveillée. Elle tenta un sourire charmant, mais ça ne le fit pas se rapprocher, au contraire, récupérant le bras qui lui cerclait encore la taille, il s’en servit pour prendre appui sur le matelas et s’en éjecter rapidement. « Ouf ! J’ai une de ses envies de pisser ! » S’exclama-t-il en se redressant sur ses deux jambes. « J’ai bien cru que tu ne te réveillerais jamais ! » Ok, sympa le réveil. Un peu éloigné de ce qu’elle avait imaginé, mais au moins ça avait l’avantage de mettre dans l’ambiance direct. Elle l’observa, bouche bée, se précipiter vers la porte, puis disparaître dans le couloir, priant pour être toujours profondément endormie et que tout ceci ne soit que le fruit de son imagination. Mais bientôt, ce qui l’avait rappelé à la réalité se fit entendre à nouveau, confirmant que Monsieur Pipi était bien le pseudo prince charmant avec lequel elle s’était mariée. Se penchant en arrière pour récupérer son portable –car oui, c’était cette vibration très très discrète qui avait finit par la tirer du sommeil- elle finit par sourire, décidant de prendre cette scène avec humour et de passer ses nerfs sur le crétin qui avait osé l’appeler. Finalement, ce n’était pas un appel en absence mais un texto, un texto qui tant qu’il n’avait pas été lu, continuait de faire vibrer le portable. L’abrutit qui avait inventé cette option méritait des claques.
1 NV MSG
CHICO : T’es là ? SCA : Où ? CHICO : Bah là, quoi. SCA : Là où ? CHICO : Sur Terre. SCA : … CHICO : J’ai encore rêvé de toi. SCA : … CHICO : T’étais morte. SCA : Pour changer… CHICO : Je suis sérieux ! SCA : J’en doute pas. CHICO : Donc t’es vivante ? SCA : Jusqu’à preuve du contraire. A moins qu’il y ait du réseau en enfer… CHICO : Hum… SCA : Quoi ? CHICO : Rien. SCA : Dis ! CHICO : Bah… Qu’est-ce qui me prouve que c’est toi ? SCA : Pardon ? CHICO : Je veux dire, qu'est-ce qui me dit que c'est bien toi qui textote et pas ton meurtrier qui t'aurais piqué ton portable ? SCA : Heu… Bah… C’est moi. CHICO : C'est exactement ce que dirait ton meurtrier, ça. SCA : Chico... va te pendre, s'il te plait ! CHICO : Ayé ! J’suis rassuré ! Tu rentres bientôt ?
Elle jeta le téléphone sur le matelas en soupirant, à l’instant même où Thybalt refaisait son entrée dans la chambre en remontant sa braguette. « Bien dormi ? » « Génial ! Et toi, bien pissé ? » « Dis-moi, je voulais te demander… » Reprit-il sans prêter attention ni à sa question ni à son sarcasme. « C’est qui ce ’Chico’ pour toi ? » « T’es jaloux ? » « Non, je suis curieux, c’est tout. » « Oh… Dans ce cas, moi aussi. C’est qui cette Lennon pour toi ? » « Ok, alors parle-moi de l’Ouroboros. » « Alors, tu vois, Chico c’est un jeune homme de 19 ans que j’héberge à la Casa parce que je l’aime bien, et que c’est pas quelque chose que je peux expliquer. Il est chiant, boulimique et un peu exhib sur les bords, assez étouffant et sans cesse en demande d’affection, mais je m’en fous, c’est comme Pâris, j’ai besoin de lui près de moi. » Commença-t-elle a déballer en s’installant en tailleur sur le lit un sourire forcé aux lèvres histoire de faire oublier sa diversion. « Et Lennon ? » « J’ai vraiment pas besoin d’elle près de moi. » Répondit-il en se glissant sur le lit avant de se mettre a avancer vers elle à quatre pattes sur le matelas. Il ne s’arrêta pas en arrivant à sa hauteur, l’obligeant à s’allonger sur le dos, sous lui. « Tu comptes rattraper ton réveil tout moisi ? » Demanda-t-elle en se laissant aller en arrière. Il ne répondit pas, il n’en eut pas le besoin, son regard parlant de lui-même. « D’accord, mais rapide alors, faut que je rentre… » Ouai, enfin ça, visiblement, ce ne serait pas à elle d'en décider. C’était possible de s’opposer à ce regard-là ? Sérieux.
Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
■ Messages : 3716 ■ Age du Personnage : 25 ans ■ Logement : ANDREOTTI; 34 Via Barchetta ; Citta Antica ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
♠ ♠ ♠ ♠ ■ Relazioni & Famiglia: ■ Job: Maire de Vérone ■ Sono : marié(e)
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Mer 18 Mai - 19:47
« Tu peux danser si tu veux. » Thybalt releva les yeux de la contemplation de sa pinte de bière et un sourire amusé effleura ses lèvres. Il était vrai que le second enfant des Andreotti n’était pas aussi « fun » que sa jumelle pensa t-il en jetant un coup d’œil sur la piste de danse. Reena Andreotti s’y trémoussait avec conviction, telle une ballerine elle passait de bras en bras sans sembler toucher le sol, insaisissable et pleine de vie. Thybalt avait apprit depuis longtemps à ne pas couver sa sœur, il était née le premier c’était son rôle de veiller sur sa petite sœur, cependant il savait que Reena était à mène de prendre soin d’elle-même, aucun homme ne la toucherait sans son consentement. Les quelques séances de boxe que leur avait inculqué leur père avait laissé leurs traces sur bien des corps depuis que les courbes de la jeune femme s’étaient épanouies. Le sourire qui jouait sur ses lèvres s’accentua lorsque leurs regards se croisèrent et que Reena se mit à rire. Il tourna alors son regard vers la jeune femme qui était venu le sortir de sa solitude. Grande et blonde, la jeune fille était en réalité une amie de sa sœur. Une de ses filles dont Reena était devenue rapidement très proche et qu’elle avait élu meilleure amie de l’année. Une de ses filles que sa sœur n’essaierait pas de lui « présenter » pour des raisons plus qu’évidente, sa meilleure amie avec son frère …. Beurk. Pour une fois il devait reconnaitre qu’il comprenait pourquoi Reena s’état attaché à la blondinette qui remuait en rythme les hanches tout en buvant le verre qu’elle avait abandonnée près de Thybalt avant de se lancer sur le dancefloor. Il y avait quelque chose de différent chez cette Lennon, elle s’accordait parfaitement à Reena, une joie de vivre aussi vive que celle de sa sœur, mais aussi un grand sérieux dans les yeux de cette jeune fille. Thybalt n’était pas l’exact reflet de Reena contrairement au mythe qui courrait au sujet des jumeaux. Bien au contraire, solitaire et timide, il avait en horreur la foule et le bruit. Comment avait-il réussit à se laisser convaincre de venir dans ce club un vendredi soir ? Il avait voulut faire plaisir à sa sœur. Elle voulait que Rome dans son intégralité la voit danser et rire, s’amuser dans une des boites de nuit les plus à la mode pour qu’Alexander je rende compte de la stupidité de vouloir « faire une pose » avec elle. Pourtant dieu seul savait que Thybalt pouvait comprendre celui qui à coup sur deviendrait un jour son beau frère, Reena pouvait être épuisante mais elle valait la peine que l’on se batte pour elle. Il avait accepté de la conduire en boîte et avait même accepté sans sourcilier de devoir faire un crochet par la maison de sa meilleure amie du moment. Avalant une gorgée de son verre à son tour Thybalt répondit à la superbe blonde sur laquelle une bonne partie des regards étaient braqués. « Reena ne t’as pas prévenu ? » Il ancra son regard dans le sien avec un certain aplomb. Agoraphobe il avait pourtant héritier du charme et du charisme de son père qui le tenait lui-même de son grand père. Sa timidité s’effaçait lorsqu’il se trouvait face à une ou deux personnes, c’était la foule qui l’oppressait, l’impression de porter le poids du monde sur ses épaules. Lennon joua des sourcils l’encourageant à développer alors qu’elle s’accoudait à la table à un pied qui leur servait de repose verre depuis leur arrivée. D’ordinaire les amies de Reena ne l’intéressait pas, elles étaient creuses, leurs QI se reflétait à l’aune de la taille de leur jupe bref … pas vraiment le genre de fille avec qui on pouvait envisager une discutions au sujet du droit ou de la politique, les deux « matières » qui rythmaient l’existence de Thybalt. Si la jupe de Lennon était aussi courte que celles des autres, elle semblait différente. Elle s’intéressait à lui sans pour autant chercher à le séduire, ce qui éveillait l’attention d’un jeune homme qui se savait attirant et qui avait l’habitude de voir les filles se jeter à ses pieds. « Je ne sais pas danser, j’ai deux pieds gauches. » Avoua t-il avec un air mystérieux, une attitude qui lui venait surement des quelques verres qu’il avait déjà bu tout en pianotant sur son PDA. Elle pencha légèrement la tête sur le côté, cherchant à deviner s’il plaisantait ou non. « J’ai vraiment deux pieds gauches. » Réaffirma t-il. « C’est une sorte de malédiction … Le tango, la valse, le tchatcha pas de problème … mais sur ce genre de musique » Il dessina une note dans l’air. « Je suis un vrai clown… » Elle éclata de rire et le prit par la main, le tirant sur ses pieds. « Aller viens, tu ne peux pas ne pas savoir danser sur de la Dance, c’est impossible, tout le monde sait danser là-dessus. » Cria t-elle pour couvrir le bruit de la musique. Elle l’entraina au cœur de la piste, se frayant un passage dans la foule en se déhanchant au rythme de la musique. Sa main dans la sienne elle se tourna vers lui en continuant de bouger harmonieusement son corps. Elle le trouva raide et embarrassé. Il n’avait pas mentit, il était incapable de s’adapter au rythme. Engoncé dans les carcans d’un parti politique réformateur et anti amusement. Elle se rapprocha de lui et colla son bassin au sien. Il esquissa un geste de recul mais ce qu’il lu dans ses yeux le dissuada de voir là une manœuvre d’approche. Elle prit ses mains et les plaça sur sa taille. « C’est comme le tango, il suffit de suivre le rythme. Avant arrière, arrière avant, côté et côté. Voila très bien. Assouplie moi ce dos ! » Il sourit et accorda son rythme au sien. « Bien joué ! Et si tu veux faire stylé je maitrise à fond un truc complètement improvisé tu peux tendre tes bras au dessus des épaules de la fille pour la garder près de toi et en même temps avoir l’air super à l’aise ! » Elle éclata de rire lorsqu’il la fit tourner la renversa et la releva contre lui. « Je crois que je préfère ce genre d’improvisation. » Répliqua t-il. Reena qui s’était adossée au comptoir du bar dès que sa meilleure amie avait entrainé son frère sur la piste de danse. Tout se passait comme prévu. Lennon était exactement ce qu’il fallait à Thybalt, depuis sa rupture avec Cara il était comme … éteint, concentré sur sa future campagne, sur l’obtention de suffisamment de signatures pour se porter candidat au siège à vie de Giulio. Elle avait envie de le voir heureux, épanouie. Et surtout, elle voulait qu’il arrête de rêver sa vie plutôt que de la vivre. Ce n’était pas si compliquée d’après elle, il suffisait qu’une flamme entre dans sa vie et, Lennon avait le feu sacré. Ils s’amusaient. Lennon arriverait à lui faire oublier Cara et cette fille qu’il dessinait. Il avait juste besoin d’un peu de frivolité. Et de sexe. Il ne pouvait pas attendre la femme parfaite. Elle n’arriverait jamais cette fille imaginaire. Il avait … Alors qu’elle levait son verre à ses lèvres son bras se stoppa dans sa course. Thybalt venait brusquement de repousser la jeune femme, son regard flamboyait de colère et sa bouche n’était plus qu’un trait mince. Oh oh oh … Lennon avait dû manquer de subtilité sur ce coup là. En passant près de sa sœur Thybalt lâcha d’une voix glaciale.
« Je n’ai pas besoin qu’on me débarrasse d’un quelconque fardeau virginal. »
(…)
Ouroboros… Ce mot flottait dans son esprit alors que Tosca sommeillait la tête posée sur son torse, les bras agrippés à sa taille. Il n’arrivait pas à oublier l’expression qui était passée sur ses traits, la lueur de panique, de frayeur dans ses yeux. Ouroboros. Ce mot lui rappelait quelque chose, il avait la sensation d’avoir lu quelque chose à ce sujet mais ne se souvenait pas du contenu de ce qu’il avait lu chose étrange qui ne lui arrivait jamais. Il avait reçu en « présent » de la part de ses marraines les bonnes fées, une incroyable mémoire photographique, son cerveau était une véritable banque de données, il gardait en mémoire tout ce qu’il avait pu lire depuis l’enfance. Il avait l’impression d’avoir la définition sur le bout de la langue, pourquoi était-il parcourut d’un frison d’inquiétude à l’entente de ce mot. Doucement il étendit l’un de ses bras pour se saisir de son téléphone posé sur la table de chevet. Merci à celui qu’il avait inventé l’Iphone, le nouveau téléphone était un cadeau de son grand-père, il s’était moqué du sens de l’orientation pathétique de son petit-fils tellement souvent qu’il avait tout de suite pensé à lui lorsqu’il avait découvert l’application SOS sur son propre portable. Thybalt lança une recherche sur Google Books via une application, intrigué de ne pas réussir à se souvenir d’où il avait lu quelque chose au sujet des « ouroboros ». D’ordinaire il serait allé fouiller dans sa bibliothèque mais il devait veiller sur Tosca, lorsqu’elle s’agitait dans son sommeil et commençait à marmonner il caressait doucement son dos nu et murmurait à son oreille des mots tendres qui l’apaisaient. Il feuilletait en ligne différents articles au sujet de la mythologie et ses sourcils se fronçaient au fur et à mesure de sa lecture. Il était troublé. Le destin. Etait-ce cela qui avait déclenché chez Tosca se brusque revirement puis cette crise de larmes ? Elle s’agita dans son sommeil et il se mit à nouveau à chuchoter à son oreille mais non plus des mots sans queue ni tête, soudainement les mots se transformaient en phrases des phrases qu’ils auraient aimés lui murmurer lors de sa crise de larme, de souffrance tout à l’heure.
« Je t’aime Tosca Dal Cappello et pas parce qu’un imbécile a décrété qu’en tant récipient d’air d’une légende tu devais vivre une relation compliqué avec un homme tenace et passionné. Je t’aime parce que la première fois que je t’ai vu, tu es descendu vers moi folle furieuse en prétextant que tu allais envoyer Thybalt me botter le cul. Je t’aime parce que tu es toi, spontanée, vivante, drôle, impertinente et libre. Je savais qu’en m’engageant avec toi la vie ne serait pas facile, parce que je suis un personnage public, parce que tu as été promise à un autre. Mais je t’aime et je crois que cet amour sera plus fort que tout le reste. Je le sens. Tout est compliqué mais c’est le prix qu’il nous faut payer pour être heureux. Si tu savais comme je t’aime. Je ferrais tout pour que notre futur soit à l’aune de cet amour ... Tu es tout ce à quoi j’aspire Tosca. Tout. »
(…)
Lorsqu'ils entrèrent dans la salle d'attente, Thybalt commença à faire quelques exercices respiratoires pour se détendre. Il savait déjà que cela ne servirait à rien sa phobie de l’avion était inguérissable. Il avait beau avoir conscience de tout ce qui se disait au sujet du moyen de transport le plus sur du monde, il n’arrivait pas à vaincre cette peur. Il ne savait pas d’où elle venait. Il était amené à se déplacer régulièrement dans le cadre de sa profession, la plus part du temps il s’arrangeait pour ne pas avoir à grimper dans un avion, préférant le train ou la voiture. Lorsqu’il n’avait pas le choix il cédait bien entendu et prenait l’avion. Le Xanax était son grand ami dans les moments de grande angoisse mais il avait horreur de prendre un tranquillisant, il n’aimait pas ne plus se sentir sous son contrôle, il aimait encore moins avoir du mal à formuler une idée clairement. Mais, il finissait par se résigner à avaler un cachet lorsqu’il était seul ou alors épuisé, rien ne servait de lutter dans ces moments là. Tosca avait remarqué que quelque chose n’allait pas durant le trajet en berline qui les avait conduits à l’aéroport, il avait commencé par se tendre puis s’était renfrogné. Tosca avait interrogé André du regard avant de s’enquérir auprès de son mari de ce qui soudainement lui arrivait. Thybalt n’aimait pas montrer ses faiblesses aussi André n’avait-il pas eut le choix, il avait glissé à la jeune femme en lui tendant son sac que Thybalt avait une peur panique des avions. Contrairement à ce qu’il avait pensé, elle ne s’était pas moquée de lui et avait simplement serré sa main dans la sienne, elle prendrait soin de Thybalt avait-elle promit au vieil homme, il pouvait rentrer prendre soin de sa femme. Nerveux Thybalt se leva et se mit à faire les cent pas dans la salle d’attente de l’aéroport. Ils avaient fait enregistrés leurs bagages, l’avion serait bientôt annoncé. Tosca le rejoignit alors qu’il attaquait sa troisième traversée de la salle.
« Tu ne veux pas prendre un tranquillisant ou quelque chose de ce genre ? Monsieur le Sénateur, tu m’inquiètes. » Murmura t-elle en effleurant son visage de son regard chaud et rassurant. « Je n'en prends jamais. » Dit-il en tournant nerveusement son alliance autour de son annulaire, un toc qu’il avait développé depuis leur mariage et qui l’aidait à garder le contrôle de lui-même. « D'ailleurs, je vais très bien. » Qui essayait-il de tromper ? Il n’était pas bien, cela se voyait sur son visage, il était nerveux, livide, et ses mains tremblaient légèrement. Elle ne l’avait jamais vu ainsi. Tosca prit discrètement ses mains dans les siennes. « Tes mains sont glacées. » Constata t-elle simplement en pressant sa paume contre la sienne. Une onde de chaleur remonta aussitôt le long de son bras, contact apaisa qui anesthésia son angoisse sur le champ. « Mais non. Je prends tout le temps l'avion, j'ai l'habitude. » Assura t-il, après tout il arrivait d’ordinaire à juguler son angoisse à coup de formules toutes faites. Il cachait relativement bien son stress de voyager dans les aires avec les autres … mais Tosca n’était pas les autres. « Je sais. Ça doit être dur. » Souffla t-elle. Dégoûté de sa faiblesse, Thybalt lui jeta un regard en biais. Il n’aimait pas s’effondrer pour une chose aussi ridicule que de prendre l’avion. « Tout le monde a des phobies, ce n'est pas la peine d'en faire une histoire » Grogna t-il en lâchant sa main. Foutue fierté masculine sembla t-elle penser alors qu’il tentait de la contourner pour reprendre sa marche. La patience était une vertu que cet homme lu apprenait à maitriser chaque jour. « Tu as raison. Mais laisse-moi quand même t'aider » dit-elle en portant sa main à sa joue. « Ecoute, Tosca, je me sens un peu ridicule, là. Je préférerais que tu lâches ma main. » Foutu égo, foutu fierté, foutu italien conservateur ! Elle opta alors pour un autre angle d’attaque. L’humour. « D'accord. A condition que tu ne voies pas d'inconvénient à tenir la mienne pendant le vol. D'accord ? » « Il dure deux heures. » Marmonna-t-il. « Deux interminables heures. » Pourquoi diable fallait-il que le vol fasse escale dans une ville sur le chemin. Une heure d’avion était supportable, mais deux… Tosca se pencha à son oreille, effleurant de sa bouche son lobe et murmura d’une voix feutrée. « Nous devrions pouvoir trouver un moyen de passer agréablement le temps. » Ce contact électrisa le jeune homme et l’apaisa. Il lui était reconnaissant de ne pas prendre ombrage de sa mauvaise humeur et de tenter de lui changer les idées. « Si c'est ce à quoi je pense que tu as en tête, on va nous arrêter » Murmura Thybalt, tout en sentant la tension dans ses épaules se dissiper un peu et le sang dans ses veines se réchauffer peu à peu au contact de ce corps féminin si près de lui. « Tu as vraiment l'esprit mal tourné. Je pensais à une partie de gin rami. » Le rabroua t-elle avec un sourire de prédatrice, contredisant cette affirmation. « C'est ça. » Répliqua Thybalt alors qu’elle retournait s’asseoir sur son siège en ondulant des hanches, il avait l’impression d’avoir réveillé en elle la séductrice, la femme. Sa femme. Lorsqu'on appela les passagers pour l'embarquement, Thybalt se leva et prit une inspiration profonde. « Un euro le point ? » Proposa t-il en aidant la jeune femme avec son sac pour ces appareils photos. « Marché conclu. » Elle rit et suivit Thybalt sur la passerelle qui menait à l'appareil.
(…)
Rome. C’était cette ville qui l’avait vu grandir qui se dessinait sous ses yeux en contrebas. Depuis quelques minutes déjà l’hôtesse de l’air avait annoncée leur descente vers la capitale et depuis il ne pouvait détacher ses yeux de la ville qui se dévoilement progressivement derrière l’épais voile de nuage qui obstruait le ciel en cette fin de journée à mesure que l’avion amorçait sa descente. Cette ville qu’il avait fuit près d’un an plus tôt, cette ville qu’il n’avait pas su apprécier lors de son retour après Halloween, la ville qu’il avait exploré de fond en comble avec sa sœur. Si Vérone représentait désormais son havre de paix, sa maison, il restait profondément attaché à Rome. Il se sentait chez lui ici, il avait ses habitudes, sa vie, son travail. Il employait le passé car désormais sa vie était ailleurs, là où se trouvait la jeune femme assise à côté de lui et dont il avait serré la main à la broyer lors du décollage, cette femme qu’il aimait plus que sa propre vie, cette femme à qui il avait la sensation de tout devoir : son bonheur, sa santé, son équilibre. Il tourna vers elle son visage et du doigt lui indiqua une petite parcelle de la ville.
« C’est dans ce coin là que je vis. » Annonça t-il en souriant. « Tu ne peux pas le voir mais l’immeuble est jaune avec des volets rouges vieillis par le passage des années, la concierge est une vieille dame charmante, mes voisins de palier viennent d’avoir un bébé, un ancien garde suisse vis au dernier étage, il passe les trois quarts de ses journées à jardiner dans le potager commun qui se trouve au fond de la cour. A 82 ans il plante et déterre les poireaux comme un minot de 20 ans. » Elle effleura discrètement sa joue du bout des doigts et lui sourit. Son cœur débordait de joie à l’idée de l’introduire dans cet univers qui avait longtemps été le sien. Il faudrait bientôt penser à vendre l’appartement ou à le garder en l’état, bien sur il devrait également assurer la fin de son engagement au Sénat pour quelques semaines encore mais il savait que ce voyage était le dernier qu’il effectuait en tant que Sénateur à Vie. il avait renoncé à ce poste sans réelle difficulté, il voulait que Tosca fasse partie de sa vie, il aspirait à bâtir une famille, à se construire une identité loin de l’étiquette qui collait à sa famille. Il voulait vivre paisiblement loin de l’agitation médiatique et politique de Rome, il voulait se projeter, être heureux. Il avait également longuement soupesé les pours et les contres avant de se ranger de l’avis de la démission de ses fonctions. Il savait qu’à Rome il penserait sans arrêt à Elle, n’aspirait qu’à rentrer auprès d’elle comme cela avait été le cas ses derniers mois de séparation. Il savait aussi que cette « distraction » pourrait remettre en compte ses choix politiques, il pourrait bâcler un projet de loi pour attraper son avion et se retrouver avec elle. L’amour rendait parfois laxiste, et Thybalt avait fait le choix de ne pas être un mauvais élu. Renoncer à sa charge n’avait pas été un choix qu’il avait fait seul, étrangement son grand père avait accepté aisément qu’il renonce à cette place qu’il lui devait, conscient que son unique petit fils avait trouvé à Vérone ce qui lui manquait pour devenir un grand leader. Tosca, elle, n’avait pas comprit ce choix. Thybalt avait eut beau lui répéter qu’elle n’était pour rien dans cette décision, qu’il avait d’autres projets que de n’être que « le petit fils de Il Divo », elle savait qu’il mentait en partie. Pour elle il quittait une place de sénateur pour se lancer à la course à la Mairie de Vérone, elle ne comprenait pas son choix, sa décision. Il avait beau eut lui expliquer qu’il avait décidé de recommencer à zéro afin de gravir les échelons comme n’importe qui, pour elle il troquait un job dans lequel il s’était investit pour un boulot de bureaucrate ingrat. Se penchant vers elle, il effleura sa bouche d’un baiser tendre et léger, ici personne ne les connaissaient, enfin personne ne la connaissait, il faudrait se méfier des paparazzis qui faisaient leurs choux gras de la famille Andreotti, mais ici ils pourraient être eux même le temps d’un formidable week-end. « Je suis heureux que tu m’accompagnes. J’espérais tant que tu dises oui, que tu rencontres ma famille, mes amis… Bien sur j’apprécie notre existence à Vérone mais ici … Pas de chien, pas de frères, par de squatteurs, pas de Maria pour interrompre quoi que ce soit… Bien que je l’avoue notre fils à quatre pattes me manque déjà. »
(…)
« Et voici mon antre. » Annonça t-il après avoir grimpé les trois étages menant à l’appartement qu’il occupait lorsqu’il se trouvait à Rome. L’appartement avait changé depuis son départ pour Vérone. La présence de sa sœur imprégnait pourtant encore chaque murs même si Giulio avait fait en sorte que les affaires de Reena qui avaient été empaquetées soient consignées dans un box de stockage. L’appartement sentait un peu le renfermé mais la lumière décroissante du jour pénétrait encore par les larges fenêtres donnant sur la rue et sur la cour. Il était ici chez lui. Cet appartement avait été le premier qu’il avait prit avec sa sœur, le dernier également. Il avait d’incroyables souvenirs ici, des souvenirs moins douloureux à présent qu’il connaissait la vérité. Il prit les bagages qu’il avait posés sur le plancher le temps de déverrouiller la porte. Des souvenirs, il comptait en fabriquer des nouveaux désormais.
Tosca J. Dal Cappello
FORBIDDEN FRUIT — Cause the morning always come to kill the dream —
■ Messages : 5364 ■ Age du Personnage : 24 ans ■ Logement : Casa di Giulietta, rien de moins ! ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Lun 23 Mai - 1:07
Tout en secouant la nappe par la fenêtre, au-dessus d’une cour intérieure joliment arrangée, elle ébaucha un sourire alors que les cris masculins lui parvenait. Elle avait beau se trouver dans un immeuble de standing, ça ne changeait rien au fait que les italiens restaient des italiens, qu’importe leur position dans la pyramide socioprofessionnelle. Et l’italien en question, grand brun, front large, épaules tout autant, se trouvait au milieu des géraniums et autres fleurs en pot, un sachet plastique à la main, et hurlait à sa soeur, ou sa femme, trois étages plus haut, elle aussi, comme Tosca, penchée à la fenêtre, qu’il y avait du monde et que c’est pour cette raison qu’il avait mit plus de temps. La femme, belle, brune, sa longue chevelure encadrant un visage poupon mais trop maquillé, l’incriminait en agitant ses mains de façon menaçante. A cause de son retard, son plat était foutu, elle n’aurait jamais le temps de préparer sa recette avant l’arrivée des invités, dans moins d’une heure, tout ça parce qu’il avait mit deux heure, DEUX HEURES, pour aller lui chercher ces maudits oeufs. Elle eut beau claquer la fenêtre sur un dernier «mais chérie...» de la part de ce qui ne saurait être autre chose que son mari, Tosca l’entendait toujours hurler et incendier le pauvre homme depuis sa cuisine. Elle lui jeta un regard, et il releva la tête immédiatement vers elle, comme s’il avait eu conscience d’être observé tout du long. Il lui offrit un joli sourire, avant de rabattre ses bras le long de son corps dans un geste d’abattement. «Raaaah, les femmes.» sembla-t-il dire. Elle haussa les épaules à son tour, un sourire aux lèvres, juste au moment où Madame rouvrait la fenêtre pour vérifier à quoi le trainard occupait son temps. Voyant Tosca, elle hurla de plus belle, incendiant son époux dans une crise d’une théâtralité rarement égalée. Elle claqua une nouvelle fois les vitres de sa petite fenêtre, et Tosca éclata d’un rire franc et sonore. L’homme en bas, qui n’avait pas cessé de sourire, lui offrit un petit signe de main, avant de s’engouffrer dans ce qui devait être l’escalier menant aux différents étages de ce bâtiment. Un rire toujours aux lèvres, elle ramassa sa nappe dépoussiérée pour aller l’étendre sur la table de la pièce à vivre. Elle ne pouvait pas blâmer la brune, elle aussi savait se montrer d’une jalousie maladive et irrationnelle, même si elle ne l’avouerait jamais, pas même sous la torture. Elle souriait toujours en lissant les plis de la nappe de grande qualité, sur la table d’aussi grande qualité. Tout ici avait besoin d’un bon coup de frais. Au sens premier du terme. Le style avait beau être résolument moderne, y avait un sérieux problème de poussière et de manque de vie. Elle comptait bien remédier à ça, et elle avait déjà bien entamé sa mission. Une grande partie de la poussière avait déserté les lieux, et l’odeur de renfermé avait été remplacée par celle des oeufs frétillant dans la poêle, et celle du café chaud. Ca lui faisait tout de même étrange de se trouver ici, dans cet appartement, dans cet antre à des années lumières de leur vie à Vérone. Ou plutôt de leurs vies. Parce qu’ils avaient deux vies bien distinctes et pourtant étroitement emmêlée, à l’image de leur passé, celui au cours duquel ils n’auront fait que se croiser, un nombre incalculable de fois, sans jamais se rencontrer, comme deux lignes parallèles qui s’enlacent par instant, trop souvent pour que ce ne soit pas suspect, avant de se croiser définitivement, et de vriller sur elles-mêmes en un tortillon serré. Aujourd’hui ils se trouvaient dans une de ces périodes où les deux lignes ne semblent n’en former qu’une seule. Elle dans son appartement, à des centaines de kilomètres de Vérone et encore plus de Venise, et pourtant, elle était légèrement mal à l’aise, comme étrangère dans ce décor qui transpirait son passé à lui, un passé dans lequel elle avait été présente sans l’être. Elle avait été présente parce qu’il n’avait jamais rien ignoré de son existence et qu’il avait passé des années à la dessiner. Mais elle n’avait jamais eu conscience de ça. Il y avait donc tout un pan de sa vie qu’elle n’avait fait que frôler du doigt. Aujourd’hui elle était en immersion totale. C’était comme une fille se réveillant dans l’appartement d’un amant tout frais, dont elle ne connait rien mais qui lui plait suffisamment pour qu’elle n’ait pas déguerpit dès les premières lueurs de l’aube. D’ailleurs il lui avait fait l’amour comme s’il s’agissait de la première fois aussi, avec la même envie et la même impression de découverte que s’il s’agissait réellement de leur première nuit ensemble. Rien que de repenser à cette nuit, elle se sentait s’empourprer. Jamais elle n’aurait imaginé être capable de... ça. Oh, ils n’avaient rien fait de répréhensible, ni rien de dégradant, mais ça avait été tellement... féroce et intense. Ca avait été dingue, totalement dingue. Et c’est pour cette raison qu’elle se retrouvait gauche et maladroite dans cette cuisine, manquant faire tomber la poêle, renverser le jus d’orange, rater les oeufs, tout simplement parce qu’elle se sentait comme une ado timide et rougissante qui viendrait de devenir femme d’une manière à peine imaginable.
Et les choses ne firent qu’empirer lorsque les premiers signes de civilisation se firent entendre dans l’appartement. Il était presque midi, il avait dormit toute la matinée, et si les odeurs de bouffe étaient à l’origine destiné à le réveiller, elle redoutait maintenant cette gêne qui ne semblait plus vouloir la quitter, et qui décuplerait sitôt qu’il poserait son regard sur elle, elle le savait. Ils étaient arrivés la veille, n’avait pas vraiment profité de la visite des lieux pour se cantonner à celle de la chambre. Oh, évidemment, ils avaient commencé par tenter de manger un morceau, mais c’est elle qui avait finit par débarrasser les assiettes intactes au petit matin. Finalement, elle aurait préféré qu’il reste au lit, qu’elle y retrouve, et qu’ils passent leur vie comme ça, sans jamais avoir à parler ou évoquer les événements de la nuit passée qu’elle n’était pas sûre d’assumer totalement. Bordel, elle ignorait pouvoir se montrer aussi souple et... aventureuse. Ca sortait d’où tout ça ? Elle n’eut pas le temps de s'appesantir sur la question puisque l’objet de ses tourments fit son apparition dans la cuisine, torse nu, un simple bas de pyjama jeté sur ses hanches. «Bien dormi ?» demanda-t-il en s’approchant, nulle trace d’une quelconque gêne sur les traits. «Oui.» répondit-elle en s’accrochant au manche de sa poêle le regard fixé sur ses oeufs. «J’ai pensé que tu aurais sûrement faim.» Elle se détendit un peu lorsqu’il vint glisser une main dans son dos, et déposer tendrement ses lèvres sur une épaule à demi-nue. «Moi aussi j’ai bien dormi, merci de t’en soucier.» lui reprocha-t-il sur le ton de la plaisanterie. «Mis à part que j’ai été réveillé par ta tentative de drague sur mon très discret voisin.» ajouta-t-il dans un sourire complice en ramenant une mèche de cheveux brune derrière son oreille, tout en s’adossant au plan de travail à côté des plaques. «T’as vu comme ils gueulent ?!» rebondit-elle réellement impressionnée par la scène à laquelle elle avait assisté un peu plus tôt, en se tournant vers lui pour la première fois. «C’est h-24, c’est leur moyen de communication personnel. Mais en vrai, ils sont adorables. Non pas que je les connaisse plus que ça, mais en tant que personnes que je croise régulièrement dans les couloirs, je les trouve plutôt sympa.» «Parce qu’ils te tiennent la porte de l’ascenseur à chaque fois, et ne te volent pas ton journal du matin ?» demanda-t-elle en envoyant le fameux journal du matin, ramassé par ses soins sur le palier, sur la table. «Voilà, tu as tout compris.» Il se décolla finalement du plan de travail, pour aller servir deux cafés, qu’il amena sur le table en même temps qu’elle apportait les assiettes. Il se comportait tellement normalement qu’elle en fut immédiatement apaisée. Peut être souffrait-il d’amnésie, et n’avait qu’un souvenir confus de la nuit passée ? C’était la seule explication, une explication qui la soulageait au point de laisser échapper un soupir en se laissant tomber sur sa chaise. «T’aurais pas du me laisser dormir aussi longtemps.» annonça-t-il en plantant une fourchette dans ses oeufs au plat qu’elle avait rebaptisé dans l’urgence «oeufs brouillés» vu la gueule. «Hey, c’est pas mon rôle, je suis pas ta femme.» rétorqua-t-elle avant de s’enfiler une gorgée de café, réussi lui. «Bah si, justement.» Elle releva le nez vers lui, sembla peser le pour et le contre, puis penchant sa tête sur le côté dans une légère moue laissant entendre qu’il n’avait pas totalement tort. «Et bien, disons que je ne suis pas ce type d’épouse-là. Poussons même jusqu’à dire que n’étant pas une épouse officielle, je ne suis pas tenue d’agir comme telle. Donc les réveils à une heure décente, les chemises a repasser, et le rapiéçage des chaussettes, tu oublies tout de suite.» Il sembla assez d’accord avec ça, même sans dire un mot, elle pu lire dans son regard rieur, juste au-dessus de sa tasse à café, qu’il appréciait le comique de son discours. «Et pourquoi il aurait fallut te réveiller tôt, d’ailleurs ? Tu es attendu quelque part ?» «On. On est attendu quelque part.» répondit-il en reposant sa tasse vidée au deux tiers. «La cérémonie d’adieu, tu te souviens ?» «C’est ce soir ?! Mais on vient à peine d’arriver.» «En vrai on est arrivé hier soir, et on repart demain soir. J’ai réussi à réduire mes obligations au strict minimum, mais si on passe nos journées à dormir, tu ne risques pas de voir grand chose de Rome.» Il n’avait pas tort. «C’est quoi le strict minimum ?» Voulu-t-elle savoir. «La cérémonie intime, ce soir. Le speech au Sénat demain à la session de 15h, et après je dois recevoir un journaliste afin de tenir la bride à la médiatisation de cet évènement.» énuméra-t-il de son ton professionnel, celui de politicien, sobre, calme, clair et concis. «Ce qui signifie, pour moi ?» «On va faire un tour cet après-midi, on te trouve une robe et des chaussures...» Il s’interrompit le temps de sourire au soupir à fendre l’âme qu’elle venait de laisser échapper. «Ensuite, demain matin on essaye de se lever pas trop tard pour que je te fasse découvrir ma ville, puis je te dépose chez Têtedetélé où tu pourras suivre mon speech sur la chaîne parlementaire, si tu le souhaites. Puis je te rejoins, je fais l’interview sur place, et de manière rapide, et ensuite je suis tout à toi. Ca te va ?» «J’ai le choix ? Je préfèrerais que tu sois tout à moi dès maintenant, et qu’on soit pas obligé d’aller me trouver un bout de tissu improbable à me coller sur le dos, mais puisque je n’ai pas mon mot à dire... Cette conversation n’aurait pas lieu si tu m’écoutais et que tu ne renonçais pas à ton siège.» Nouveau sourire de la part de Thybalt, il avait appris à ne pas répondre lorsqu’elle attaquait sur ce sujet bien précis. «J’ai épousé un sénateur, et je vais me retrouver avec le maire d’une province reculée et limite bouseuse. Point de vue prestige, génial, nickel, rien à redire.» Grommela-t-elle en s’enfilant une fourchette d’oeufs ratés, tandis que le sénateur en question refoulait un sourire qu’il jugeait inopportunt en cet instant. Elle finirait par changer d’avis. C’était peut être déjà le cas mais n’osait l’avouer, d’ailleurs. Qui sait ? Cette femme était un tel mystère par moment.
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Ses lèvres se montraient presque timides, douces, hésitantes, de même que ses bras, son étreinte, ses caresses, comme s’il craignait qu’elle ne se brise, ou qu’elle se refuse à lui. Impensable. Au contraire, elle en voulait plus, bien plus, le sentir toujours plus contre elle. Elle le lui fit comprendre en resserrant sa prise autour du tissu de sa cravate et en tirant un coup sec dessus, le rapprochant du même fait, encore plus d’elle. Dans un grognement de surprise, ou peut être de plaisir, ses lèvres s’écrasèrent contre celle de sa partenaire, et il se montra bizarrement bien moins sensible, bien plus féroce. Envolée la belle retenue, il n’y avait plus trace de prévenance ni dans ses baisers, ni dans ses caresses, ni dans son étreinte. Un bras enserra sa taille menue, une main propriétaire s’installa dans sa cambrure de rein, s’étalant dans toute sa largeur, dans toute sa longueur pour la ramener d’un geste brusque contre son corps, le ventre de la jeune femme dangereusement appuyé contre sa virilité toute fraîche. Son autre bras encercla ses épaules, rendant son étreinte quasi tentaculaire. Elle ne pouvait plus s’échapper, elle ne voulait pas s’échapper. En avait-elle seulement eu envie un jour ? Ses mains aux ongles fraîchement manucurés s’employèrent à le décoiffer savamment, dans le seul but de le posséder jusqu’à la racine jusqu’à la pointe. Son baiser semblait être une demande, une supplique, celle de s’offrir à lui, de manière inaliénable, et ce pour l’éternité, et ses lèvres semblaient lui répondre avec cette même ferveur, cette même féroce violence. Et chaque baiser était ainsi, depuis le tout premier, jusqu’au dernier, elle le soupçonnait. Chaque fois qu’ils posaient ses lèvres sur les siennes, ils se retrouvaient à sceller une nouvelle promesse, un engagement qui semblait dépasser tout ce qui avait pu exister jusque là. Ca n’avait rien de normal, ils en avaient conscience l’un et l’autre, parce qu’un tel comportement n’avait absolument rien de rationnel, ni de commun, et pourtant ils ne cherchaient pas à y mettre un terme, simplement parce que lorsqu’ils étaient ainsi, limite l’un dans l’autre, ils ne parvenaient plus a rationaliser, et lorsqu’ils étaient en mesure de le faire, ils n’en éprouvaient pas forcément l’envie. Alors oui, ils avaient conscience de ça, mais jamais réellement l’opportunité de s’y attarder. Brusquement, elle se sentit décoller de terre. Il venait de l’attraper par la taille, la ramenant à sa hauteur en nouant ses bras autour de sa taille. Les escarpins à plusieurs centimètres au-dessus du sol, les jambes pendant mollement dans le vide, elle n’éprouvait pas la moindre appréhension. Elle ne chercha pas à se raccrocher aux murs, pourtant si proches, ni même à s’accrocher plus fermement à son cou, non, elle n’avait pas peur, elle se sentait en sécurité, comme toujours, même si, lorsqu’elle surprenait son regard vorace, elle aurait eu à craindre pour sa vie. Il semblait maîtriser la situation à la perfection. Il n’en était rien, sinon ils ne se seraient pas trouvés ici même, ils ne se seraient pas adonnés à ce type... Hum... d’activité. Mais dans cette «activité», il maîtrisait tout, ou tout du moins son équilibre et celui de sa compagne qu’il soulevait à la force de ses bras. Il avait de la chance qu’elle se retrouve engoncée dans cette stupide robe au point de ne pouvoir bouger d’un millimètre, sinon elle aurait depuis longtemps noué ses jambes autour de son bassin, et il se serait retrouvé dans l’incapacité de faire marche arrière. Parce que c’est ce qu’il fit. Enfin pas exactement. Il se contenta d’arracher ses lèvres des siennes pour laisser échouer une respiration chaotique contre l’épaule nue de la jeune femme. Mais aux yeux de cette dernière, c’était absolument la même chose. Elle connaissait la suite par cœur. Lorsqu’il aurait retrouvé une respiration à peu près normale, il allait relever le nez, déposer ses lèvres sur son front, avant de la gronder de s’être montrée si insolente et tentatrice. Bah oui mon bon monsieur, mais faut pas épouser le Diable lorsqu’on ne supporte pas les flammes de l’enfer, hein. Elle-même suivit son exemple, et ferma les yeux en se passant la langue sur ses lèvres légèrement endolories, mais pas pour les mêmes raisons que lui. Elle ne cherchait pas à reprendre son souffle, à calmer son palpitant, ou a reprendre le contrôle de son esprit, elle cherchait juste à ravaler sa frustration. Parce que si le désir était intense, incontrôlable et bizarrement anormal, la frustration l’était tout autant. Elle savait que ce n’était ni le lieu, ni le moment, c’était même l’exact contraire de tout ça, mais c’était plus fort qu’elle, et son désir prenait des allures de caprices. Elle lui en voulait presque de se montrer si «raisonnable», comme si tout ceci avait moins d’effet sur lui que sur elle.
«T’es dur.» se plaignit-elle, boudeuse, en posant sa joue contre son épaule. «T’as pas idée.» Lui répondit-il, sa voix rendue rauque et sexy par le désir et sa respiration toujours anarchique. «C’est pas drôle.» Se lamenta-t-elle en réprimant un sourire. «Je n’ai pas cherché à l’être.» Son souffle dans son oreille, c’était de l’ordre de la torture. Il aurait fallut, pour bien faire et pour calmer un peu la frustration, qu’elle s’éloigne de lui, qu’il la relâche, et qu’elle s’éloigne de lui. Mais elle était bien incapable de s’y résigner. «Ha non ?» Son index longea la ligne de sa mâchoire, suivit le tracé de sa gorge, avant de descendre un peu plus, et de s’accrocher au nœud de cravate qu’elle tenta de desserrer d’une main. «Bon, d’accord, peut être un peu.» Avoua-t-il en posant sa main sur la sienne, l’immobilisant de ce fait, et l’empêchant de poursuivre son travail. «Sca.» La gronda-t-il en étirant la dernière voyelle, la prolongeant à l’infini alors qu’elle affichait une mine boudeuse. «Tu avais promis de m’apaiser à chaque fois que j’en aurais besoin.» Lui rappela-t-elle en fronçant les sourcils, la bouche en biais. «Je n’ai pas vraiment l’impression de t’apaiser, là.» Lui rétorqua-t-il, à la fois amusé et sévère. «Oh si !» Mentit-elle de manière éhontée, en appuyant sur son menton pour l’obliger à revenir vers ses lèvres qui se tenaient prêtes à attraper les siennes. Sauf qu’il fut plus prompt qu’elle, et s’échappa après un malheureux et totalement décevant petit smack. Pathétique. «Sca !» Grogna-t-il en résistant par je ne sais quel miracle. «Veux-tu bien cesser de me torturer ?» «C’est toi qui me torture en te refusant à moi.» Se plaignit-elle en affichant un air scandalisé. «Je ne te refuse rien.» Radoucit, il caressa sa joue de son pouce, comme s’il cherchait à la rassurer alors qu’elle ne faisait, ni plus, ni moins, qu’un gros caprice. D’ailleurs, elle fronça les sourcils à cette dernière affirmation. «Bon, d’accord, un peu, mais c’est seulement parce que ce n’est ni le lieu, ni le moment.» Il resserra l’étreinte de ses bras autour d’elle, la plaquant un peu plus contre lui, l’écrasant presque contre son torse. «Mais si je m’écoutais...» «Ecoute-toi ! Ecoute-toi ! Tu ne t'écoutes pas assez, c'est ça ton problème, si tu veux mon avis.» s’écria-t-elle presque en encadrant son visage de ses mains, l’obligeant de ce fait à lui faire face. Ainsi elle eut tout le loisir de contempler son sourire amusé, et le regard empli d’une ferveur quasi religieuse qu’il posait sur elle. Il n’allait pas résister, il ne pouvait pas résister. Comment aurait-il pu résister à ça ? Et pourtant... Sans desserrer son étreinte, il la fit redescendre lentement vers la terre ferme, et lorsque les escarpins de la jeune femme foulèrent le sol elle laissa échapper un profond soupir, consciente d’avoir perdu la bataille. «Sois patiente, mon ange...» Lui asséna-t-il à l’oreille, avant de déposer ses lèvres dans son cou, juste sous le lobe, là où elle était si sensible. Salaud. Elle ne lui répondit que par une moue boudeuse dont le but totalement assumé était d’attirer son attention sur ses lèvres. Sauf que... S’il jeta bien un regard à ces deux pétales de rose, il se reprit immédiatement et posa les siennes sur son front. Il laissa s’écouler quelques secondes ainsi, sa bouche contre son front, son nez dans ses cheveux, avant de se reculer légèrement en resserrant son nœud de cravate puis de lisser les plis de son costume. Il lui jeta un regard interrogateur, comme s’il s’attendait à ce qu’elle le rencarde sur l’état de sa tenue. «Dans tes rêves, mon pote» répondit le haussement de sourcils de la jeune femme, visiblement contrariée. L’homme laissa échapper un rire aussi léger qu’une bulle de champagne, avant de l’attirer à lui, en se saisissant d’un poignet, avant de revenir enfouir son nez dans ses cheveux savamment coiffés. «Bientôt...» chuchota-t-il depuis le sommet de son crâne. «Bientôt je vous dépouillerais de nouveau de vos vêtements et je vous ferais subir le genre d’actes sexuels indécents et passibles de prison dans plusieurs états de ce bon vieux nouveau monde qui horrifieraient le pape s’il les découvraient et dont vous raffolez tellement, Madame Andreotti. Bientôt.» Elle se sentit rougir jusqu’à la pointe des cheveux, et remercia le ciel de se trouver dans la pénombre réconfortante de la petite pièce, en cet instant. «Bientôt mais pas maintenant.» Ajouta-t-il, malheureusement. Un ajout qui permit à la frustration de supplanter la gêne. Et la boudeuse fut de retour. «Parole, parole, parole...» Chantonna-t-elle, furibarde, en le repoussant jusqu’à ce que son dos entre en collision avec la porte. Sous l’impact, un balais manqua s’écraser sur le sol, mais sa chute fut interrompu par une chaussure en cuir d’excellente faction, qui réceptionna le manche, avant, d’un léger mouvement de pied, de le lancer dans les airs, de manière à le rattraper à une main. Et dire que quelques mois plus tôt il se trainait encore dans un fauteuil roulant. Aujourd’hui il se prenait pour Beckham. Il esquissa un sourire en reposant le balais contre le mur. Il était fier de la mettre dans cet état, d’avoir ce pouvoir sur elle. Ça le rassurait quelque part, puisqu’elle-même détenait la même sorte de pouvoir sur lui. La main sur la poignée, il se permit un clin d’oeil qu’elle jugea absolument intolérable, avant de se faufiler dans l'entrebâillement de la porte et de refermer derrière lui. Alors elle s’adossa au mur du fond, et entreprit de compter jusqu’à cent. C’était débile, toute cette histoire l’était, mais pouvait-elle lui reprocher ce qu’elle avait elle-même mit en place ? Certainement pas. Mais la mauvaise foi, comme le mauvais caractère, c’était la marque de fabrique de la jeune femme. Maintenant qu’il était assez loin d’elle, elle n’éprouvait plus cet impérieux besoin de le posséder de manière charnelle, elle n’avait plus que la sensation de vide inhérente à son absence, cet espace creux au cœur même de son propre sein, comme si on venait de lui ôter une partie de son organe le plus vital. Et même si elle ne s'habituerait probablement jamais à ça, d’une certaine manière elle s’y était plus ou moins faite. Elle savait d’expérience que tout rentrerait dans l’ordre sitôt qu’il serait à ses côtés. Arrivée à 50, ne tenant plus en place, elle lissa sa robe sur son ventre et ses hanche, réajusta son décolleté qui, pour le coup, l’était de trop, et se saisit de la poignée à son tour. Dans le couloir, elle ne croisa qu’un serveur armé d’un plateau argenté. En argent peut être ? Non. Si. Peu importe. Il contempla avec une profonde perplexité cette jeune dame si élégante sortir du placard à balais, et lui passer devant en marchant avec prestance, la tête haute, les épaules bien droites. Rien à foutre. Il ne poserait pas de questions, elle le savait d’avance. Et quand bien même il le ferait, alors il lui suffirait de répondre que ce n’était pas ses affaires. Après tout, elle était agoraphobe, alors elle avait bien le droit de s’isoler histoire de retrouver son calme. Oui, même dans un placard à balais. Elle s’empara d’une coupe de champagne, et avança dans la mêlée. Tout naturellement, ses pas la conduire vers lui, presque sur lui, mais elle se contrôlait suffisamment pour bifurquer au dernier moment, et le dépasser comme si de rien était, direction le buffet. Et alors qu’elle le dépassait, elle remarqua la jeune femme qui faisait face au sénateur, et qui, d’un pouce contre sa propre bouche, lui annonçait avec autant de diplomatie que possible, que... «Vous avez un peu de rouge à lèvre, là...» Alors elle ne résista pas, elle se retourna et leva sa coupe à l’intention de Thybalt dont les lèvres, maintenant qu’elle y prêtait attention et autrement que dans la pénombre, avaient prit une teinte légèrement plus foncée. La teinte N°25 de chez Chanel, Rouge Coco «Vendôme», pour être exacte. Une merveilleuse teinte, si vous voulez mon avis.
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Il était moins impressionnant en vrai. Vraiment moins. Et surtout, elle-même était difficilement impressionnable. Elle lui avait serré la main sans aucune appréhension, et l’avait appelé «Têtedetélé» directement, sans aucune retenue. Il avait eu l’air d’apprécier cette fraîcheur et cette spontanéité qu’il n’avait pas dû côtoyer depuis un très lointain passé. Si bien que Thybalt, déjà en retard, avait pu filer sans s’éterniser dans des présentations censé mettre à l’aise sa compagne. Elle était déjà à l’aise. Elle avait passé les deux heures suivantes à guetter l’intervention de Thybalt sur l’écran plasma du salon, tout en s’enfiler des tartines de Philadelphia avec Monsieur Papy. Il lui avait présenté chaque vieux crouton de l’assemblée, ayant toujours une anecdote particulière pour chacun. C’est ainsi que Tosca avait prit conscience de ce petit détail qui changeait tout : Le Sénat manquait à Giulio Andreotti. Il avait cédé sa place à son petit-fils, sûrement ne regrettait-il pas sa décision, mais son activité lui manquait, les prises de bec virulentes avec ses opposants en pleine salle d’assemblée lui manquaient, et finalement, reprendre sa charge le laissait partagé. Il regrettait que Thybalt flingue ses chances et foute en l’air son avenir politique, mais il se réjouissait, d’un autre côté, de pouvoir retrouver son siège, et de n’avoir plus à s’acharner pour sortir son petit-fils de la dépression dans laquelle il l’avait vu s’enliser. Alors, pendant le discours, il n’avait cessé de grommeler, sans pour autant parvenir à retenir un sourire en voyant son petit-fils debout, bien droit, face à la tribune, dominant tout ce monde du haut de son mètre quatre vingt et des poussières. Quelques minutes (une bonne vingtaine) après la fin du générique kitch et désuet de la session du Sénat, l’ex sénateur était rentré dans la vaste demeure de Trastevere. Il avait mangé un morceau sur le pouce, tout en écoutant le débriefing de son aïeul, puis était partit se rafraîchir un peu avant que le journaliste n’arrive. Il avait bien proposé à Tosca d’y assister en tant que photographe officielle, mais elle avait refusé, préférant attendre dans l’ombre plutôt que d’avoir à jouer un rôle encore une fois. Alors elle s’était réfugiée dans la bibliothèque sitôt que la sonnette avait retentit, et elle se gavait de poésie depuis. C’était dingue le nombre d’exemplaires originaux que possédait Giulio. Un véritable trésor. Si bien qu’elle s’autorisa à fouiller, sans scrupule, à la recherche de ce qu’il y avait de plus beau, et de plus ancien. Et sur une des étagères, elle trouva le fameux journal de Willy Pears, celui dont Thybalt lui avait montré les photocopies. Elle savait qu’il avait envoyé l’original à Rome auprès d’une de ses amies historiennes, ou un truc dans le genre, mais elle ignorait que Giulio l’avait récupéré. Peut être que l’amie en question l’avait simplement déposé ici afin que Thybalt le retrouve à son prochain voyage. Peut être. Toujours est-il qu’elle s’en donna à coeur joie, s’installant dans le canapé en velours capitonné afin d’en entamer la lecture. Quel mal y avait-il à cela ? Il lui avait montré les photocopies, ils avaient travaillé ensemble au travail de déchiffrage, alors il ne verrait certainement pas d’objection à ce qu’elle se penche sur l’original. Sauf que l’original contenait bien plus de pages noircies que ce que lui avait laissé entendre Thybalt, et que des reproductions diverses et variées peuplaient la page de garde. Beaucoup de croquis d’une femme lui ressemblant à s’y méprendre. S’ils n’avaient pas été datés et signés, elle aurait pu penser qu’il s’agissait de l’oeuvre de Thybalt tant le coup de crayon était le même. Mais le plus étrange, c’était peut être les reproductions d’oeuvres reconnues. Bien sûr, il y avait tout un panel de Juliette de diverses époques, bien connues de tous, mais il y avait aussi d’autres oeuvres, qui n’avaient rien à voir avec la pièce de Shakespeare. Et elle en tenait une entre ses mains, une oeuvre qui la laissait perplexe tant elle lui rappelait sa première nuit à Rome, et la férocité du désir. Le verrou. Jean Honoré Fragonard. Elle avait un vague souvenir de ce tableau, l’un des plus beau du XVIIIème siècle, elle se souvenait qu’il était question d’interdit. La jeune femme se refuse, l’homme insiste et ferme le verrou. Cela pourrait s’arrêter là, si on ne poussait pas notre oeil à percevoir le reste, comme les indices semblent vouloir nous sous-entendre. Le lit est défait. Pourquoi si les deux individus ne sont pas encore passé à l’acte ? Alors on se penche sur les détails, les oreillers en forme de seins, le sexe masculins habilement dissimulé dans les plis de la robe, le sexe féminin dans celui du baldaquin, le fessier rebondit dans le coin gauche, derrière le lit, et puis cette pomme, subtilement oubliée sur la table basse. Oui, elle se souvenait maintenant, Fragonard avait divisé sa scène en deux, imperceptible à un oeil non exercé ou peu intéressé, comme un avant/après. D’abord la lutte, le refus vain et futile comme cette femme luttant sans force ni conviction contre son amant, puis l’abandon, déjà perceptible dans son attitude, qui conduira au pêché originel symbolisé par la pomme. Un tableau érotique devient moralisateur et quelque part, prophétique. Comme une mise en garde. L’atmosphère lourde acheva de mettre mal à l’aise Tosca vis à vis du tableau, encore plus lorsqu’elle se mit à reconnaître son propre amant dans les traits de celui du XVIIIème siècle, et son visage dans celui de la jeune bourgeoise. Pourquoi ? Est-ce qu’elle même devenait folle et commençait à prendre un peu trop au sérieux les élucubrations de Thybalt ? Il lui fallait un ordinateur et une connexion wifi, il fallait qu’elle fasse une recherche sur ce tableau.
Alors, le journal dans une main, la reproduction dans l’autre, elle entreprit de visiter la demeure à la recherche d’un ordinateur. Il y en avait forcément un, Giulio s’étant vanté plusieurs fois d’être au top de la technologie moderne. Mais elle était au premier étage, et soupçonnait de ne trouver que des chambres ou des salles de bain. Et elle n’avait pas tort. Après être tombée sur trois chambres inoccupées et deux salles de bain, elle commençait à perdre espoir en ouvrant la sixième porte. D’un mouvement vif, parce qu’agacée, elle ouvre la porte en grand, prête à la refermer presque aussi rapidement dans la foulée en constatant qu’il s’agit d’une quatrième chambre, quand elle s’immobilise net. «Et quand est-il de ce mariage dont vous nous cachez tout ? La rumeur prétend que vous avez amené votre épouse à Rome, avec vous. Qu’avez vous à répondre à cela ?» demandait un type en costume, bloc note à la main, Dictaphone sur les genoux, lunette sur le nez, avant de redresser le nez vers elle, bouche ouverte, regard surprit. Elle referma la porte aussi vite que possible, comme si ce simple fait allait la rendre invisible et effacer son apparition des mémoires. Excellente idée, Sca. Bravo ! Consciente, tout de même, du niveau de connerie de sa réaction, elle souffla un bon coup, avant d’étudier sa tenue. Un simple jean, pieds nus, les cheveux en vrac, et un tee-shirt trop grand qui n’était, bien évidemment, pas le sien. Zuteuh. Elle passa une main frénétique dans ses cheveux avec le vain espoir de les discipliner quelque peu, puis rouvrir la porte d’une manière qu’elle jugeait plus «pro» et donc à deux à l’heure, limite en faisant une courbette. Cette fois, tous les regards étaient tournés vers elle, comme s’ils avaient bloqués au moment de son claquage de porte, et n’avaient pas bougé depuis. C’était probablement le cas d’ailleurs. Le journaliste la fixait toujours du même air, Thybalt, de dos, avait tourné la tête vers la porte et haussait un sourcil de perplexité, Giulio semblait plus amusé qu’anxieux ou surprit, et un photographe avait relevé l’oeil de son objectif pour l’observer avec étonnement. Ce fut le flash activé par inadvertance, ou pas, dans sa direction, qui la réveilla complètement. «J’ai changé d’avis.» Annonça-t-elle brusquement, en totale improvisation, tandis que la perplexité de Thybalt s’accentuait. «Je tiens à superviser ça aussi.» ajouta-t-elle en désignant du doigt l’appareil photo que le type tenait encore à la main, sans avoir remit l’oeil à l’objectif. «Après tout, c’est sûrement la dernière fois que je peux m’occuper d’un sénateur, hors de question que je me laisse souffler ça par un petit journaliste apprenti photographe et son appareil à 20€.» Elle avait avancé de plusieurs pas vers l’intérieur de la pièce, et si la perplexité était toujours de mise, elle était amoindrie. «Sans vouloir vous vexer.» ajouta-t-elle à l’attention du photographe en question, qui accepta ses excuses d’un mouvement de main indolent. «Ma photographe officielle.» Expliqua Thybalt, comprenant enfin où elle voulait en venir, en la présentant à l’équipe journalistique. Le plan de la jeune femme n’était pas idiot, si on mettait de côté son entrée raté, et le fait qu’elle n’avait pas d’appareil photo. Elle avait laissé les siens à l’appartement, persuadée qu’elle n’aurait pas à s’en servir aujourd’hui, et ne souhaitant pas s’encombrer plus que nécessaire. Elle ne prit conscience de ce détail que lorsque le photographe lui céda sa place en face du sénateur. Merdeuh. «Heu... Je vais me contenter de vous superviser et de vous donner mon autorisation quand aux clichés utilisables, hein.» souffla-t-elle en tapotant le bras du photographe tout en s’installant dans un fauteuil à côté de Têtedetélé, qui riait sous cape. Vu les regards surpris qu’on lui lança une nouvelle fois, elle se sentie obligée de préciser : «La lumière... J’aime pas du tout travailler dans cette lumière toute pourrie.» ouimaisbiensûr. Le journaliste la fixa un instant, et décidant certainement qu’ils avaient suffisamment perdu assez de temps comme ça, reporta son attention sur Thybalt. «Donc... Votre épouse, monsieur Andreotti ?» Oui, monsieur Andreotti, parlez-nous de votre épouse.
Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
■ Messages : 3716 ■ Age du Personnage : 25 ans ■ Logement : ANDREOTTI; 34 Via Barchetta ; Citta Antica ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
♠ ♠ ♠ ♠ ■ Relazioni & Famiglia: ■ Job: Maire de Vérone ■ Sono : marié(e)
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Mer 29 Juin - 20:18
Voyager c’est prendre le risque d’être déçu, c’est aussi avoir la possibilité de faire des rencontres, de découvrir une autre facette de soi ou des autres. Thybalt avait l’habitude de voyager, les déplacements étaient monnaie courante pour un jeune sénateur mais, ce voyage était différent. Il n’en avait pas pour autant moins peur en avion mais, pour une fois, il n’était pas seul. Tosca lui avait laissé broyer sa main lors du décollage, caressant même le dos de sa paume de la pulpe de son pouce afin de l’apaiser. Comme promis il avait sorti un jeu de cartes de la poche de son costume et ils avaient joués le reste du trajet. Bien entendu les enjeux n’avaient pas été monétaires mais domestiques. Thybalt s’était empressé de perdre lorsqu’il avait été question de qui ferrait la cuisine le temps du séjour afin d’éviter tout risque d’une intoxication alimentaire si Tosca se mettait aux fourneaux. Il avait disputé fermement la partie lorsqu’il avait été question de la vaisselle et du ménage. Et finalement, au fur et à mesure des parties, des manches, les enjeux en cas de victoire avaient pris une tournure bien plus intime que prévu : qui aurait la corvée de savonner l’autre sous la douche, quel côté du lit reviendrait à qui, et autres élucubrations du même acabit. Au dehors du cockpit le paysage changeait, petit à petit les terres cultivées laissaient la place à des villes de plus en plus grandes. Les pensées de Thybalt dérivèrent alors que l’hôtesse annonçait l’atterrissage prochain de l’avion à l’aéroport de la ville de Rome, le Leonardo Da Vinci. Il jouait distraitement avec son alliance, ce n’était pas la première fois que le couple se trouvait à Rome au même moment, c’était cependant la première fois qu’ils y vivraient ensemble. Toutes ces années où ils n’avaient fait que ses croiser sans jamais se rencontrer, Thybalt caressa du regard la petite silhouette de sa compagne et sourit. Elle portait enroulée autour de son cou ce chèche qu’il avait un jour oublié à un vernissage, de même elle lisait ce livre de Maupassant qu’il avait un jour oublié à une terrasse de café. Ils avaient été attirés l’un par l’autre durant des années sans s’en apercevoir. Les rencontres avortées avaient été nombreuses ils n’avaient eu de cesse de se croiser, principalement à Rome, la ville qui avait vu grandir Thybalt. Il adorait cette ville, cette capitale cosmopolite qui l’étonnait encore après vingt-cinq années à y vivre. Il avait rêvé de nombreuses fois de faire visiter à Tosca cette ville, sa ville. Il existait de petites oasis de calme et d’originalité que seul un résident pouvait connaitre. Il voulait l’entrainer à la découverte de sa Rome. Bien sûr il n’oubliait pas ses obligations il n’effectuait pas qu’un simple voyage touristique, les enjeux étaient importants, déterminant pour le reste de sa carrière. Il s’apprêtait à mettre un terme à sa carrière de Sénateur, renonçant à sa charge au profit de son grand-père. Officiellement il renonçait à sa charge afin de se remettre complètement de son accident en occupant un poste qui lui tenait à cœur dans le fief même de sa victoire lors de l’élection sénatoriale, Vérone mais officieusement ces intentions, ses motivations étaient toutes autres. Il se fiait aux rêves de Tosca mais pas seulement, s’il abandonnait sa charge c’était également dans le but de fonder une famille loin de l’agitation médiatique que provoquait son nom. Il savait qu’il viendrait un jour où son mariage éclaterait au grand jour, où il pourrait aimer Tosca sans craindre de blesser un homme qu’elle avait longtemps aimé. La convaincre de l’épouser avait été difficile, la convaincre de fonder une famille le serait plus encore puisqu’elle avait rêvé, tout comme lui, que Thybalt serait mort à la naissance de leur premier enfant. Si Thybalt avait renoncé à sa carrière ce n’était pas pour conjurer une prémonition mais afin de pouvoir enfin reconstruire une famille, afin de pouvoir vivre cet amour dont il avait rêvé durant des années. Un amour fait de disputes, de rire, de larmes, de babillages d’enfants. Un avenir à l’aune de se qu’ils avaient connus tous les deux. Une grande et heureuse famille. Une vie à deux. Il ressentait un curieux sentiment d’urgence depuis leur rencontre, une douleur dans la poitrine, comme s’il quelque chose lui enserrait le cœur au fil des jours. Il avait enfin l’impression d’être à sa place, plus complet. Il était pourtant né avec une autre part de lui, une jumelle mais il s’était toujours senti seul, paradoxalement, comme privé de la moitié de lui-même. Tosca Dal Cappello lui avait apporté l’équilibre, le point d’encrage qui lui manquait. Un nouveau paradoxe puisque son avenir n’avait jamais été aussi incertain. Il l’aimait et elle l’aimait pourtant, une ombre planait sur leur couple, une façade qu’elle n’était pas prête à baisser. Comme si elle n’était pas prête à lui appartenir entièrement, à être sienne. Il était patient, il l’attendait, étrangement apaisé par cette réticence qui semblait expliquer le sentiment d’urgence qu’il ressentait. Il posa sa main sur la tranche de son livre, la forçant à baisser son regard vers le sien. Il lui sourit et tendrement explora ses lèvres alors que l’avion amorçait sa descente. Il l’aimait comme jamais il n’avait aimé et comme jamais il n’aimerait plus. Il savait que sa vie était auprès d’elle. Il le sentait dans ses os, dans son âme, dans son cœur. Il savait que dans un couple l’un doutait toujours plus que l’autre, il le savait, il l’acceptait et l’aimait encore plus pour cela, parce qu’il devait l’aimer suffisamment pour l’aider à franchir le pas qui les séparait encore. Il l’embrassait avec douceur, tendresse et passion. Il l’aimait. Il l’aimait. Il aimait ses lèvres, son odeur, son goût. Il l’aimait. Il l’aimait tellement qu’aucun d’eux ne se rendit compte que les gens se levaient, récupéraient leurs bagages dans un joyeux tintamarre. Il fallut que l’hôtesse de l’air vienne les secouer pour qu’ils se détachent l’un de l’autre, alors que le couple quittait l’appareil, un bras autour de l’autre, l’hôtesse sourit au copilote et lui vola un baiser.
« Des jeunes mariés. Tout comme nous. »
(…)
En proie à une frénésie dont il ne se serait jamais cru capable, le souffle court, les joues en feu, Thybalt plaqua fermement sa main contre sa nuque et attira ses lèvres contre les siennes. Tout en lui aspirait à l'urgence, au danger, aux promesses de ce baiser. Il lui fallut quelques secondes pour réaliser ce qu'elle était en train de faire. Il allait trop vite. Il brûlait de la sentir contre lui. De l’aimer ici, dans cet appartement où il avait vécu une partie de sa vie d’adulte, l’attendant patiemment.
« Laisse-toi faire » lui murmura-t-il à l'oreille. Il devinait l'attente au fond de ces yeux alors qu’il explorait lentement son visage de ses lèvres, dessinant ces traits avec ferveur et douceur, une découverte tendre et sensuelle qui ne la rassasiait pas. Elle se pressait contre lui avide. Mais cette fois il désirait prendre son temps, la faire sienne, la poussée au bord du gouffre du désir, de l’amour. Il la voulait, toute entière, sans retenue. Ses lèvres s'aventurèrent le long de son cou. Sa peau était aussi douce, aussi tendre, aussi parfumée que d’ordinaire mais ici, cette fragrance avait un sens différent, il comprit qu’il la redécouvrait, après avoir rêvé d’elle de longues nuits dans cette même chambre. Une nouvelle première fois. Tosca s'agrippait à ses épaules, la tête rejetée en arrière, elle pressait avec urgence son corps contre le sien. Dans le vert habituellement sans nuages des yeux de ses yeux, une ombre s'installait. Lorsqu'il la prit dans ses bras pour la soulever de terre, un petit cri inarticulé s'échappa des lèvres entrouvertes de la jeune femme. Ses mains habiles se glissèrent sous le débardeur qu’elle portait, il le lui retira, découvrant avec un certain plaisir qu’elle ne portait aucun soutient gorge. Sa bouche glissa le long de sa gorge, s’emparant de cette poitrine généreusement offerte. Elle s’arc-bouta entre ses bras, ses doigts se perdant dans ses cheveux, griffant son torse largement dénudé durant le trajet menant à la chambre à coucher. Alors que sa bouche jouait savamment sur ses mamelons érigés fièrement vers lui, il la bascula doucement sur le matelas. Ayant nouée ses jambes autour de son bassin, elle l’entraina avec lui sur le duvet. Prise par un besoin désespéré de sentir sa peau contre la sienne, elle ne lui laissa pas le temps de se redresser et s'activa sur les boutons de sa chemise, puis sur la ceinture de son jean. Les mains du jeune homme emprisonnèrent alors les siennes, et fermement les remonta au-dessus d’eux. De nouveau, il s'était emparé de ses lèvres. Avec une exigence nouvelle, son corps vint peser sur celui de Tosca et ses doigts se nouèrent aux siens sur le matelas, prison de douceur. Emplis d'une tendresse respectueuse, leurs regardent se mêlèrent. Lentement, sans la quitter du regard, Thybalt inclina la tête jusqu'à ce que leurs lèvres se rejoignent. Il prenait son temps, réprimant le désir qui lui meurtrissait les reins. Découvrant une fois de plus ce corps qui avait hanté ses pensées durant des années. Un corps qu’il prenait le temps de découvrir de ses lèvres, de ses mains. Une douce langueur prenait possession de la jeune femme alors que ses baisers longs et tendres alourdissaient son corps. Ses mains douces débarrassait son corps des derniers vêtements qui la couvraient encore, lorsqu’elle fut nue contre lui ses mains s’employèrent à caresser, à effleurer plutôt qu’à prendre, s’approprier. Dans un sursaut de volonté, Tosca s'était redressée. Agenouillée près de lui, ses yeux restèrent rivés à ceux de son amant tandis que lentement, à son tour, elle le déshabillait. Lorsque plus aucun vêtement ne s'interposa entre eux, elle s'allongea sur lui et laissa ses cheveux retomber autour de son visage. Ils demeurèrent ainsi une éternité, a simplement se dévorer du regard. Enfin, les lèvres de Tosca glissèrent le long du torse de Thybalt et elle eut l'impression d'entendre chacun des battements de son cœur soudain affolé. Avec une savante lenteur, ses lèvres musardèrent plus bas encore. Chaque muscle que ses baisers faisaient tressaillir, chaque frisson que sa langue arrachait à la peau de Thybalt la comblaient de joie. Incapable de soutenir cette caresse plus longtemps il la fit rouler sous lui, les jambes de sa compagne se refermèrent autour de ses hanches, s’offrant corps et âme, s’ouvrait à lui cette intimité dans laquelle il aspirait à se fondre, à se perdre, à s’unir. Sur la bouche de Tosca son nom n'était plus qu'un murmure qu'il s'empressa d'effacer du bout des lèvres. Elle creusa les reins, murmurant son nom, fiévreuse. Thybalt se laissa emporter. Il nicha son visage dans le cou de cette femme, sa femme, murmurant à son tour son prénom alors que leurs corps se cherchaient pour se fondre en une seule et même entité. Dans la sueur des corps glissant l'un contre l'autre, dans le bruit des souffles précipités, ils se donnèrent l'un à l'autre avec frénésie. Ils n’avaient jamais été aussi doux et enflammés. Rivalisant d’ardeur et de tendresse pour s’entrainer sur l’océan du plaisir.
(…)
Les mondanités n’étaient pas le passe-temps favori de Tosca, il regrettait de lui avoir imposé cette réception mais il aimait l’avoir à ses côtés, elle était si désespérément belle, si fraiche et franche que cela faisait sourire de la voir discuter calmement avec Giulio alors que de toute évidence elle l’appelait tête de télé et qu’ils devaient débattre sur un tout autre sujet que celui de la réception. Se débarrassant d’un sénateur aux dents longues, il s’approchait de l’étrange couple que formait Tosca et Giulio. Il passa un bras autour de la taille de Tosca, se sentant en confiance entouré de ses amis. Giulio les abandonna à son tour pour aller discuter avec le président du Sénat au sujet de l’allocution de Thybalt le lendemain. Pour ne pas être entendu par le reste des personnes présentes il lui chuchota à l’oreille une remarque sur sa tenue et un doux mot d’amour. Elle sourit, une onde de chaleur la parcourut alors qu’il caressait de son pouce le bas de ses reins.
« J’ai envie de toi. » Lui murmura-t-elle soudainement. « Le prestige de l’uniforme. Tout de suite. » « Tu n’es pas sérieuse ? » Pourtant elle lui fit une suggestion à l’oreille qui ne le laissa pas de marbre. « Nous somme en public. » Répondit-il d’une voix rauque. « On ne vas pas s’enfermer dans un placard à balais comme deux adolescents… » Pourtant ce n’était pas l’envie qui manquait, le sang s’était affolé dans ses veines. Soudainement elle l’entraina dans la foule en direction du couloir. Elle ouvrit alors la porte la plus proche qui se trouva effectivement être un placard. Ah les femmes, un vrai mystère parfois. C’est ainsi que Thybalt se retrouva à presser chaudement la jeune femme contre la porte d’un placard à balais, jouant un jeu dangereux tandis que sa réception continuait sans lui… Les femmes. Sa femme. Elle lui faisait perdre la tête.
(…)
« Je croyais que nous étions censé parler de politique. » Répondit calmement Thybalt en se carrant plus confortablement dans le voltaire qu’il occupait depuis le début de son entretien avec le journaliste. « La Reppublica ne fait généralement pas dans les cancans. N’est-ce pas grand-père ? » La meilleure manière de dévier une question était de noyer le poisson, enfin c’était ce que Giulio lui avait appris un jour de campagne alors qu’une question d’un journaliste portait sur la vie sexuellement débridée de sa sœur jumelle. « Notre Président court les prostituées mineures. » Répondit calmement son grand-père en rallumant son cigare à la flamme du briquet en argent massif qui appartenait à Thybalt. L’ombre d’un sourire joua sur ses lèvres lorsqu’il nota l’étincelle de surprise dans les yeux de son petit-fils. Il voulait passer une partie de sa vie à Vérone avec sa femme, n’est-il pas ? Il était de le voir assumer ses choix. Leurs choix. « Il semble légitime de s’interroger sur ta vie privé, jusqu’à présent ta vie semblait utopique, le Prince Charmant que l’Italie entière rêvait de voir tomber amoureux et succomber aux charmes d’une fille de Sénateur, il semble juste que l’on s’interroge sur celle qui a ravie ton cœur et fait de toi son mari. » Cette fois une étincelle d’agacement passa dans les yeux de Thybalt, il n’aimait pas qu’on lui force la main, Giulio le savait pourtant. Il jeta un coup d’œil discret à Tosca, se demandant jusqu’où il pouvait ailler sans risque de la mettre dans une situation délicate. Il croisa ses longues jambes devant lui et soupira. Il n’aimait pas parler de sa vie privée lors de ses interviews politiques mais soit, Tosca ne semblait pas s’opposer à ces révélations, un petit sourire en coin elle semblait même le guetter. « Ma femme… » Il prit une légère inspiration, le temps de réfléchir. « Ma femme est agoraphobe. Je ne lui impose pas les inconvénients de cette vie, cette sur exposition médiatique, l’indiscrétion des médias, paradoxalement on pourrait croire que je désire la préserver mais c’est elle qui a fait le choix de rester en retrait, ce que j’approuve. Elle ne se mêle pas de politique, la politique l’ennui profondément, et c’est peut-être ce qui m’a fasciné chez elle, cette capacité de se détacher totalement de qui je suis aux yeux du Peuple pour n’être que Thybalt Andreotti. Certains dirons que je quitte mon poste à cause de ce mariage, ils n’ont pas tords, je désire fonder une famille, construire cette famille dont je prône les valeurs à l’instar des cinq dernières générations d’Andreotti. Je ne me retire pas de mon poste parce qu’elle me l’a demandé, elle est plutôt d’avis que ma place est ici, mais je désire avancer pas à pas avec elle, recommencer à Vérone ma vie, suivre le chemin normal d’une carrière politique et devenir un mari, un père, et peut-être même un grand-père. » Il capta l’ombre d’un sourire sur les lèvres de son grand-père alors qu’il ne pouvait voir la réaction de Tosca. Il ne cachait pas son désir de fonder une famille mais il ne l’avait jamais vraiment formulé à voix haute. « Vous avez donc fait un mariage d’amour ? » Questionna le journaliste avec étonnement. « Bien entendu. » Répondit-il intrigué par l’étonnement de son interviewer. « Dans ce cas-là pourquoi avoir désiré faire annuler ce mariage ? » Tosca qui observait Thybalt fut une fois de plus étonné de constater qu’il gardait une telle maitrise de lui alors que la situation devenait délicate, pas une seule expression, pas un seul sentiment ne filtrait sur son visage. Lisse, inexpressif, un véritable masque. Mais elle qui lisait si bien dans ses yeux captait la tension dans son regard et voyait presque les rouages de son esprit tournés à plein régime. Giulio qui ne s’était pas attendu à un pareil retournement de situation fronça les sourcils, esquissa un geste pour intervenir mais la main calme de Thybalt se posa sur son avant-bras, lui intimant de se calmer sans pour autant lui manquer de respect. « J’aime ma femme et je la respecte. Mais nous sommes un jeune couple et l’un comme l’autre ne sommes pas à l’abri d’un instant de panique, de doute. Vous l’avez souligné vous-même, nous avons désiré faire annuler notre mariage, désiré, une demande qui n’a jamais abouti. Nous sommes jeunes et la vie que je mène n’est pas de tout repos, voyages, horaires improbables, réunions à toute heure du jour et de la nuit… Je l’aime et si cela n’avait pas été le cas je n’aurais peut-être jamais remis en cause mon implication dans ma charge, je désire recouvrer la santé, poursuivre ma rééducation, me reconstruire et construire une famille. Mais je suis un homme comme un autre. Il m’arrive d’avoir peur. Mais grâce à l’amour de ma femme je me sens plus amène de mener de front de nouveaux défis et une nouvelle vie de famille. » Giulio pressa son bras, signe qu’il était désormais temps de ne pas en dire plus, il avait fait preuve d’honnêteté et avait construit un argumentaire qui se défendait. « Et si nous en revenions aux perspectives d’avenir de mon petit-fils, même si je ne cache pas mon impatience à voir une nouvelle génération d’Andreotti foulée le sol de cette planète. » Giulio Andreotti était bien meilleur que le meilleur des attachés de presse que Thybalt aurait pu trouver pour superviser cet entretien. Il fut ensuite question de la passation de pouvoir d’un Andreotti à un autre et le journaliste laissa à Thybalt un léger répit pendant qu’il se penchait sur le cas de son grand-père. Un sourire effleura les lèvres du jeune homme tandis qu’il étirait ses bras derrière le dossier de son siège sa main effleura une paume bien connue, une légère décharge traversa son corps, une décharge qui se transforma aussitôt en une douce sensation d’apaisement. Il sourit et effleura la main de Tosca avant de revenir sagement à sa position initiale. Il se prêta ensuite à la séance photo officielle qui semblait être un rituel incontournable lorsque l’on donnait une interview pour un grand quotidien. Le journaliste assista pour qu’il figure tous les trois sur l’une des photographies, convaincre Tosca ne fut pas aisé, il dû lui murmurer discrètement que son refus semblait aussi suspect que sa subite apparition et disparition de tout à l’heure pour qu’elle se prête enfin à la pose obligatoire. Il passa son bras autour de la taille de la jeune femme, tandis que son grand-père lui encerclait les épaules de l’autre côté, sourires figés, poses guindés mais éclat amusés dans les yeux. Thybalt glissa discrètement à l’oreille de Tosca. « Puisque nous n’avons pas eu de photographies de mariage. » Elle lui écrasa discrètement les orteils en adressant une poignée de main professionnelle au journaliste.
(…)
Branle-bas de combat général. Les téléphones sonnaient sans discontinuer, chaque appel était méticuleusement prit en charge par une dévouée standardiste qui répondait aux questions, réorientait les appels, et passait parfois un journaliste à son interlocuteur lorsqu’elle flairait le scoop. Assis ou debout, les gens criaient, marmonnaient ou juraient. De tous côtés, les claviers des machines des ordinateurs cliquetaient à des rythmes variés, certains retapaient leur articles, d’autres prenaient encore le temps de vérifier leurs informations. Il flottait dans l'air une odeur de café réchauffé, de sueur, de chewing-gum anti-tabac (foutu loi de répression de la nicotine) et une légère touche d’excitation. La salle de rédaction du Reppublica était comparable avec une grosse ruche, bourdonnante d’activité et d’ordres divers, au moment du bouclage on pouvait aussi poussé la comparaison bien plus loin : asile de fou, hall des urgences etc.. Mais bien entendu pour les journalistes présent ce soir-là, rien d’anormal, chacun était trop absorbé par ses propres urgences pour prêter attention à celles des autres et augmentait sensiblement son niveau sonore pour se faire entendre de qui de droit. Chacun se concentrait sur son propre article et ses propres sources tous stimulés par l’approche de la fin du délai, du départ de l’épreuve chez l’imprimeur, tous espérant avoir encore le temps de s’approprier la première page du journal le plus lu de Rome et d’Italie.
Andréas Backer, le journaliste « people » du journal guettait calmement son imprimante pour relire une dernière fois le fruit de son travail. Andréas n’était pas un novice en matière de presse, et s’il était la risée de ses collègues politologues car il s’occupait des grands « évènements people » comme on disait du Sénat, il n’en était pas moins un très grand journaliste. S’il s’occupait de la rubrique « people » de la Reppublica c’était bel et bien parce qu’il avait commis une boulette sur le plan privé, non pas parce qu’il était incompétent. Coucher avec la femme du fils du patron n’était jamais une bonne idée, mais il rêvait d’amour et de gloire et il s’était brûlé les ailes. Cela n’ôtait rien à son talent de journaliste d’investigation, il s'était fait les dents dans la presse écrite des plus grands quotidiens d’Italie, il avait commencé au bas de l’échelle à l’âge de 15 ans comme vendeur de journaux dans le rione de Pigna puis il avait poursuivi des études de journaliste, jusqu'à sa consécration et son embauche à la Reppublica. Il avait servi le café, arpenté les couloirs comme garçon de courses, rédigé des notices nécrologiques, assuré la couverture d'obscures foires avant d’obtenir la chance d’être promu journaliste d’investigation. Si son manque de discernement dans la sphère privée l’avait conduit à redescendre d’un échelon, il avait toujours les dents qui rayaient le plancher et espérait pouvoir reconquérir sa place. Il avait un don précieux, celui de flairer un bon sujet et à en tirer toute la substance. Cette fois il sentait qu’il tenait son scoop, sa chance de revenir sur le devant de la scène. Sa relecture de son article terminée, il héla un garçon de courses, puis se carra dans son siège. C'était sa première pause depuis qu’il était rentré de Trastavere quelques heures auparavant. Il sentait que cette fois il tenait un scoop, une nouvelle qui serait sur toutes les bouches demain matin si son article passait la censure de son rédacteur en chef. Il se prit à rêver que son article ferrait la une. Après tout la démission de Thybalt Andreotti était l’évènement de cette fin de semaine. Son discours d’adieu au Sénat avait fait pleuré toutes les ménagères qui depuis son élection avaient fait gonflées l’audimat de la chaine parlementaire. Pas de doute, si son article paraissait, il verrait son avenir changé. Il quitterait le « service people » pour avoir accès à de nouveaux grands reportages, des interviews polémiques, des articles de fonds. Finit les réceptions, les cancans, bonjour le retour du bon vieux Andréas. Thybalt Andreotti et Tosca Dal Cappello, il le sentait, lui ouvriraient les portes du journalisme d’investigation.
(…)
Bien loin du siège de la Reppublica et inconscient de la triste manigance qui se tramait dans leur dos, Thybalt et Tosca visitaient incognito la ville. Elle l’avait forcée à se changer, a abandonner sa canne, il n’en avait plus besoin d’après elle. C’est coiffé d’une casque enfoncé jusqu’aux yeux, lunettes de soleil sur le nez en jean usée et tee-shirt informe que Thybalt Andreotti, Monsieur meilleure client d’Armani, flânait main dans la main avec sa femme, Tosca Dal Cappello. Ils avaient tout l’air d’un couple amoureux d’une vingtaine d’année à la découverte d’une ville regorgeant de trésor. Ils se chamaillaient sur tout et rien et leur bonheur faisait sourire les passants qui flânaient encore eux aussi.
« Bon très bien, je l’admet mais je le nierais si tu rapportes à qui que ce soit cette conversation. Je me sens plus à l'aise dans un jean que dans un costume trois-pièces. Tu es contente ? » Demanda-t-il en lui chatouillant les côtés. La glace qu’elle tenait dans sa main libre, celle qui n’était pas enroulée autour de la sienne, tangua dangereusement mais elle réussit à la sauver en la plaquant contre le visage de son mari. Thybalt éclata de rire, le visage barbouillé de glace mais vola tout de même une léchouille de glace sur la pyramide glacée que sa femme tentait à la main. « Il t’en reste un peu là. » Se moqua-t-il en lui barbouillant le visage de crème glacée à son tour. Ils riaient, un rire joyeux et libre, ici personne ne les connaissait, personne ne savait qui ils étaient, libre d’être un couple comme un autre. Haletant il se cramponna à elle et lui vola un baiser sulfureux, récoltant la glace qui maculait son visage. « Excellente texture, parfum enivrant. » Commenta-t-il à voix basse en l’entrainant dans la rue à sa suite. Et soudainement il se figea face à une petite maison mitoyenne à une autre, la façade était peinte en rouge, une couleur que les années avaient fanées mais qui donnait tout son charme à cette maison typique des Rioni de Rome. Une petite courette prolongeait l’entrée de la maison dans la rue, un sourire effleura les lèvres de Thybalt alors qu’il posait sa main sur le portail en bois blanc. « C’est ici que j’ai grandis. Troisième fenêtre sur la droite, ma chambre de jeune homme. Deuxième fenêtre sur la gauche, la chambre de Reena où j’ai plusieurs fois manqué de me faire scalper lorsqu’elle faisait du rangement en jetant ses chaussures dans toute la pièce. Rez de chaussée seconde fenêtre, la cuisine dans laquelle mon père m’a appris tout ce que fallait savoir sur la cuisine pour se faire pardonner d’une femme en colère. Et éviter de mourir en mangeant les plats de ma sœur…. Et c’est au coin de cette rue que j’ai embrassé ma première petite amie… Et c’est ici que vivait mes parents depuis leur mariage. C’est chez moi. » Il l’attira contre lui, l’adossant contre la barrière et l’embrassa doucement avant de relever la tête vers le ciel et de lancer à la cantonade. « Tu vois maman, je t’avais dit que je finirais par ramener à la maison une fille bien. » il récupéra une clé dans sa poche de pantalon. « Tu veux rentrer ? » Proposa-t-il en glissant une main dans sa chute de rein pour la guider vers le porche.
(…)
« Thybalt Andreotti et Tosca Dal Cappello, si ça ce n’est pas une sacré surprise. » Le couple se figea soudainement, inquiet. Ils étaient entrés dans ce café dans le but de se rafraîchir avant de reprendre leur promenade au gré de leur envie. Thybalt voulait l’amener visiter le colisée, les parties infranchissables sans un badge, peut même pousserait-il jusqu’à lui faire l’amour dans ce lieu chargé d’histoire … Des projets il en avait des tas, peut être allait-il s’achever en cet instant car quelqu’un les avait reconnu. Sara Hale avait vieillit, vingt-cinq années s’étaient écoulées depuis qu’elle avait rencontré ses deux-là, et pourtant elle s’en souvenait encore. Voyant leur air affolé elle sourit. « Non ne vous affolez pas. Vous ressemblez tellement à vos mères tous les deux. » [/color]Cette fois ils se figèrent et la regardèrent interdit. « Comment, elles ne vous ont rien dis ? Pourtant les murs de la réserve sont couverts des photographies de vous deux qu’elles nous envoyaient ! » Ce fut Thybalt qui retrouva la parole le premier. « Excusez-moi mais … Qui êtes-vous ? » « Oh bien sur je suis bête. Vous avez connu Mario, mon père du temps où il était encore assez en forme pour tenir le café … Don Juan c’est comme ça que Bianca l’appelait. » « Vous … Ma mère … » Il ne comprenait pas. « Asseyez-vous ! Je vais vous apporter de quoi vous déshydrater ! Je n’arrive pas à croire que leurs prédictions se sont révélées vraies ! Vous êtes ensemble ? Mariés ? J’étais sûr que Bianca avait hérité d’un peu du sang gitan de sa mère ! » Tosca fronça les sourcils, le dévisagea, il souleva les épaules de surprises. Revenant avec une bonne bouteille de vin blanc et trois verres elle prit place avec eux à une table. « Nous nous connaissons ? » Demanda Tosca en cherchant si ce visage lui était familier. « Pas vraiment, la première fois que je vous ait vu tous les deux vous étiez encore dans le ventre, énormes, de vos mères. J’avais dix-sept ans et je m’apprêtais à terminer le lycée. C’est ici que vos mères ont fait connaissance, en réalité nous sommes des cousines germaines vous et moi Tosca. Mon père était persuadé d’avoir été à l’origine de l’amitié entre Bianca et Isabella, alors pour le remercier elles lui envoyaient des photos de vous, des photos de famille… » Sara entama un récit passionné. Décidément Rome était une ville plein de souvenirs, des souvenirs qui ne leur appartenait pas toujours. La joue posée dans la paume de sa main, son autre main emmêlée à celle de Tosca, Thybalt écoutait l’histoire de leur toute première rencontre avec un sourire amusé. Le Destin.
Tosca J. Dal Cappello
FORBIDDEN FRUIT — Cause the morning always come to kill the dream —
■ Messages : 5364 ■ Age du Personnage : 24 ans ■ Logement : Casa di Giulietta, rien de moins ! ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Dim 3 Juil - 14:41
« Définition d’urgence majeure ?» cinglait la voix féminine de l’autre côté de la table. « Hum... Je ne sais pas... Un cas de combustion spontanée ? » rétorquait celle plus masculine, juste à côté d’elle, le regard largement rieur, mais la mine innocente. « Tu sais que ce n’est pas possible. » répondait la jeune femme en fronçant le nez et en secouant ses ondulations brunes. « Tu sais très bien que c’est totalement possible. » insistait l’homme en lui lançant un regard par en-dessus qui semblait être équivoque puisque la jeune brune s’empourpra rapidement, avant de détourner le regard. Le jeune homme s'esclaffa, bientôt imité par l’hôte, en face d’eux, qui observait la scène au travers du carmin translucide de son verre de vin. Ça avait quelque chose de rafraîchissant qui ne devait absolument rien au vin. Cette scène, une parmi tant d’autre, était comme un coup de défibrillateur sur son vieux cœur atrophié. Voilà de nombreuses années qu’il dinait seul, isolé au bout d’une table trop grande comme un vieux loup de mer échoué sur une île déserte après le naufrage de son navire, équipage compris. Il avait toujours eu une sainte horreur des diners «décontractés» comme se plaisait à les qualifier sa belle-fille, il aimait ceux d'apparat, il aimait le protocole strict et les mondanités qui allaient de paire. Il avait cultivé ça jusque dans sa propre demeure, même lorsqu’il se trouvait entouré de sa plus proche famille lors d’un déjeuner dominical. Il avait aimé ce silence entrecoupé des bruits des couverts contre les assiettes, repas durant lesquels on ne parlait que si l’on avait quelque chose d’intelligent à exprimer, si bien que personne ne soufflait mot, finalement, de peur d’offenser l’hôte. Combien de fois avait-il grogner contre l’agitation dont faisaient preuve ses petit-enfants à table ? Combien de fois avait-il exigé d’eux qu’ils s’y présentent tirés à quatre épingles ? Combien de fois avait-il surprit le jeune garçonnet tirer sur un col de chemise trop serré qui le mettait mal à l’aise ? Combien de fois avait-il sévit pour qu’il se tienne droit, ne dépose pas les coudes sur la table, et mange en silence après un bénédicité de trois plombes ? Combien de fois avait-il pourrit la vie de son entourage de la sorte ? Aujourd’hui, après des années d’une solitude imposée, aujourd’hui qu’il était contraint de se plier à tout autre style de diner, il prenait conscience de ce à côté de quoi il était passé. Ce soir, il n’y avait pas eu de bénédicité, son petit-fils lui ayant préalablement exprimé les relations compliquées que sa compagne entretenait avec Dieu, il n’y avait pas non plus eu de protocole, les deux convives s’installant de leur propre chef juste en face du maître des lieux, tout au bout de la longue table, il n’y avait pas eu non plus de tenue correcte, la jeune femme s’étant présentée en tee-shirt trop grand et un jean trop vieux, à table. Pour la première fois de sa vie, il avait laissé faire, une autre forte personnalité éclipsant la sienne, et bizarrement, c’était très agréable. « Peu importe ! Ça n’excuse pas la présence d’un téléphone à table. » s’était reprise la jeune femme son moment de malaise passé. « Dites-lui, têtedetélé, que ça ne se fait pas. » le prenait-elle à parti, une main tendue dans sa direction. « En effet, c’est très inconvenant, Thybalt. » répondit-il dans un sourire espiègle avant de s’octroyer une gorgée de vin. Il ne voulait pas participer, il préférait intervenir le moins possible, se contenter d’être le spectateur de ce petit divertissement qu’ils lui offraient depuis qu’ils avaient passé la porte un peu plus tôt dans la journée. Ce petit bout de femme était entrée dans sa vie il y a quelques mois, mais jusqu’à présent elle n’avait été qu’un contact lointain via visio-conférence, un contact de quelques minutes, tout au plus, avant l’intervention systématique de son petit-fils. Il s’était fait une vague idée du phénomène, mais en avait largement sous-estimé l’étendue. Lorsqu’elle avait franchie le seuil de sa maison, elle n’avait pas affiché l’air habituel que l’ont surprend sur le visage des visiteurs, surtout lorsque ces visiteurs s’apprêtent a rencontrer Il Divo. Elle n’avait pas été ni impressionnée, ni intimidée, elle s’était montrée avenante et chaleureuse, un rien irrespectueuse aussi, en s’obstinant à l'appeler «têtedetélé» plutôt que Giulio, monsieur Andreotti, ou comme tout le monde, Sénateur. Elle ne s’était pas tordue les doigts, ni n’avait bégayé, elle n’avait pas revêtue sa tenue du dimanche qui l’aurait fait ressembler à une bonne-soeur, elle ne s’était pas maquillée, et probablement pas coiffée non plus. Elle n’avait pas appréhendée de se retrouver seule avec lui, c’est même elle qui avait foutu Thybalt à la porte. Et plus surprenant encore, elle s’était montrée d’une compagnie absolument délicieuse. Elle l’avait fait parler politique, non pas parce qu’elle comptait gagner des points de cette manière, mais simplement parce qu’elle n’y connaissait absolument rien et qu’elle faisait partie de ces gens intelligents qui ne supportent pas de ne pas comprendre quelque chose. Lorsqu’elle avait eu faim, elle ne s’en était pas cachée de peur qu’il se rende compte qu’elle était humaine et qu’elle avait besoin de se nourrir comme n’importe quelle personne dont le système ne serait pas composé de fleurs en tout genre -comme aimaient le prétendre bon nombre de filles-, elle l’avait dit, et s’était même levée pour aller se servir elle-même. Elle était revenue des cuisines avec un plateau du pêcher mignon de Giulio, un pécher tellement américain qu’il ne l’aurait jamais avoué même sous la torture : Philadelphia et pain, sans assiette, avec juste un couteau à se partager. Et ça, personne ne le savait, et surtout personne n’aurait pu imaginer Il Divo s’adonner à ce type de grignotage devant la télé. Et lorsque Thybalt était finalement rentré quelques heures après son discours, ils les avaient retrouvé au salon riant comme des idiots, enfin Tosca riait fort, Giulio lui se contentait de son sourire sonore que peu de personnes connaissaient d’ailleurs. Un sourire qu’il avait finalement transformé en rire ce soir, lorsque Thybalt avait fait rosir sa compagne avec une allusion qui devait, sans conteste, être d’ordre intime. « Tu vois ? Même Il Divo le dit. Et ce qu’Il Divo dit, personne ne le contredit. Tu sais ce qu’il te reste à faire ? » Elle avait ramené Giulio au temps présent en tendant sa paume vers Thybalt, gigotant des phalanges en attendant qu’il y dépose le Blackberry qu’il malmenait depuis le début du diner. Le jeune homme jeta un coup d’oeil plaintif à son grand-père qui lui signifia, d’un mouvement de tête, d’obéir à sa jeune épouse. Un soupir à fendre l’âme plus tard, il rendait les armes, mais pas sans un dernier effort de fierté. « Je le fais, mais seulement parce que je ne souhaite pas éveiller plus encore ta jalousie, mon ange. » C’était bien un Andreotti, ça, combattif jusqu’au coup de grâce. « C’est ça, cause toujours, Andreotti. » Répliqua la petite insolente en se relevant à moitié pour glisser le portable dans la poche arrière de son jean.
Un instant de silence suivi cette répartie très constructive, silence qu’ils comblèrent en soutenant le regard de l’autre, semblant y poursuivre une conversation muette qui échappait et continuerait d’échapper totalement au commun des mortels. Silence qui, s’étirant trop en longueur fut rompu par le patriarche, abattant son verre contre le table comme pour rappeler à ses convives sa simple présence. « En parlant d’Andreotti, quand allez-vous prendre ce nom de façon officielle, Giulietta ? » Deux paires d’yeux se tournèrent simultanément dans sa direction. Il n’en demandait pas tant. Ce fut Thybalt qui prit la parole en premier, l’air à la fois choqué et gêné. « Grand-père, tu ne devrais pas l’a... » Mais il n’eut guère le temps de poursuivre, Tosca l’arrêtant au vol en posant une main fraîche sur son avant-bras. « Laisse, je peux répondre à ça.» Lui dit-elle. « Je t’assure. » ajouta-t-elle alors que son regard inquiet la surplombait. « Tu le laisses t’appeler Giulietta ? » S’étonna-t-il. « Je l’appelle Têtedetélé, c’est un juste compromis je trouve... Et il se trouve qu’il est très bien renseigné. » En effet, rien ne pouvait échapper à Giulio Andreotti, pas même le deuxième prénom qu’une jeune femme pouvait avoir en horreur. Il était sournois, mais bon joueur. Tosca aussi. Alors, elle trempa ses lèvres dans son verre de vin, puis reporta son attention sur le vieil homme qui lui faisait face. « Je ne me suis toujours pas décidée au sujet du divorce, alors la question que vous devriez vous poser n’est pas de savoir quand je compte porter ce nom, mais si je compte un jour le porter. » « Oh, nous savons tous, ici, que vous ne divorcerez jamais de Thybalt. » Le regard que lui offrit son petit-fils le détrompa à ce sujet, aussi ajouta-t-il rapidement : « Enfin tout le monde à part Thybalt, mais dans la mesure où il a toujours nourris un profond masochisme allant jusqu’à se persuader qu’il est bien plus épris de vous que vous ne le serez jamais de lui, je ne pense pas qu’il soit exactement une référence en matière de discernement. » Il balaya son propre argument d’un mouvement de main, comme si l’aveuglement de son petit-fils sur ce sujet précis était tellement ridicule qu’il ne valait même pas le coup de s’y attarder d’avantage. « A la lumière de ce qui s’est passé aujourd’hui, je pense qu’il serait peut être temps de couvrir vos arrières, ainsi que celles de Thybalt. Les scènes de ce genre n’ont rien d’exceptionnel, c’est le quotidien des hommes politiques et autres personnalités publiques, elles sont destinées à se reproduire et se multiplier. Sauf qu’à la différence d’une célébrité de l’audiovisuel, un homme politique se doit d’être irréprochable, un politicien vantant les mérites d’une société catholique ne peut se permettre d’être surpris volant la femme d’un autre... » « Je n’ai pas volé la femme d’un... » tenta de le couper Thybalt. « SI ! C’est exactement ce que tu as fait ! » trancha Giulio, en lançant un bref, mais sévère regard à son petit fils, donnant un net aperçu à Tosca du pourquoi on craignait tant Il Divo. « Et je vous assure que cela va se produire, vous ne pourrez pas cacher cela indéfiniment, vous ne pourrez pas vous cacher indéfiniment. » Son attention était de nouveau sur Tosca qu’il tentait de ramener à la raison. « Vous allez forcément vous faire prendre. Un jour où vous vous fierez à un sentiment de sécurité caduque, et que vous vous laisserez aller à un geste tendre, il y aura quelqu’un pour vous surprendre et vous vendre. Hier, Thybalt se disait en famille, mais qui vous dit que parmi la cinquantaine de personnes présentes, l’un d’eux ne va pas vous vendre à la Presse, juste pour quelques billets ou un éphémère instant de gloire. Et cet après-midi encore, avec ce journaliste... » « Je n’ai pas été très discrète, c’est un fait. » Avoua Tosca, mine basse. « Non, ils n’y ont vu que du feu, mon ange, ce n’était rien... » « Bien sûr que si Thybalt ! Comme tout le monde t’a vu la saisir par la taille lors de la réception d’hier soir. Comme si les gens ne s’interrogeaient déjà pas suffisamment sur ta nécessité de voyager avec ta photographe plutôt qu’avec cette épouse mystérieuse. Thybalt, je ne sais pas si tu es sincèrement naïf ou juste machiavéliquement animé par la volonté d’être démasqué. Si je ne te connaissais pas aussi bien je serais tenté de pencher pour la dernière hypothèse et j’en éprouverais même une certaine fierté à ton égard, mais je me doute qu’il s’agit de simple naïveté, et après ce que tu as vécu, je me demande encore comment tu es capable de croire en la loyauté d’un si grand groupe ? Tu es politicien, tu n’as pas le droit d’être aussi aveugle quand à la nature humaine. L’Homme est fourbe et profondément égoïste, personne ne protègera ton idylle, surtout pas tes gens, membres de ton cabinet, qui se retrouvent sans emploi après ta décision d’abréger ton intermittence. » Il s’octroya une nouvelle gorgée de vin avant de désigner Tosca d’un mouvement de menton. « Elle semble bien plus lucide que toi, cachant cette relation à tout le monde y compris son propre frère. Et toi ? Tu l’as dit à qui ? Tu l’as montré à qui ? Peux-tu affirmer qu’ils sont bien plus digne de confiance que son frère ? » Personne ne répondit à ces questions, elles n’appelaient pas vraiment de réponses. C’était une évidence que Thybalt se montrait moins discret que Tosca, et sûrement avait-il raison, il n’avait rien à cacher, lui. Et ce petit laïus n’avait pas pour but de l’empêcher d’agir de la sorte, mais plutôt de mettre la jeune femme au pied du mur, et lui faire comprendre que cette situation n’avait que trop duré. Tout comme cette conversation. « Bien. » Conclu-t-il face à ce silence. « Vous ne m’en voudrez pas mais il se fait tard et je suis un vieil homme. Lucia vous a préparé la chambre, ce sera bien plus pratique pour la réunion informelle de demain matin avec ton ex-directeur de cabinet. Il souhaite prendre en charge ta campagne pour la mairie de Vérone, je lui ai dis de venir en parler avec toi au petit-déjeuner afin de te libérer le reste de la journée. » Il fit racler les pieds de sa chaise contre le parquet en reculant. Comme l’avait précisé Tosca, on ne contredit pas Il Divo, aussi savait-il d’avance que personne ne viendrait discuter sa décision de les héberger pour la nuit. Toutefois, lorsqu’il eut passé la porte et prit la direction des escaliers, il entendit la jeune femme souffler à son compagnon : « Ha bah ça m’arrange pas, ça. J’ai pas mon pyjama, moi. » Et c’était ça qui l’inquiétait le plus ?
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« Giulio ! » Manifestement, à en croire la voix qui venait de tonner dans son dos bossu, il s’était trompé sur plusieurs points. 1/ L’absence de pyjama n’était pas ce qui inquiétait le plus la jeune femme. Et 2/ La règle «on ne contredit pas Il Divo» allait connaître sa première exception. Le vieux homme s’immobilisa sur le palier, à quelques pas de l’entrée de son bureau qui menait lui-même à sa chambre. Les bruits de cavalcades dans les escaliers le forcèrent à se retourner, surprenant ainsi une vaine tentative de son petit-fils à retenir sa femme, la mettant certainement en garde contre le caractère impérieux du sénateur à vie. « Laisse-moi faire. » lui souffla-t-elle en détachant les doigts qui lui enserraient le poignet. « Fais-moi confiance, et va m’attendre dans la chambre, je n’en ai pas pour très longtemps. » Giulio souleva un sourcil devant cet ordre direct donné à son petit-fils, connu pour ne pas les apprécier, et sa surprise s’accentua en observant ce dernier lui obéir et s’éloigner avec réticence pour rejoindre sa chambre. Ça, c’était une première. Quel était le secret de ce petit bout de femme à peine féminin pour se faire obéir de la sorte par un des hommes les plus puissants d’Italie ? D’après ses renseignements, elle cultivait le même autoritarisme avec cette bande de machos qui constituaient sa famille et sa garde rapprochée. Étrange. « Tosca ? » Souffla-t-il, mielleux, après s’être reprit, utilisant son prénom comme elle venait de le faire pour lui. « Je me doute qu’il doit être dans vos habitudes de vous contentez d’un coup d’éclat puis de tirer votre révérence comme un Prince, mais je n’ai pas l’intention de me laisser dicter ma conduite par quiconque. » « C’est ce que j’ai cru comprendre. » Avoua-t-il alors qu’elle le rattrapait à vive allure. « Vous m’avez posé une question mais n’avait pas attendu de réponse. Je comprends maintenant que vous n’en vouliez pas, il ne s’agissait que d’une introduction à votre blablatage qui n’avait pour but que de nous plier à votre volonté. Mais ça ne peut pas être aussi facile, vous ne pouvez pas nous mettre la pression, nous faire peur en montrant les dents, et espérer que tout s'enclenche comme par magie. Si ça ne s’est pas encore enclenché, c’est qu’il y a des bonnes raisons, je ne fais pas ça pour amour du secret ou quelque chose de ce style, et si vous êtes aussi bien renseigné que vous le prétendez, vous devriez en connaître les raisons. » Oui, elle était impressionnante lorsqu’elle était en colère, il devait bien le reconnaître. Malgré sa petite taille et son allure chétive, elle en imposait, la gamine. Ce qui le fit sourire, avant de la saisir doucement par le coude pour la conduire jusque dans l’intimité de son bureau. Un bureau qui avait abrité de nombreuses décisions extrêmement importantes pour le pays, et qui aujourd’hui hébergerait un débat domestique, qu’il traiterait avec le même sérieux que tout le reste. Refermant la porte derrière elle, il alla s’installer dans un des fauteuils club qui encadrait son bureau en bois sombre, avant de lui désigner celui d’en face. Comme il s’y attendait, elle refusa de s’y installer, préférant rester debout. « J’en connais les raisons, oui. Vous vous étiez fiancée avant de rencontrer mon petit-fils, et vous mettez un temps infini a rompre ces fiançailles, malgré le fait que vous soyez, depuis, mariée à un autre. » énonça-t-il avec calme, les mains jointes sur ses genoux. « Effectivement, dit comme ça je passe pour une lâche. Mais les choses ne se sont pas passées ainsi. J’ai été promise en mariage à un autre homme, un homme que j’aime profondément et qui donnerait sa vie pour moi. Je n’ai jamais voulu tomber amoureuse d’un autre, et même si cet amour est plus fort et dépasse largement le précédent, je n’ai jamais souhaité en arriver là. Le mariage était blanc, il n’a jamais été question que de rendre service à Thybalt, nous n’étions pas censé rester mariés, nous ne devrions plus l’être. Je suis quelqu’un de loyal, et jamais je n’annoncerais à mon fiancé que je le quitte parce que j’en ai épousé un autre pendant mon absence. Ce mariage n’a rien d’un mariage d’amour, et il était hors de question que je me rende coupable d’adultère. Le mariage n’a été consommé que plusieurs mois plus tard, alors que je croyais être dans un de mes nombreux rêves très... Réalistes. Je ne regrette pas ce qui s’est passé, sinon je ne me serais pas rendue coupable de toute une série d’adultères plus... Intéressants les uns que les autres... » Elle piqua un far, portant ses mains à son visage pour tenter d’en camoufler les effets visibles sur ses joues et sa nuque. Tentative inutile, Giulio souriait à pleine dent. « Mais voilà, rien de tout ceci n’était prémédité, et rien de tout ceci ne devrait être si je veux pouvoir continuer à me regarder dans la glace sans honte, et maintenant c’est juste impossible ! Et le fait que vous me colliez la pression n’y change rien, absolument rien, ça me donne au contraire l’envie de divorcer sur le champ et de partir en exil très très loin, loin de Matteo, et loin de Thybalt. Mais... » « Mais vous ne pouvez pas. » Poursuivit-il à sa place. « Vous pouvez vous éloigner de ce Matteo, mais pas de Thybalt, vous en êtes tout bonnement incapable. » « Et c’est bien ça le problème ! Je suis incapable de beaucoup de choses lorsqu’il s’agit de lui, et je déteste ça. J’aimerais être capable de raisonner normalement, mais c’est impossible, c’est comme si j’avais les neurones en guimauve, ankylosés, et je me transforme en ado lubrique dès qu’il me touche. J’ai besoin de comprendre d’où ça vient, comprendre pourquoi ça m’arrive à moi, pourquoi ça nous arrive à nous, j’ai besoin de comprendre, et ensuite je pourrais décider de moi-même si j’accepte ou non qu’on m’impose cet amour. » Finalement, elle s’était laissée tomber sur le fauteuil club, comme il l’avait prévu, ça aussi, et se tordait les mains comme elle aurait du le faire lors de leur rencontre. Visiblement il lui en fallait beaucoup pour la rendre nerveuse, et «beaucoup» venait d’être atteint. « Il me semble qu’il est déjà trop tard pour cela. Vous l’avez dit vous-même, voilà quelque chose contre lequel vous ne pouvez lutter. Pensez-vous qu’une fois les clefs en main vous serez en mesure de lutter ? » « Peut être, peut être pas. Mais au moins je saurais pourquoi, j’aurais certaines réponses. » « Et s’il s’agissait d’un simple coup de foudre ? » Elle releva un regard noir vers lui, si bien qu’il se sentit obligé de se justifier. « Quoi ? Ça existe, non ? » « Donc votre théorie c’est un coup de foudre par anticipation en fait ? Parce qu’au cas où vous l’auriez oublié, Thybalt me dessinait avant même de me connaître, ou de m’avoir vu. Et je suppose que vous avez lu le journal de Willy Shake ? » « Willy Pears. » rectifia-t-il. « Oui, je l’ai lu, et je dois admettre que c’est assez troublant et entraine bon nombre de questions. » Il se caressait le menton en réfléchissant. Tosca avait raison, mais il le savait depuis longtemps. Dès qu’il avait vu son visage s’afficher sur l’écran plasma de son bureau, il avait été intrigué par toute cette affaire. Il ne s’agissait pas seulement d’une vague ressemblance avec les esquisses, elle était le double vivant des dessins de son petit-fils, jusque dans la localisation de certains grains de beauté, ou encore la couleur exacte de ses prunelles d’une couleur pourtant indéfinissable. « D’accord, vous avez gagné. Puisqu’il vous faut des réponses avant d’officialiser quoique ce soit, je vais m’employer à vous en fournir, et en attendant, je protégerais du mieux que je peux votre mariage clandestin. Mais vous allez devoir avoir une discussion avec Thybalt, je suis puissant mais pas omnipotent, et si Thybalt vous saborde, je ne pourrais rien faire contre ça. » « Je me charge de Thybalt. » Souffla-t-elle, soulagée, en se relevant. Elle lui offrit un sourire et un « Merci. » avant de tourner les talons vers la porte. « Giulietta ? » L’interrompit-il alors qu’elle avait la main sur la poignée. « Oui, Têtedetélé ? » « Pour ce Cipriani... Hum... Il existe une solution plus rapide, vous savez. Venise est une ville très dangereuse, une chute dans le canal est si vite arrivée. Je pourrais m’en occuper si vous... » Elle l’interrompit d’un mouvement de main, un sourire amusé aux lèvres. « J’aime votre conception de l’irréprochabilité des hommes politiques. C’est vrai que voler la femme d’un autre est autrement plus grave que de faire assassiner cet autre, Il Divo. » Il sourit à son tour, murmurant un « touché. » à peine audible. « Gardez vos hommes à bonne distance de mon fiancé, pas seulement parce que j’aime cet homme, mais aussi parce que les Cipriani sont puissants et pas tout à fait irréprochables non plus. C’est aussi pour ça que je garde le silence pour l’instant et que je me montre très discrète, je ne souhaite pas que les conséquences d’un mariage avorté et d’un amour bafoué rejaillisse sur Thybalt. » Cette fois elle ouvrit la porte, et traversa son seuil pour rejoindre le couloir. « Bonne nuit, Giulio. » Murmura-t-elle avant d’en refermer le battant derrière elle. « Bonne nuit vaillante Tosca. » Souffla-t-il à son tour avant de s’emparer du téléphone fixe trônant sur son bureau.
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« Tu ne veux vraiment pas me dire ? » souffla-t-il à son oreille tout en resserrant l’étreinte de ses bras autour d’elle. Pour toute réponse elle grommela, à moitié endormie. « Même pas un petit peu ? » bailla-t-il avant de reposer brutalement sa tête trop lourde contre l’oreiller commun. « J’suis de taille à tout encaisser, tu sais ? Tiens, si jamais des zombies t’attaquaient, là, maintenant, tout de suite, et bien je te protégerais. » baragouina-t-il les yeux clos. « Hum... Mon héros. » lui accorda-t-elle en pivotant sur elle-même, glissant de l’autre côté pour poser sa joue contre son torse et ne plus lui présenter son dos. « Et tu f’rais comment pour les battre ? C'est coriace un zombie, quand même...» « Avec de l’ail et de l’eau bénite. » répondit-il en passant un bras autour de ses épaules, la ramenant contre lui dans une démonstration de l’excès de protection dont il pouvait faire preuve à son égard. « Ça c’est pour les vampires, Thybalt. Les zombies ils s’en foutent de ton ail, à la rigueur ils s’en serviront pour assaisonner ton cerveau quand ils le boufferont. » « Ha ouai ? » Ouai. « Il faut quoi, alors ? » Nouveau bâillement. « Faut les décapiter à la hache et ensuite les faire cramer façon barbec’ géant, tu vois ? » « Je vois. » « Finalement, heureusement qu’tu m’as... » soupira-t-elle à moitié ailleurs déjà. « T’y connais que dalle en zombie. »
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« Cela voudrait dire s’installer à Vérone. » Insistait-il, debout, penché sur la table s’appuyant dessus, les deux mains à plat, afin de dominer l’interlocuteur assit dans le fauteuil qui lui faisait face. « Cela peut durer un mois comme plusieurs années. Vous êtes prêt à quitter Rome et déménager en province pour suivre un politicien qui ne sera peut-être plus jamais sénateur ? Vous avez conscience qu’il s’agit d’un sabordage niveau carrière ? Avec la lettre de recommandation que je m’apprêtais à écrire, vous pourriez retrouver une place auprès de n’importe quel sénateur en fonction, ou sénateur en devenir. Vous avez conscience de tout ça, n’est-ce pas ? » Et le pauvre type qui tremblait comme une feuille, les mains moites qu’il essuyait régulièrement sur son pantalon en toile. « Ou...i. Oui, sénateur... Heu Thybalt.» bégaya le pauvre ex-directeur de cabinet en soutenant tant bien que mal le regard du politicien. Ce dernier soupira tout en se réinstallant dans son fauteuil à côté duquel l’attendait son café et ses croissants. Tosca, assise en tailleur sur le bureau, observait la scène avec intérêt, tout en engloutissant son propre croissant. Derrière elle, assit de manière plus traditionnelle, enfoncé dans le large fauteuil au allure de trône qui siégeait derrière l’impressionnant bureau, Giulio ne soufflait mot. Comme Tosca, il se contentait d’observer. « Je ne vous comprends pas, Ugo. Mais j’imagine que puisque votre décision est prise, je ne pourrais vous décourager de me suivre, n’est-ce pas ? » Le Ugo en question se contenta d’hocher la tête, Tosca soupçonnant qu’il était tout bonnement incapable de prononcer un mot de plus. « Très bien, alors je n’ai plus qu’à organiser votre arrivée à Vérone. » « Je peux m’occuper de ça moi-même. » S’empressa de répondre le jeune homme avec ferveur avant que Thybalt ne s’esclaffe. « T’entends ça ? » demanda ce dernier en se tournant à la fois vers Tosca et Giulio qui laissèrent échapper un léger ricanement. « La campagne débutera le mois prochain. » reprit-il en se retournant vers Ugo. « Si vous espérez trouver un logement à Vérone tout seul, sans la moindre intervention de ma part, et dans ce délais, vous êtes soit naïf, soit fou. » Le pauvre garçon jeta un regard paniqué en direction de Sca qui se contenta d’hausser les épaules en hochant la tête, signifiant qu’elle approuvait Thybalt sur ce coup. « Même moi je risque d’avoir du mal à vous trouver un logement dans un délais si court. » « Il pourrait venir chez moi, non ? La maison est grande. » Proposa Tosca, bien naïvement. « Non ! » Trancha Thybalt sans même la regarder. « Il en est hors de question. » La jeune femme haussa une nouvelle fois des épaules, tout en se tournant vers le grand-père derrière elle. « Ha mais en fait, vous portez la culotte à tour de rôle, un jour sur deux ? » murmura-t-il avec moquerie. « Ugo... » poursuivait Thybalt sans se soucier des messes basses en provenance du bureau. « Vérone est une ville musée, les maisons se lèguent de génération en génération. La mienne est dans la famille depuis le début du XXème siècle, et celle de Tosca... » La jeune femme leva la main prête à beugler un «prééééésente !» mais se contenta d’un sourire. « ... est dans la sienne depuis le XIIème siècle. » Ugo manqua recracher son café, et porta un regard différent sur la jeune femme qui lui était quasi invisible jusqu’à présent. « Minimum. » ajouta-t-elle en feignant le détachement. « Les premiers actes écrits datent du XIIème siècle, mais la maison existait déjà à cette époque, et était déjà dans la famille. Si ça s’trouve, elle a été construite par des Dal Cappello australopithèques, genre avec des grosses massues et un os dans le nez... Riez pas, Têtedetélé, tout est possible avec les miens. On créer des légendes, nous autres. » Thybalt l’observa un moment, perplexe devant son comportement décontracté et jmenfoutiste, puis reporta son attention sur le malheureux garçon. « Bref, tout ça pour dire qu’il est quasi impossible de trouver une maison à Vérone sans être véronais depuis plusieurs générations. Donc, je vais tenter de faire jouer mes relations afin de vous trouver un logement, et en attendant vous pourrez toujours loger chez moi. » Proposition qui fut accueillit par un sourire si rayonnant que Tosca en leva les yeux au ciel, provoquant l’hilarité de son hôte. Toujours aussi aveugle, Thybalt se laissa glisser plus confortablement dans son fauteuil, et s’empara de sa tasse pour la porter à ses lèvres. « Bon, puisque cette affaire est réglée, je n’ai plus qu’à vous donner rendez-vous à Vérone. Je ne vous chasse pas, mais j’aimerai assez profiter des quelques heures qu’il me reste à Rome sans parler politique, ni même penser politique... » « Je vous raccompagne. » annonça Giulio en s’extrayant de derrière le bureau. Tosca les observa quitter la pièce tous les deux, Têtedetélé refermant les doubles battants derrière lui, puis elle reporta son attention sur la démarche féline de Thybalt se dirigeant vers elle. « J’adore ta conception du ‘je suis tout à toi’. » souffla-t-elle en réceptionnant sa tête venant fourrager dans son coup comme un chat demandeur de caresses. « J’ai essayé de m’en débarrasser le plus rapidement possible, mais c’est pas facile avec Ugo. » grimaça-t-il furtivement avant de s’en aller fourrer son nez dans la masse de boucles brunes en en humant le parfum. « T’es au courant que ton directeur de cabinet est amoureux de toi, n’est-ce pas ? » lui demanda-t-elle en tentant de récupérer son attention. Il lâcha un petit rire, poursuivant sa découverte olfactive des ses cheveux, et tactile de ses épaules. « Je suis sérieuse, Thybalt. Ugo est gay, et s’il t’es dévoué corps et âme, c’est parce qu’il est amoureux de toi. » Relevant le nez de ses cheveux, il lui offrit une moue moqueuse, un sourcil relevé, un sourire en biais aux lèvres. « Ugo n’est pas gay, voyons. Je le saurais s’il était amoureux de moi, quand même. » « Comme tu savais pour la petite gamine qui fouillait ta bibliothèque avec la conviction que tu allais la demander en mariage et t’enfuir avec elle ? » rétorqua-t-elle dans un rire moqueur. « Thyb... Est-ce que...? Est-ce que t’es entrain de me renifler, là ? » « Ton odeur. C’est ce qui a cruellement fait défaut à mes dessins. Visuellement je te connais par cœur, mais il me reste à te découvrir au travers de quatre autres sens. » répondit-il sans cesser son investigation, sa voix suave et son toucher faisant grimper de plusieurs degrés la température corporelle de la jeune femme. « Ça sonne comme une invitation très alléchante, ça. » murmura-t-elle en posant une main sur sa nuque, l’invitant à mener des recherches plus approfondies. « On a combien de temps avant notre vol ? » « Quatre heures. » glissa-t-il en déposant un baiser sur son épaule, avant d’y frotter son nez, d’y trainer ses lèvres, et de se redresser brusquement. « Faut pas tarder, j’ai plein de choses à te montrer, tellement de choses. » Il déposa un rapide baiser sur son front, tandis qu’elle restait bouche bée devant ce soudain revirement de situation, puis il s’éloigna à grands pas en direction de la large porte du bureau. « Tu viens ? » demanda-t-il après avoir prit conscience qu’elle ne le suivait pas et qu’elle restait bloquée sur le bureau, les bras ballants, l’air surprit. Il tendit une main dans sa direction en fronçant des sourcils, plus de perplexité que de sévérité. « Heu... Oui. » hésita-t-elle en sautant, néanmoins, du bureau pour le rejoindre, attrapant sa main au passage. Visiblement, sa notion de priorité avait évoluée dans la nuit.
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« C’est ridicule. » Lâcha-t-elle, les mains glissées dans les poches arrières de son jean de peur d’avoir le réflexe de lui attraper la main en pleine rue, voir pire encore. Elle s’était laissée faire dans un premier temps, imaginant que son déguisement tout pourri lui offrait l’anonymat qu’elle espérait. Sauf qu’ils avaient été reconnu, par une connaissance de leur mère respective, mais tout de même. Cette femme n’avait pas hésité une seule seconde quand à leur identité, ce qui avait réveillé l’instinct méfiant de Tosca qui refusait, à présent, tout contact physique avec l’ex sénateur. Alors, pour rejoindre l’appartement de ce dernier, s’ils marchaient côte à côté, c’était tout de même à bonne distance, la distance de deux personnes se connaissant, se côtoyant, s’appréciant, sans rien de plus intime que ça, du moins elle l’espérait. « J’ai l’impression de me promener avec un homme-sandwich Ed Hardy. Et clairement, c’est pas un compliment.» Poursuivit-elle en donnant une pichenette dans la visière de la casquette qu’il portait. « C’est toi qui voulait qu’on se fasse discret. » Se défendit-il. En effet, elle s’était montrée très clair le matin même, lui expliquant qu’elle ne souhaitait pas se faire prendre la main dans le sac, ni même que cela revienne aux oreilles de qui que ce soit, par la voie de la Presse. Elle lui avait réexpliqué son besoin de demeurer dans l’ombre pour le moment, sans pour autant se montrer aussi directe qu’elle l’avait été avec Giulio. Il n’avait pas besoin de connaître les détails ni l’étendue de ses doutes, il devait simplement comprendre qu’elle lui offrirait tout ce qu’il souhaitait, à condition que cela soit dans un lieu clos en l’absence de témoins. Des conditions qui n’étaient clairement pas remplies en cet instant. « T’es aussi discret qu’un nudiste dans un village afghan, Thybalt. » Grogna-t-elle en reluquant une nouvelle fois sa tenue. Outre la casquette, il portait des lunettes de soleil, et avait baissé sa visière jusqu’à ce qu’elle tombe sur sa monture. Côté look, elle n’avait rien à y redire ayant choisi ses vêtements elle-même, lui faisant porter ce qu’elle avait envie de voir sur lui. Il avait enfin l’air de quelqu’un de son âge, et ça faisait du bien, même. La raie au milieu et le costume hors d’âge, c’est juste plus possible. Pourquoi pas l’armure scintillante et la coiffure à la Du Guesclin tant qu’il y était ? Bon, ok, elle avait conscience que sa fonction l’obligeait à une tenue correcte voir totalement désuète pour son âge, mais est-ce que cette fonction s’étendait jusque chez lui, dans le confort moderne de son appart ou de sa baraque véronaise, alors qu’il s’obstinait à porter des jean limite amidonnés et des pulls jacquard ? Comparé à ses tenues à elle, symbole s’il n’en faut du zéro effort vestimentaire, ils formaient un dérangeant contraste et un couple totalement désassorti et dérangeant. A part lorsqu’elle portait une robe de créateur qu’elle jugeait trop courte, trop alambiquée, trop serrée, trop inconfortable, ou à contrario lorsqu’il portait un jean hors d’âge et un tee-shirt à logo qu’il jugeait trop irrespectueux (depuis quand «get off my dick» était-il un manque de respect ?), trop large, trop long, trop informe, trop tape à l’oeil. Elle voulait bien faire des efforts, mais lui devrait en faire aussi, et là, elle en venait à se demander si la casquette et les lunettes étaient réellement pour préserver son anonymat envers leur idylle, ou bien envers les vêtements qu’il portait. « Je ferais un tabac en Afghanistan, alors. » répondit-il avec légèreté, un sourire s’affichant au coin de ses lèvres, suivant le mouvement de son regard qui partait, lui aussi, vers la gauche, à l’endroit où se trouvait Tosca. « Tu ferais un tabac n’importe où, n’importe quand, auprès de n’importe qui, dans n’importe quelle tenue. » Lui répondit-elle en répondant à son sourire par la même occasion. Elle devait déjà se méfier des gamines et des hommes en plus des femmes de leur génération, ne manquait plus qu’une poignée de cougars... Pas étonnant qu’il obtienne un électorat aussi vaste, finalement.
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« Voici un peu de lecture pour durant le vol. » Lui avait soufflé le vieil homme avec ses airs de conspirateur, tout en lui glissant une lourde enveloppe cartonnée entre les mains. Elle s’était montrée obéissante pour une fois, et avait attendu de se trouver installée dans le large fauteuil du jet privé qu’il les avait forcer à prendre en lieu et place du vol régulier qu’ils avaient réservé auprès d’Alitalia, pour ouvrir l’enveloppe avec fébrilité. Elle se doutait de ce dont il pouvait s’agir, mais elle n’imaginait pas qu’il ait pu rassembler autant de renseignements en moins de 24h. Il Divo n’avait pas usurper sa réputation, il était réellement puissant, très puissant. Et pendant que Thybalt consultait la Presse mondiale, elle entassait les documentations sur la table qui les séparait, au fur et à mesure qu’elle les survolait. Il y en avait tellement qu’elle ne savait plus où donner de la tête. Acte de naissance de William Benjamin Spencer dit Willy Pears né en 1837 à Clemson SC (Caroline du Sud), Acte de décès de William Benjamin Spencer dit Willy Pears, décédé le 3 juillet 1863 à l’âge de 26 ans en combattant du côté des Etats confédérés à la bataille de Gettysburg PS (Pennsylvanie), mais également plusieurs lettres datées de 1863 adressées à une certaine Harriet Jane Davis. Tosca les survola toutes, ne comprenant pas l’intérêt que Giulio avait pu leur trouver. Trop curieuse de découvrir les restes, elle les mit de côté en se promettant d’y revenir plus tard, et passa à la suite. La suite, c’était une série de reproduction d’oeuvres picturales dont elle connaissait déjà la plus part pour les avoir vu dans le journal du pauvre soldat, dont le fameux «verrou» qu’elle n’avait pas encore eu l’occasion de montrer à Thybalt. Elle leva le nez dans sa direction, mais il était toujours plongé dans les nouvelles du Monde, aussi reporta-t-elle son attention sur la liasse de clichés qui suivait, enroulée dans un élastique qui maintenait le tout ensemble. Elle prit mille précautions pour l’enlever, consciente de l’ancienneté et donc de la fragilité des photos en noir et blanc, légèrement jaunies par le temps, craquelées par endroit. Et lorsqu’elle y prêta une attention plus précise, la liasse lui tomba des mains, tandis qui cri grimpa dans sa gorge mais fut incapable de sortir. Les clichés (deux) et ce qu’elle avait prit pour d’autres clichés mais qui n’étaient que des esquisses d’elle-même, ou plutôt de son double d’un autre temps, voletèrent un instant avant de venir se poser délicatement, comme autant de feuilles d’érable poussées par l’automne, sur la moquette de la cabine. Thybalt releva enfin le nez de son journal, et ses traits passèrent de l’étonnement à l’inquiétude en une fraction de secondes. Son naturel protecteur ayant reprit le dessus, il se retrouva debout en un rien de temps, penché au-dessus de la table afin de ramasser le visage de Tosca entre ses mains, et d’attirer son regard qui fixait toujours le néant. « Sca ! Parle-moi, mon ange. Parle ! » scandait-il mort d’inquiétude. En lui parvenant, sa voix la fit sortir de son état de choc, et ses paupières papillonnèrent en se réglant sur le visage qu’il lui offrait. « C’est toi. » annonça-t-elle finalement, la voix faiblarde. « Évidemment que c’est moi, qui veux-tu que ce soit ? » « Non, je veux dire, c’est toi... Là. » Sans cesser de le regarder lui, elle indiqua de l’index un des clichés tombés au sol, face contre la moquette. Elle eut alors le loisir de l’observer tourner la tête vers l’allée suivant la direction qu’avait prit son doigt, puis remarquer les carrés blanchâtres jurant sur le sol gris perle. Elle vit ses yeux faire plusieurs fois la navette entre elle et les clichés, alors qu’il était déchiré entre l’envie d’aller en récupérer un pour comprendre de quoi elle parlait, et son besoin de rester là, le visage de sa femme toujours captif de ses mains, et de ne pas la lâcher, jamais, même pas une petite seconde, même pour juste aller dans l’allée à moins d’un mètre. Il oscilla encore quelques instants avant qu’elle le rassure d’un regard, et l’enjoigne à aller ramasser les clichés, tout ça dans un seul et même regard. Alors il s’écarta, à contre-coeur, et s’empressa de ramasser les deux clichés et six esquisses au sol. Lorsque ce fut fait, il les posa sur la table et vint s’installer dans le siège à côté d’elle, passant un bras autour de ses épaules, la ramenant contre lui, une main sur sa joue, redressant son visage vers lui afin de s’assurer que tout allait bien. « Ça va. » murmura-t-elle face à son regard à nouveau inquiet. « Regarde. » Elle s’avança légèrement pour récupérer un des clichés, qu’elle posa à plat sur la table. Thybalt s’avança à son tour, découvrant un groupe de personnes d’un autre temps. Des hommes en costume, des femmes en longues robes à corsets, des petites filles chapeautées, des garçonnets en culottes courtes, et au milieu de l’image, l’index de Tosca pointant un personnage. Il s’avança encore, plissant les yeux pour se concentrer sur le jeune homme qu’elle lui désignait. Un homme d’une vingtaine d’années, en costume également, veste ouverte sur un élégant gilet, petit col et cravate fine, pantalon à pli, chapeau haut-de-forme maintenu à la main, révélant une coiffure courte, raie sur le côté, et un visage souriant d’un jeune adulte de la bonne société du XIXème siècle. Un sourire qui aurait pu être le sien. Un visage qui aurait pu être le sien. Non, un visage qui était le sien !! Reposant brutalement le cliché sur la table, Thybalt lâcha un juron qui n’avait rien d’habituel dans sa bouche. « Nom de Dieu. Qui est-ce ? » « Willy Shake. » « Willy Pears ? Le Willy Pears qui te dessinait sans arrêt ? » « Lui même. » répondit-elle. « Il est censé être mort à Gettysburg en 1863. Sauf que tu es là, à côté de moi, et bien vivant. » Elle se tourna vers lui, observant son profil penché au-dessus du cliché. « T’es quoi ? » Il releva la tête vers elle, perplexe. « T’es genre highlander ? Tu peux pas mourir ? Une sorte de vampire à la con, tu traverses les siècles et les époques sans vieillir, jusqu’à ce que quelqu’un te tranche la tête, et tu vas bientôt me sortir que je suis ton âme soeur, que tu as parcourus cinq siècles pour me retrouver, mais que notre amour est impossible parce que t’as envie de mettre mon sang en bouteille histoire de le siroter en guise de diner ? Je ne veux pas être transformée en vampire, Thybalt, je te préviens !! » « T’es sûre que tu vas bien ? » lui demanda-t-il avec suspicion, en posant une main fraîche sur le front de la jeune femme. « Évidemment que non, ça va pas ! Tu apparais sur une photo de 1860, Thyb ! » « Ce qui réfute ton hypothèse selon laquelle je serais un vampire, déjà. » répondit-il en s’intéressant à un autre cliché, un nouveau portrait de famille, sur lequel il apparaissait encore. Mais devant le silence de la jeune femme, il releva le nez. « Bah oui, les vampires n'apparaissent pas sur les photos, pas plus qu’ils n’ont de reflet dans le miroir. » Il avait dit ça sur le ton de l’humour, mais voyant qu’elle ne se détendait pas, il commença à se demander si elle n’était pas sérieuse en lui parlant de vampire et d’immortalité. « Sca, mon ange, je suis né le même jour que toi, tu as vu des photos de moi à différentes époques de ma vie qui témoignent que j’ai vieillis tout à fait normalement, alors s’il te plait, veux-tu bien te sortir toutes ces histoires stupides de la tête ? » Elle hésita un instant devant son bras tendu vers elle pour qu’elle s’y love, puis hocha la tête, et s’approcha, gardant tout de même son regard sceptique rivé sur lui. « D’accord, mais je te préviens, si tu me mords, tout est fini entre nous, et t’auras traversé cinq siècles pour que dalle, mon pote. » Il leva les yeux au ciel devant tant de conneries dans un si petit corps, puis revint aux deux clichés vieillis posés devant lui. « C’est quand même troublant. Comment expliquer que mon sosie du XIXème siècle soit parvenu à dessiner une femme du XXIème siècle ? » Elle fit glisser jusqu’à lui les nouvelles esquisses découvertes par Giulio. Des esquisses qui la représentait elle, mais coiffée de coiffes d’un autre temps, ou habillée en costume d’époque. « Il semblerait que ce ne soit pas une femme du XXIème siècle qu’il ait dessiné, mais bel et bien une femme de son époque. Je parierais même sur une certaine Harriet Davis. » annonça-t-elle en récupérant le paquet de lettres qu’elle n’avait fait que survoler pour le plus tendre. « Attends.» s’exclama-t-il en récupérant le tout, avant que son regard ne s’attarde sur la multitude de documents qui s’étalait sur la table design du jet. « Comment t'as eu tout ça ?» « J’ai passé un pacte avec Giulio. » expliqua-t-elle, laconique, en fouillant dans les papiers afin d’éviter son regard sévère. « T’as vendu ton âme au Diable ?! » s’exclama-t-il avec incrédulité. « Ouai, et alors ? Je couche bien avec un vampire, et on en fait pas toute une histoire, hein ! » Ok, quelque chose lui disait qu’il n’avait pas finit d’en entendre parler, de ça.
Thybalt A. Andreotti
LA MANIPULATION & LA TRICHERIE ♠ sont un art, n’est pas Giulio Andreotti qui veut.
■ Messages : 3716 ■ Age du Personnage : 25 ans ■ Logement : ANDREOTTI; 34 Via Barchetta ; Citta Antica ■ Date d'arrivée à Vérone : 12/12/2009
♠ ♠ ♠ ♠ ■ Relazioni & Famiglia: ■ Job: Maire de Vérone ■ Sono : marié(e)
Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist Lun 25 Juil - 19:49
This is the last night before...
Machinalement Thybalt fit rouler ses épaules cherchant une position plus confortable pour se rendormir. Quelque chose l’avait réveillée, par habitude il avait pensé à une contracture, mais c’est en respirant qu’il lui revient à l’esprit que la source de son réveil n’était pas musculaire mais olfactive. Une odeur, c’était une odeur qui l’avait tirée de son sommeil. Une odeur douceâtre qui avait dérangée son paisible sommeil. Son esprit avait fait le lien entre la nuit et l’incongruité de sentir cette odeur à cette heure. Il ouvrit brutalement les eux et tomba nez à nez avec une magnifique gousse d’ail et des yeux tout aussi remarquables dans lesquels brillait une lueur amusée. Un grognement digne d’un homme des cavernes et totalement saugrenue venant d’un homme tel que lui, toujours tiré à quatre épingles lui échappa. Un rire espiègle lui répondit. Agacé par une énième plaisanterie de Tosca, il grogna une fois de plus et se retourna vivement afin d’enfouir son visage dans son oreiller. Désarçonnée Tosca roula cul par-dessus tête pour atterrir de son côté du lit, riant encore de sa plaisanterie. Finalement le rire l’emporta sur la mauvaise humeur et Thybalt joignit son rire au sien. Si le sujet était ce matin « sujet » à plaisanteries douteuses, la veille l’idée saugrenue de Tosca était bien moins prise à la légère Les découvertes faites par Giulio avaient fortement ébranlées les deux jeunes gens. La photo, les photographies jointes au dossier les avait profondément secoués. Il se coucha au-dessus d’elle et repoussa la gousse d’ail qu’elle présenta à ses lèvres pour s’emparer des siennes. Elle se débattit sous lui avec peu de conviction puis pour lui faire plaisir il embrassa sa gousse d’ail en levant les yeux au ciel.
« Alors satisfaite ? » Marmonna-t-il en roulant sur le côté, l’entrainant avec elle pour qu’elle repose contre son torse. Elle lui sourit, envoya la gousse d’ail au loin. « Maria va croire que tu es enceinte. » Commenta-t-il avec l’ombre d’un sourire en baiser ses tempes. « Pourquoi donc ? » S’étonna-t-elle en le regardant avec curiosité. « Tu manges plus corsé, si elle constate la disparition de sa gousse d’ail, tu es bonne pour sentir tous les regards sur ton ventre, sur ta façon de marcher … Elle rêve d’être grand-mère. » Il ne résista pas à l’envie de bloquer son poing dans le sien lorsqu’elle tenta de lui asséner un coup de poing dans le ventre. « Ni songes même pas, les vampires ne font pas de bébés. » Répliqua-t-elle en agitant son doigt devant son visage en signe de refus. « Même pas en rêve. » « Mais tu en as rêvé… Et tu n’as pas lu Twilight, un vampire et une humaine peuvent faire des bébé tu sais ? »
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Sujet: Re: thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist
thybalt & tosca → little taste off the sugar below my waist